Malgré les lois américaines qui interdisent d’apporter une aide militaire et policière à des régimes dictatoriaux, l’administration Biden épaule la junte militaire au pouvoir au Burkina Faso. Quand il s’agit de combattre Al-Qaïda et l’État islamique, les « valeurs » qui gouvernement la diplomatie américaine tendent à s’effacer.
Une équipe de bérets verts américains est aujourd’hui stationnée à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, mais il lui est interdit d’apporter une aide directe aux forces armées burkinabé. Ce sont des sociétés militaires privées américaines qui préparent la police et les gendarmes burkinabés à combattre les djihadistes.
Les Etats Unis espèrent que cette assistance sécuritaire de faible intensité sera suffisante pour contenir les groupes djihadistes dans cette partie de l’Afrique, et surtout qu’elle empêchera le gouvernement du Burkina Faso d’agir comme le Mali voisin qui a embauché des mercenaires du groupe Wagner liés au Kremlin.
Le Burkina Faso, 22 millions d’habitants, situé au sud du Sahara est aujourd’hui contrôlé aux deux tiers par des milices issues d’Al-Qaïda, de l’État islamique et de Boko Haram. Entre 2017 et 2022, ces milices ont tué 21 138 personnes dans le Sahel, la plupart au Burkina Faso, au Mali et au Niger, selon les chiffres de l’Armed Conflict Location & Event Data Project, une ONG de surveillance de la violence. L’année dernière, les insurgés ont mené 1 470 attaques au Burkina Faso, faisant 3 600 morts.
Coups d’Etat en rafale
En janvier de l’année dernière, des officiers burkinabés ont renversé le gouvernement élu du pays Un deuxième coup d’État a suivi en septembre. Les coups d’État militaires au Burkina ont déclenché la section 7008 de la loi américaine qui interdit d’aider des régimes militaires qui arrivent au pouvoir par des coups d’État. Cette loi a été votée par le Congrès des Etats Unis qui, dans les années 1980, s’inquiétait de l’aide au gouvernement militaire du Salvador. La section 7008 s’applique désormais au Mali, à la Guinée, au Soudan, au Myanmar et au Burkina Faso.
Avant les coups d’État, les États-Unis étaient profondément impliqués dans l’armée du Burkina Faso. En 2019, le Burkina Faso a accueilli des exercices dirigés par les États-Unis pour 2 000 commandos de 32 armées africaines et occidentales, une formation destinée à améliorer les performances sur le champ de bataille des troupes locales contre Al-Qaïda et l’État islamique.
Le lieutenant-colonel de l’armée burkinabé Paul-Henri Damiba, qui a dirigé le premier coup d’État militaire, a suivi un cours de renseignement parrainé par les États-Unis au Sénégal et un programme de maintien de la paix du Département d’État. En 2020, il a suivi une formation de commando dirigée par les États-Unis en Mauritanie.
La concurrence stratégique féroce avec la Russie pour l’influence en Afrique éclipse le processus décisionnel américain. Les gouvernements de la République centrafricaine, du Soudan et du Mali ont engagé des mercenaires russes du groupe Wagner.
L’accord du Mali avec Wagner a conduit à une rupture avec la France. Les États-Unis continuent de fournir une aide humanitaire au Mali, mais ont pratiquement renoncé à une aide militaire. Le Burkina Faso, qui a également éjecté les troupes combattantes françaises, a flirté avec Wagner. Le Burkina Faso teste pour l’instant l’aide américaine et se réserve le droit d’opter pour une solution russe.