Centrafrique, la Cour Pénale Spéciale va dans le mur !!!

Par une loi du 3 juin 2015, votée par le Conseil National de la Transition, faisant office d'organe législatif, et promulguée par Catherine Samba-Panza, la Cour Pénale Spéciale à été instituée pour enquêter, instruire et juger les crimes contre les droits humains commis entre 2003 et 2015.

Mondafrique
Cette juridiction centrafricaine est une forme de déconcentration de la Cour Pénale Internationale qui reste compétente pour les cas les plus importants relatifs aux crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.
Plus de deux années sont déjà écoulées, sans qu’aucune procédure n’ait été commencée. Le budget des premiers quatorze mois , soit près de 8 millions de us dollars, sera épuisé lorsque la CPS entamera ses premiers travaux, sans cesse remis à plus tard, désormais prévus pour octobre 2017.
Il manquera toujours deux sous pour faire un franc à ce « machin » onusien créé par des bureucrates onusiens et des spécialistes de la Common law, ignorant tout de la situation centrafricaine et faisant fi de la disparition de la justice dans ce pays, depuis de nombreuses années.
Quelques questions sans réponses restent posées:
1- Comment concilier le processus Démilitarisation-Démobilisation-Réintégration -Rapatriement ( DDRR) avec les futures audiences de la Cour Pénale Spéciale ? Amnistie réparatrice ou condamnation pénale ?
2- Pourquoi a-t-on mis plus de 30 mois pour entrevoir un début de fonctionnement de la CPS alors que les massacres de civils s’intensifient ? Les nominations de juges nationaux et internationaux et du Procureur spécial sont-elles si difficiles ? Cette invraisemblable lenteur est-elle annonciatrice d’une structure judiciaire essentiellement budgétivore et peu active destinée surtout à calmer la société civile et les bisounours ?
3- Emanation de la Cour Pénale Internationale, la CPS va-t-elle réunir tous ses défauts, bien décrits par un ancien magistrat français, jadis membre de la CPI : personnel hétéroclite aux formations et expériences peu compatibles, conflit entre les droits applicables, prééminence de la Common law des anglo-saxons sur le droit continental d’inspiration napoléonienne, construction plutôt jurisprudentielle avec contribution des témoignages plus ou moins vérifiables. La justice transitionnelle, qui a fait ses preuves au Rwanda, est-elle possible lorsque les victimes dont aussi parfois des criminels et quand il y a pas deux parties en conflit, bien identifiées ?
4- Dans un pays où l’Etat a disparu dans 80 % du territoire, soumis aux hors la loi, comment les enquêteurs de la CPS vont-ils pouvoir faire leur travail en toute sécurité ? Les chefs de guerre incriminés vont-ils se comporter en justiciables respectueux du droit et d’une instance judiciaire hybride ? Les éventuels témoins seront-ils protégés ou laissés sans protection devant des criminels multi récidivistes ? En l’absence de centres pénitentiaires, dignes de ce nom,  où seront incarcérés les mis en accusation ? Quelles seront les réparations données aux victimes ?
5- La nomination par le président Touadera, du magistrat militaire de RDC, Toussaint Muntazini-Mukimapa, n’était pas surprenante. Ce colonel de RDC était le point focal de la CPI en RDC et interlocuteur privilégié des ONG droithommiste anglo-saxonnes, promouvant la Common law et la justice transitionnelle. Le président centrafricain ne pouvait pas faire autrement car le challenger du magistrat congolais, le Sénégalais Mbacke Fall, procureur général des Chambres africaines extraordinaires, qui s’était illustré dans le procès Hissen Habré, ne pouvait vaincre cette coalition en faveur du Congolais. La CPS serat-elle une CPI tropicalisée ? Il aura fallu treize ans pour juger, en première instance,  Jean-Pierre Bemba. Faudra-t il attendre des décennies pour les jugements des crimes commis entre 2003 et 2015 ?
6- Compétente pour les crimes commis jusqu’en 2015, quid des milliers de crimes commis après 2015 ?
Avec les coupes budgétaires annoncées par les Etats-Unis d’Amérique et la priorité donnée à l’assistance humanitaire, les coûts de fontionnement de la CPS sont loin d’être assurés pour l’avenir. Les fortes déclarations du Procureur Muntazini-Mukimapa, drapé dans sa toge à plusieurs milliers d’euros,  devront rapidement être concrétisées par l’ouverture effective des travaux de la Cour Pénale Spéciale.