Notre ami Déby à Paris ce lundi pour régler le dossier Centrafricain

Ce lundi après midi, le président tchadien Idriss Déby est reçu à l’Elysée par François Hollande qui voit en lui le principal médiateur de la crise centrafricaine. A l'heure où un rapport du ministère de la Défense pointe la fragilité de ce chef d'Etat corrompu

Après Sassou, Déby !!! En froid avec le Congolais Denis Sassou Nguesso, actuel médiateur en Centrafrique, depuis qu’il annoncé le référendum pour modifier la Constitution puis briguer un troisième mandat, le Président français, François Hollande, voit dans le président tchadien, de nouveau en visite à Paris lundi, un faiseur de paix. Un homage à un chef d’Etat qui aura été le principal allié de la France danns les guerres menées au Mali et en Centrafrique notamment.

Aujourd’hui, les relations entre les deux pays sont incessantes, confiantes, fraternelles. Et l’amitié entre le dictateur tchadien Déby et le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, bien réelle! Les deux hommes se tutoient et mènent de front, depuis janvier 2015, la lutte contre Boko Haram, jusqu’au Cameroun et au Nigeria. Au nom de la lutte contre le terrorisme. Et peu importe que les experts du ministère de la Défense eux mêmes pondent des rapports, dont un encore tout récemment, pour mettre en garde les chefs des armées françaises sur l’extrème fragilité u régime de leur ami Driss Déby.

Déby, pompier pyromane 

Faut-il que le pouvoir français, sans boussolles en Afrique, manque d’imagination pour considérer un des plus gangrenés des chefs d’Etat africains, Driss Déby, comme le meilleur ami et allié de la France dans la région. Le quinquennat de Hollande avait démarré sur de tout autres postulats. Dans un excellent livre « Hollande l’Africain », le chroniqueur de Radio France International 5RFI) et de Jeune Afrique (1), Christophe Boisbouvier, rappelle à quel point Driss Déby était frappé d’ostracisme au début du quinquennat de François Hollande. Entre Hollande et Déby, il y avait le cadavre d’un opposant au régime, Ibni Oumar Mohand Saleh, disparu en 2008 après avoir été arrèté par les nervis de Déby et qui était proche des socialsites français. « Idriss Déby sait que, depuis la disparition du camarde Ibni, il est ans le viseur des socialistes français, écrit Boisbouvier. il se rappelle qu’en janvier 2008, le PS de François Hollande a dénoncé « sa légitimité très limitée » et « son régime qui bafoue les règles démocratiques ».

Oubliées ses pudeurs militantes! L’occasion malienne va créer le larron. En janvier 2013, Idriss Deby eut l’intelligence politique de mettre 2400 hommes aguerris à la lutte dans le désert au service de l’Armée française partie, la fleur au fusil, combattre les djihadistes du Nord Mal. Les cent cinquante morts tchadiens furent le tribut que Déby consentit à payer pour retrouver la relation privilégiée qu’il avait toujours eu avec la France, services secrets et présidents. Ce role de supplétif que joua pendant l’opération Serval  « Débit de boisson », comme le surnomment ses ennemis, lui permit d’avoir carte blanche en Centrafrique. Ce qui lui permit d’allumer l’incendie dès 2013, en soutenant les musulmans de la Séléka à prendre provisoirement le pouvoir.

Or c’est ce pomier pyromane qui est aujourd’hui reçu par Hollande à Paris, faiseur de paix d’une guerre ethnique qu’il entretient pour préserver ses intérèts pétroliers dans le sud tchadien, proche de la Centrafrique.

Le terrorisme, forcément

De Sarkozy à Hollande, la continuité de la politique française en Afrique apparait totale. Pire, Nicolas Sarkozy avait le mérite d’une indifférence totale vis à vis du continent noir, dont il avait laissé les clées à Guéant, Balkany et consorts, qui se livrèrent à quelques frasques finassières.

