Débutée par un grand discours censé rompre une énième fois avec la Françafrique, la semaine africaine d’Emmanuel Macron en laisse plus d’un perplexe, y compris dans son camp, tant les résultats à en attendre sont minces et flou le nouveau projet africain de la France présenté à l’Élysée. « La nécessaire humilité » mise en avant par le Président français n’a gère débouché sur une vision nouvelle des dossiers franco-africains.
Il faut reconnaître un certain panache au chef de l’Etat français pour commencer son voyage au Gabon, pays symbole de la françafrique, poursuivre son périple au Congo Brazzaville, où siège un « président à vie » et la terminer au Congo Kinshasa où tout un peuple l’a attendu sur le pied de guerre…Encore aurait-il fallu joindre la parole au geste et entendre le président français dresser dans ces pays quelques perspectives susceptibles de séduire l’opinion publique africaine. Ce qui n’a guère été le cas !
Le tintamarre gabonais
La tournée de Macron en Afrique laisse perplexe jusqu’au Quai d’Orsay. Le journaliste Nick Wills rapporte les propos agacés d’un diplomate : « Le président voulait enterrer la Françafrique et commence par le Gabon, qui est dirigé par un président à vie. Pour la cohérence, on repassera ».
En effet, d’autant qu’à six mois de l’élection présidentielle, les Gabonais méfiants ne croient guère à un déplacement motivé par la grande conférence « One forest summit ». Le soutien à Ali Bongo est à peine déguisé.
La population de Libreville a salué l’arrivée du président français par des concerts de casseroles et une journée ville morte, tandis qu’à Port Gentil, les habitants ont sorti les drapeaux russes.
Le Congo Brazzaville visité vite fait
Après cette séquence « malheureuse », le président français doit aussi s’afficher aux côtés de Sassou Nguesso que ces opposants nomment le « vieux dictateur », avec ses 38 années de pouvoir au compteur.
On se demande bien pour quelles raisons Emmanuel Macron a décidé de se lancer dans ce voyage qui pourra être utilisé contre son bilan en Afrique déja peu glorieux. Les images du Président françaisavec Ali Bongo et Sassou Nguesso, deux des parrains de « la Grançafrique » dansl’imaginaire africain, le poursuivront nécessairement. L’absence de réponse à apporter aux Congolaisaprès un si longrêgne de Sasssou renforcera ce malaise.
En RDC, le ressentiment
Mais c’est à Kinshasa, que le voyage aura été le plus périlleux. Depuis le début de son quinquennat, Emmanuel Macron n’a eu de cesse de resserrer les liens entre la France et le Rwanda, un pays qui via le mouvement rebelle M23 attaque l’Est de la RDC depuis un an maintenant. Les Congolais sont à cran, à bout, la détestation de Paul Kagamé a atteint des sommets. Ils sont ulcérés du manque de réaction internationale devant cette agression de leur intégrité territoriale. Lorsque les Congolais comparent leur situation au soutien occidental à l’Ukraine, ils évoquent « un deux poids deux mesures » dont ils seraientles victimes .
Or, l’exercice aura été périlleux pour le président français qui peut pas prendre le risque de fâcher son homologue rwandais, Kigali étant devenue une pièce de la stratégie française en Afrique. Les soldats rwandais sont, à la demande de Paris, envoyés en Centrafrique, au Mozambique et il est question qu’ils remplacent les forces françaises présentes au Bénin
« Macron et Kagamé, criminels »
Au final, la visite d’Emmanuel Macron à Kinshasa n’ a pu que raviver celle des citoyens de la RDC qui ont déjà commencé à crier leur mécontentement. Les murs de l’ambassade de France ont été tagués : « Macron/Kagamé = criminels » « Macron = M23 ».
Sans doute pour atténuer la déception du peuple congolais dans le dossier de l’aide rwandaise au groupe M23, Emmanuel Macron a voulu manifester son intérêt pour les droits humains, sérieusement malmenés en RDC.
RDC, les droits humains, une priorité lors de la visite de Macron le 3 mars
Du coup, le Président français a reçu, le 4 mars, à la résidence de l’Ambassade de France une grande figure des droits humains et un possible candidat à la prochaine Présidentielle, le prix Nobel de la paix Denis Mukwege. Au départ, l’entretien avait été ajouté à l’agenda du président français dans la plus grande discrétion, juste avant sa rencontre officielle avec le président congolais Félix Tshisekedi. Plus tard, l’initiative était rendue publique par quelques fuites bien organisées.
Emmanuel Macron voulait « avoir le ressenti le plus précis et le plus authentique de la situation humanitaire sur place », devait expliquer son entourage à France Inter. Il voulait aussi mettre en pratique sa volonté de « soutenir ce qui se fait de mieux en Afrique », précise un conseiller.
Denis Mukwege, l’homme qui répare les femmes, Nobel de la Paix
Quatre jours en Afrique centrale pour un résultat aussi mince! On reste perplexe sur les véritables buts de cette échappée belle !
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