Le groupe tuniso-mauritanien « Mattel » plombé par Béchir El Hassen 

Béchir El Hassen, fils aîné de l’homme d’affaires Moulaye El Hassen et actionnaire du groupe de téléphonie « Mattel », était autrefois considéré comme une figure prometteuse dans le monde des affaires en Mauritanie. Ce n’est plus le cas!

En quarante ans Béchir El Hassem vit essentiellement des  bénéfices qu’il a pu engranger grâce à  Mattel dont il est l’un des actionnaires à travers la société Comatel dont il a hérité. Son arrestation et son inculpation récentes en Mauritanie pour escroquerie ternissent l’image du groupe mauritanien dont les deux autres actionnaires sont Tunisie Télécom et Mohamed Bouamatou, ex patron des patrons mauritanien qui, après un exil forcé sous le règne de l’ex président Aziz, a repris ses affaires en main grâce au climat désormais apaisé qui existe en Mauritanie.

D’après les cadres internes du groupe de téléphonie, Tunisie Télécom  a nommé un français, Dominique Saint-Jean à la tête de Mattel. A l’origine il était recruté pour six mois afin d’assurer la transition avant la reprise éventuelle de Mattel par Orange, celui-ci ne tardera pas à être confirmé par l’actionnaire majoritaire comme Président-Directeur Général de la société, après avoir sciemment selon certains fait capoter l’opération de rachat par l’opérateur français.

Sous la direction de Dominique Saint Jean, Mattel verra exploser ses frais de fonctionnement et en même temps dégringoler sa valorisation. Aujourd’hui ce gestionnaire médiocre est sous le coup d’un mandat d’arrêt international délivré par la Justice mauritanienne qui l’a inculpé d’escroquerie aux cotés de Béchir El Hassen.

Des comptes dans le rouge

L’effacement de Mohamed Bouamatou pendant dix ans, l’absence de gouvernance en Tunisie et la médiocrité du management ont contribué à transfirmer un groupe florissant et un modèle de coopération régionale en un canard boiteux. La dernière fois où Mattel a distribué des bénéfices, c’était lors de l’assemblée générale du 3 juin 2014. Des dividendes de l’ordre de un milliard deux cent millions d’ouguiyas, soit un peu plus de 4 millions de dollars, avaient été votés par cette assemblée générale.

Depuis le 31 décembre 2015, la situation nette de la société est devenue négative, ce qui a nécessité, conformément à la loi, la convocation d’une assemblée générale extraordinaire des actionnaires pour décider s’il faut prononcer la dissolution anticipée de la société ou poursuivre son activité.

La situation nette de la société Mattel est toujours négative et il faudra attendre l’approbation des comptes de l’exercice 2022 pour avoir une idée de la résorption des pertes.

Il est urgent de redresser le groupe de téléphonie, une entreprise qui fut florissante mais qui ne l’est plus. Ce que beaucoup à Tunis ne veulent pas voir.  « Il est faux, constate « le quotidien de Nouakchott »,  de dire comme le fait la presse tunisienne, que Mattel a distribué des bénéfices sur les deux derniers exercices et que Tunisie Télécom en aurait tiré 35 millions de Dinars ».

Dolce vita

Le vrai responsable de ce gâchis n’est autre que Béchir El Hassen qui, dès son plus jeune âge, s’était démarqué par son aisance financière. Au lycée, il était le seul élève à venir à l’école en coupé sport, ce qui lui a valu une certaine notoriété parmi ses pairs. Né dans un milieu privilégié, il a pu se constituer un réseau de relations dans les cercles étudiants du pays.

Ce fils de famille a dilapidé l’héritage que son père a mis plusieurs décennies à construire. Les projets qu’il initie périclitent. « C’est un moyen, explique-t-on à Nouakchott, d’emprunter de l’argent à ses partenaires ». De l’agence de microcrédit à la concession automobile, toutes ses initiatives connaissent le même sort. En trente ans de carrière on ne lui connait aucune création d’emploi ni intervention dans le domaine social et humanitaire.  » Ce pourrait être, affirme un banquier mauritanien,  une arme de destruction massive pour le groupe Mattel qui cherche à prendre un nouveau départ ».

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)