Avec François Hollande à l’Elysée, qui pense avoir passé « la journée la plus importante de sa vie politique » en se faisant acclamé au Mali pendant l’opération Serval, le pouvoir français est en première ligne dans ses posssibles compromissions. Or les régimes alliés de la France (Tchad, mais aussi Congo ou Mauritanie) sont désormais usés, corrompus jusqu’à corde par des dizaines d’années au pouvoir et honnis par la population. Ils ne tiennent souvent qu’à la protection, très provisoire comme le montre le Burkina, d’une garde prétorienne. Or le pouvoir français n’envoie aucun signal marqaunt une distance avec ces pratiques, bien au contraire.

Comme il est loin le 58eme engagement du candidat Hollande, « je romprai avec la Françafrique ». Laquelle se drape désormais dans la lutte contre le terrorisme, vielle antienne des Bush et autres néo conservateurs, et ne se vautre plus, c’est vrai, dans de petits arrangements finaciers.

Des experts lucides, mais isolés… 

Le rapprochement constant avec Idriss déby est d’autant plus surprenant que les experts du ministère de la Défense mettent le gouvernement français en garde sur la fragilité du pouvoir tchadien. « Le Groupe de Recherche et d’information sur la paix et la sécurité », un des think -anks de l’armée française, viens de pondre un rapport sévère sur le Tchad: détournement de la rente pétrolière, renchérissemtn du cout de la vie, militarisation à outrance, clientélisme ethnique à la tète des principaux organes sécuritaires (2). Sans parler des premières explosions de mécontentement contre le régime, dont celle de la jeunese

Et les experts du mionistère français de la Défense de conclure ce travail en forme de mise en garde: « Plus fondamentalement, la viabilité d’un modèle de stabilisation régionale sur des bases purement sécuritaires reste questionnable, en l’absence de réponses identifiables aux causes profondes de la radicalisation et de l’enrôlement des jeunes notamment dans les groupes radicaux… En dépit de ses ressources pétrolières, le Tchad se classe toujours au quatrième rang en partant du bas sur les 187 pays dans l’Indice de développement humain des Nations Unies ».

Allo Hollande? Allo Le Drian? Un pays au 183 eme rang mondail en termes de développement humain peut-il vraiment devenir le pivot de la politique africaine d ela France?

 

(1) « Hollande l’Africain », Christophe Boisbouvier, La Découverte, 335 pages, 19, 50 euros.

(2) Les rencontres entre les autorités françaises et tchadiennes sont extrêmement fréquentes. Le président Déby s’est rendu à Paris les 6 et 7 décembre 2013, lors du Sommet de L’Élysée sur la paix et la sécurité en Afrique. Des visites bilatérales eurent lieu le 14 février puis le 4 avril 2014 et enfin le 17 mai lors du Sommet de Paris sur la situation au Nigeria et la lutte contre Boko Haram. Le président Hollande s’est quant à lui rendu à N’Djamena les 18 et 19 juillet 2014, tandis que le Premier ministre Manuel Valls, accompagné du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian s’y sont rendus également le 22 novembre 2014. Et enfin, Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, s’est rendu dans la capitale tchadienne le 21 février 2015

(3) La Direction générale des services de sécurité des institutions de l’État (DGSSIE), est dirigée par le général Mahamat Idriss Déby Itno depuis avril 2014 ; la garde nationale et nomade du Tchad est placée sous l’autorité du général de corps d’armée Mahamat Saleh Brahim, oncle du chef de l’État ; le commandement de l’armée de terre est confié au général Oumar Déby Itno, fils du chef de l’État ; le décret n° 1168 du 12 janvier 2014 nomme le général Youssouf Mahamat Itno, neveu du chef de l’État, commandant des opérations au sein de la commission mixte Tchad-Soudan, chargée de sécuriser la frontière entre les deux pays. En République centrafricaine, les contingents tchadiens ont été conduits sous le commandement du général de corps d’armée Ousmane Bahar Itno, cousin germain du chef de l’État.