On aurait, sans doute, aimé que la présidentielle et les législatives du mercredi 30 décembre 2015 se tiennent en Centrafrique dans des conditions bien plus favorables. Mais au point où en est ce petit pays d’Afrique centrale, traversé par une longue vie politique douloureuse, il vaut mieux un scrutin imparfait mais acceptable que pas du tout d’élections. En cela, le double scrutin présidentiel et législatif ouvre des chemins d’espérance. Il va d’abord permettre de mettre fin à la longue transition dirigée par Catherine Samba-Panza, sous la médiation internationale du président congolais Denis Sassou Nguesso. Sans vouloir jeter la pierre à la présidente provisoire et ses collaborateurs, il faut admettre qu’il était devenu urgentissime de mettre fin à la période de transition ouverte en mars 2013 par la chute du président François Bozizé suivie de l’éviction à la tête de l’Etat de son successeur Michel Djotodia en janvier 2014. Disons-le clairement: l’équipe qui a la charge de la période transitoire n’a pas brillé par sa transparence dans la gestion des biens publics, au regard notamment de l’usage de l’aide budgétaire angolaise. En effet, le fait que la fille de la présidente ait eu à manipuler les millions de dollars angolais a fait désordre et écorné l’image du pouvoir. Mme Samba-Panza et son régime n’ont pas non plus paru à la hauteur des immenses défis imposés au pays par l’existence des groupes armés et la faillite de l’Etat.
Sassou, médiateur occupé par son agenda personnel
De son côté, le président congolais Sassou Nguesso s’est progressivement désintéressé de son rôle de médiateur international de la crise centrafricaine tant il était pris par son agenda personnel : obtenir la modification de la Constitution puis pouvoir se présenter en 2016.
La tenue du double scrutin de mercredi, après plusieurs reports, ouvre également une ère d’espérance pour la Centrafrique en ce qu’elle va permettre d’avoir aux commandes de l’Etat des autorités légitimées par les urnes et donc capables de prendre puis d’imposer des solutions difficiles en matière de réconciliation nationale, de désarmement des milices armées, de retour des réfugiés… Et de reconstruction de l’Etat et de l’économie. Ces élections vont sûrement permettre le retour des investisseurs étrangers éloignés du pays tant par l’insécurité que par le caractère provisoire et incertain du pouvoir actuel. Dans ce contexte-là, l’enjeu n’est pas de savoir qui des 30 prétendants au fauteuil présidentiel et des formations politiques engagées pour l’élection des députés sortira vainqueur des urnes, mais de doter le pays d’autorités légitimes. Ce sera finalement à elles d’entamer aussitôt installées la marche de la Centrafrique vers la normalisation. Nul besoin d’être prophète pour dire que le chemin sera long et difficile. Mais, comme on dit en Songo, la principale langue nationale, quand Centrafricain veut, il peut.