Dans sa note « Sociétés militaires privées russes en Afrique subsaharienne : atouts, limites, conséquences », le chercheur Sergey Sukhankin analyse l’expansion de la Russie en Afrique depuis 2014, alors qu’elle avait quasiment disparu des radars depuis la chute de l’Union soviétique.
Un article de Michaël Pauron
Les liens entre la Russie et l’ex président soudanais Omar el-Béchir, qui mettait en avant les « actes agressifs » des États-Unis, étaient étroits. Ils semblent le rester avec l’installation d’un nouveau pouvoir, l’an dernier, au Soudan.
La présence russe au Soudan est plus ancienne qu’en Centrafrique (années 1950). Elle s’est affaiblie dans les années 1990, mais dans les années 2007-2008 Moscou a été accusée de violer l’embargo des armes (imposé par l’ONU en raison de la guerre au Darfour), et d’avoir fourni des mercenaires à Omar El Béchir.
Le soutien indéfectible de ce dernier à la politique d’expansion russe (Géorgie et Crimée) en a fait un allié de poids sur le continent, malgré la forte présence chinoise dans ce pays. Là aussi, M-Invest a su tirer parti de cette proximité, en signant un accord de concession, et installant Wagner dans son sillage afin de protéger ses intérêts.
La SMP est lourdement soupçonnée d’avoir participé aux répressions des manifestations de 2018. Un choix peu judicieux puisqu’en définitive, la situation socio-économique a conduit au renversement d’Omar El Béchir l’an dernier. « Moscou restera très probablement un acteur important dans le pays si des tendances antidémocratiques prévalent », juge néanmoins l’auteur.
La débâcle du Cabo Delgado
Moins connue en revanche, est la présence de mercenaires russes dans le Cabo Delgado, au nord du Mozambique. Avec l’Angola, le Mozambique est l’un des partenaires historiques de la Russie en Afrique. Sergey Sukhankin explique que depuis 2015, année de la signature d’un accord militaro-technique entre Moscou et Maputo, l’aventure russe s’est globalement soldée par un échec sur le plan sécuritaire.
En novembre 2019, des combats contre les insurgés islamistes installés dans la Cabo Delgado se sont soldés par la mort de 5 mercenaires russes, et 20 soldats locaux. Plusieurs sources évoquaient depuis plusieurs mois la présence de la SMP Wagner. Le manque de connaissance du terrain, de la culture et de la langue locales, de la part des Russes, ont finalement conduit les autorités à demander le secours d’une SMP sud-africaines.
Sur le plan économique, la Russie a tout de même obtenu la signature d’un accord en novembre 2019 entre Rosneft et la société nationale d’hydrocarbure mozambicaine, alors que les eaux de l’ancienne colonie portugaise regorgent de gaz naturel. La Russie a su profiter du mécontentement de Maputo dans ses relations avec les sociétés occidentales.