Oluwatosin Papoola, conseiller juridique à Amnesty International, rappelle que le nombre de peines de ort exécutées en Afrique subsaharienne est passé de 25 à 16 seulement, à l’occasion de la publication, la semaine dernière, du rapport annuel sur la peine de mort,
Amnesty International a publié le 21 avril 2021 son rapport annuel sur la peine de mort, qui révèle que le recours à ce châtiment a diminué dans le monde en 2020. Le nombre d’exécutions recensées a baissé de 26 %, passant de 657 en 2019 à 483 en 2020, soit le chiffre le plus bas enregistré par Amnesty International au cours de ces dix dernières années.
L’année 2020 a aussi été la troisième année consécutive où Amnesty International a enregistré le plus faible nombre d’exécutions depuis 10 ans. Par ailleurs, le nombre de nouvelles condamnations à mort prononcées dans le monde, à la connaissance de l’organisation, a considérablement baissé : il a chuté de 36 %, passant de 2 307 en 2019 à 1 477 en 2020.
Il y a eu seulement 305 condamnations à mort en Afrique subsaharienne en 2020, soit 6% de moins que l’année précédente
En Afrique subsaharienne, la situation a connu une relative amélioration en 2020, avec une baisse du recours à la peine de mort et quelques évolutions positives. Le nombre d’exécutions recensées dans la région a baissé de 36 % entre 2019 et 2020, passant de 25 à 16, et celui des condamnations à mort de 6 %, passant de 325 à 305.
Trois pays d’Afrique subsaharienne – le Botswana, la Somalie et le Soudan du Sud – ont procédé à des exécutions, soit un de moins que l’année précédente. Dans la région, ces trois États constituent un groupe minoritaire de pays qui appliquent systématiquement les sentences capitales.
Le Soudan, qui avait procédé à des mises à mort les années précédentes, n’a signalé aucune exécution en 2020. Ce pays a accompli des progrès remarquables sur ce terrain. En juillet, les autorités ont modifié le Code pénal pour interdire l’usage de la peine capitale contre des mineur·e·s.
Cette mesure a supprimé l’incohérence qui existait entre la Loi relative aux droits de l’enfant et le Code pénal, et a mis la législation soudanaise en conformité avec les obligations du pays aux termes du droit international relatif aux droits humains, qui interdit formellement le recours à la peine de mort contre les personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés.
Le même mois, le Soudan a aboli la peine de mort pour l’infraction d’« apostasie », qui n’aurait jamais dû être passible de la peine capitale puisque le droit international interdit le recours à ce châtiment pour les crimes n’impliquant pas un homicide volontaire.
Le Tchad a aboli de fait la peine de mort pour tous les crimes en mai, lorsque le président Idriss Déby Itno, aujourd’hui décédé, a promulgué une nouvelle loi antiterroriste supprimant la peine capitale pour les infractions liées au terrorisme. Le pays avait déjà supprimé ce châtiment de son nouveau Code pénal promulgué en 2017. Avec cette abolition, le Tchad est devenu le 21e pays d’Afrique subsaharienne à abolir la peine capitale pour tous les crimes et a rejoint les rangs des quatre autres pays de la région ayant aboli ce châtiment au cours de ces dix dernières années, à savoir le Bénin, le Congo, la Guinée et Madagascar.
En Gambie, le moratoire officiel sur les exécutions mis en place par le président Adama Barrow en 2018 est resté en vigueur. Bien que la peine de mort n’ait pas encore été abolie dans ce pays et que les tribunaux continuent de prononcer des condamnations à mort, ce moratoire, ainsi que l’engagement juridique de la Gambie aux termes du traité international interdisant les exécutions, sont des pas importants dans la bonne direction.
Tandis que l’épidémie de COVID-19 faisait rage en 2020 et que le monde se concentrait sur la recherche de moyens de sauver des vies face à cette maladie, 18 pays dans le monde ont fait preuve d’un mépris total pour le droit à la vie en procédant à des exécutions.
Au moins 309 condamné·e·s à mort ont ainsi bénéficié d’une commutation en 2020 dans la région, soit une forte augmentation par rapport à 2019 (165).
Des progrès notables ont toutefois été constatés en Afrique subsaharienne, puisque le nombre de condamnations à mort commuées a augmenté de 87 %. Cette hausse est due notamment aux commutations massives prononcées en Tanzanie par le président John Magufuli, aujourd’hui décédé, qui a commué les condamnations à mort de 256 personnes en décembre. Au total, 12 pays d’Afrique subsaharienne – le Cameroun, le Ghana, le Kenya, le Lesotho, le Niger, le Nigeria, la République démocratique du Congo, la Sierra Leone, le Soudan, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe – ont accordé des commutations ou des grâces à des condamné·e·s à mort en 2020.
Au Kenya, l’abolition de l’imposition automatique de la peine de mort ordonnée par la Cour suprême en 2017 a continué d’entraîner la commutation de sentences capitales à la suite d’audiences de redéfinition des peines. Par exemple, 23 prisonniers qui avaient saisi la Haute Cour pour qu’elle réexamine leur condamnation à mort à la suite de l’arrêt de la Cour suprême ont bénéficié d’une commutation de leurs sentences capitales en des peines de prison de différentes durées. L’un des requérants, dont la condamnation à mort a été commuée en une peine de 20 ans de réclusion, a été libéré car il avait déjà passé ce temps en détention.
Malgré les avancées constatées en matière de recours à la peine de mort, le mouvement abolitionniste d’Afrique subsaharienne a encore beaucoup à faire pour débarrasser la région de la peine capitale, qui reste en vigueur dans la majorité des pays.
Amnesty International a eu connaissance de plusieurs cas de personnes condamnées à mort qui ont finalement été innocentées en 2020 (trois au Cameroun et six en Zambie), ce qui constitue un rappel brutal du risque inhérent à toute condamnation à mort.
La peine de mort est un châtiment cruel qui n’a pas sa place dans notre monde. Les pays d’Afrique subsaharienne doivent protéger le droit à la vie et abolir totalement la peine capitale en toutes circonstances.