Un pacte de sécurité entre Séoudiens et Américains sur le modèle asiatique

US President Joe Biden (L) and Saudi Crown Prince Mohammed bin Salman (R) arrive for the family photo during the Jeddah Security and Development Summit (GCC+3) at a hotel in Saudi Arabia's Red Sea coastal city of Jeddah on July 16, 2022. (Photo by MANDEL NGAN / POOL / AFP)

La Maison Blanche envisage un accord de sécurité avec l’Arabie Saoudite sur le modèle de ceux qui ont été signés avec le Japon ou la Corée du Sud.

Le président Joe Biden est pressé de conclure son mandat de président sur une éclatante réussite diplomatique, laquelle pourrait prendre la forme d’un traité de paix entre Israël et l’Arabie Saoudite accompagné d’une avancée sérieuse en direction de la « solution à deux Etats » pour ce qui touche au conflit israélo-palestinien.

Mohamed Ben Salmane, prince régnant d’Arabie Saoudite, n’a rien contre une reconnaissance diplomatique de l’Etat d’Israel, mais il souhaiterait monnayer cette reconnaissance contre un traité de défense qui place l’Arabie Saoudite sous le parapluie militaire américain en cas de conflit avec l’Iran ; il souhaiterait aussi une aide à l’installation d’une industrie du nucléaire en Arabie Saoudite.

Benjamin Netanyahou ne dédaignerait pas un traité d’amitié avec l’Arabie Saoudite, mais sa majorité parlementaire composée de durs du sionisme et de l’orthodoxie religieuse (sans parler du climat de violence actuel en Judée Samarie) lui interdit toute concession en direction des Palestiniens.

Les responsables américains, saoudiens et israéliens discutent continument et les émissaires politiques se succèdent dans les différentes capitales. Concernant la protection militaire demandée par les Saoudiens, l’administration Biden étudie les termes d’un traité de défense mutuelle qui ressemblerait aux pactes militaires robustes que les États-Unis ont signé, voilà quelques décennies, avec leurs proches alliés d’Asie, le Japon et la Corée du Sud.

Les accords signés prévoient que les États-Unis et le Japon ou la Corée s’engagent militairement l’un auprès de l’autre en cas d’attaque tierce (la Corée du Nord ou la Chine par exemple). Dans ce cas de figure, une agression iranienne contre l’Arabie saoudite engagerait une action militaire des Etats Unis.

Les traités de défense que les États-Unis ont conclus avec le Japon et la Corée du Sud ont été forgés après des guerres dévastatrices au milieu du 20e siècle et alors que la guerre froide s’intensifiait. Dans ce cadre, les États-Unis n’ont pas hésité à nouer des alliances destinées à contenir l’envahisseur communiste.

Le premier traité de sécurité américain avec le Japon a été scellé en 1951, pendant l’occupation américaine du Japon après la Seconde Guerre mondiale, puis révisé en 1960. Il permet aux États-Unis de maintenir des forces armées au Japon et dit que si une attaque a lieu contre le Japon, chaque pays « agirait pour faire face au danger commun conformément à ses dispositions et processus constitutionnels ».

 

Les États-Unis et la Corée du Sud, officiellement la République de Corée, ont signé  un traité de sécurité avec un libellé similaire en  1953, lorsque la guerre de Corée a pris fin.

Les deux traités sont explicites en termes d’engagement militaire américain, et le Japon et la Corée sont tous deux placés sous le parapluie de dissuasion nucléaire américaine. En Corée du Sud – compte tenu du risque nord-coréen -, les deux pays ont un commandement conjoint sur la péninsule.

Le Japon était une nation vaincue et démilitarisée lorsqu’il a conclu son traité avec les États-Unis. Pour l’Arabie Saoudite, il en va différemment. L’Arabie saoudite est impliquée dans une guerre au Yémen qui fait tiquer au sein du Parti Démocrate et son bilan en termes de droits de l’homme laisse à désirer. Une approbation au Sénat n’aurait rien d’automatique.

Si un traité d’assistance militaire avec l’Arabie Saoudite voyait le jour, les Saoudiens feraient bien également de surveiller chaque ligne, car les différends entre les Etats Unis et la Corée n’ont pas manqué. Ainsi, quand l’administration Nixon a décidé de réduire les forces américaines stationnées en Corée du Sud – 20 000 soldats américains en moins -, la Corée a violemment protesté. Mais elle a aussi compensé en accroissant son effort militaire.

Les États-Unis ont également peu apprécié que la Corée du Sud, entreprenne de les concurrencer au plan industriel et commercial. A partir de 1982, la Corée est devenue un géant industriel qui a taillé des croupières aux multinationales américaines. Cette évolution a incité les États-Unis à lever leurs dispositions commerciales préférentielles à l’égard de la Corée, à prendre des mesures antidumping sur les produits d’importation et à exiger l’ouverture des marchés sud-coréens, notamment dans les secteurs de l’agriculture et de l’industrie automobile.

Etant donné les ambitions économiques de l’Arabie Saoudite de devenir un géant mondial dans le sport, l’énergie, les hautes technologies…  des tensions de ce type ne sont pas à exclure même apres la signature d’un traité d’assistance militaire.

Les Coréens ont également des obligations militaires. Ils ont envoyé des troupes de maintien de la paix dans plusieurs pays, notamment en Irak et en Afghanistan. Et les deux gouvernements collaborent contre « le terrorisme, la prolifération des armes de destruction massive, le piratage, les crimes organisés, les narcotiques, le changement climatique, la pauvreté, la violation des droits de l’homme, la sécurité en matière d’énergie et les épidémies ».

Rien ne dit que les Saoudiens soient prêts à consentir à un tel effort.

1 COMMENTAIRE

  1. Je me demande si c’est un bon choix des BRICS d’avoir admis l’Arabie saoudite aux BRICS+. Avec un tel accord de protection militaire, les États-Unis ont un moyen de pression sur les décisions que souhaiterai prendre les saoudiens. Les américains pourraient même perturber les actions des BRICS+ à travers des vetos forcés de son débiteur MBS. Et probablement que les usa pourront bloquer les baissent de productions pétrolières du Royaume. Ou alors je n’ai pas les compétences pour comprendre ces « stratégies ».

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