François Gèze, ce grand éditeur et ami, nous a quittés

Les éditions La Découverte ont annoncé le décès de l’éditeur François Gèze à l’âge de 75 ans, le lundi 28 août. « C’est une personnalité très impliquée dans la vie du livre qui vient de nous quitter », confie à son tour l’ancien directeur du Bureau international de l’édition française (Bief) Jean-Guy Boin dans le journal professionnel Livres Hebdo qui lui a rendu immédiatement hommage.

Ingénieur de formation, François Gèze reprend les éditions Maspero en 1982, fondées en 1959 par François Maspero et rebaptisées La Découverte en 1983. « Quand François Maspero a voulu fermer sa maison suite aux difficultés financières qui s’accumulaient, j’ai été de ceux qui l’ont convaincu de poursuivre. Il a demandé que je vienne l’aider, puis de fil en aiguille, de rester, avant de me confier la direction des éditions », racontait l’éditeur dans l’Obs le 14 avril 2015, quelques jours après le décès de François Maspero. Longtemps indépendante, puis rachetée par Havas en 1998, dont la branche édition est devenue Editis en 2004, La Découverte s’est affirmée au fil des années comme une des rares maisons engagées à gauche, surtout présente dans le domaine des sciences humaines et sociales et des essais.

« Un éditeur de combat »

« Ce n’est pas tous les jours qu’on voit un ingénieur civil de l’Ecole des mines, spécialiste des métaux non ferreux, se transformer en éditeur. Et un ancien gauchiste du PSU (Parti socialiste unifié) devenir PDG d’une société du groupe Havas ». C’est ainsi que le journal Le Monde, dans un article du 19 juin 2001, décrivait François Gèze, le qualifiant d’« éditeur de combat ». « Un homme effacé, un timide, de ceux qui, sans faire de bruit, savent prendre tous les risques », précisait le quotidien.

Engagé très jeune dans des actions de solidarité internationale avec l’Amérique latine – d’abord par rapport au Chili de Pinochet, puis à l’Argentine, où il séjourne entre 1973 et 1975 et pour laquelle il crée en France un Comité de soutien aux luttes du peuple argentin (CSPLA). Il se mobilise en tant qu’éditeur à partir des années 1990, contre les violations des droits humains en Algérie, au temps de la colonisation comme depuis son indépendance.

François Gèze s’est ensuite fortement impliqué dans l’interprofession du livre, contribuant à plusieurs de ses instances : en premier lieu le Syndicat national de l’édition (SNE) et, à partir de 2000, le Cercle de la librairie. Il a été le premier président, en 1983, du Bureau du livre français à New York, créé par François Samuelson pour développer la vente aux États-Unis des droits de traduction des livres français.

Un essai à paraître prochainement

En 2005, il participe activement à la création du portail de revues Cairn.info, très connu du milieu universitaire. Son succès « a permis de sauver de la disparition le fragile écosystème des revues de sciences humaines et sociales, les revenus des revues numériques compensant la baisse de ceux des revues imprimées », disait-il dans la revue Mouvements en 2019.

Le 6 octobre prochain, son essai intitulé La double nature du livre – Quatre décennies de mutations dans la « chaîne du livre » sortira en librairies. Il réunit certaines de ses chroniques publiées lors de ses années d’éditeur en mettant en avant la solidité des métiers du livre malgré l’évolution, notamment avec le numérique.