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Sahel : Ces chefs djihadistes morts sans sépulture 

Deux grands chefs terroristes du nord Mali et deux autres du bassin du Lac Tchad sont donnés pour morts sans que l’on puisse aujourd’hui encore montrer leurs tombes. Une situation qui entretient leur légende ! 

Une chronique de Francis Sahel

Moktar Belmoktar donné pour mort, mais sans sépulture

Si la tombe est la meilleure évidence de la mort de quelqu’un, on n’a pas encore la preuve que Moktar Belmoktar est mort. Cette figure emblématique du djihad au Sahel, donné pour mort depuis quatre ans, entretient sa part de mystère. Les services de renseignement occidentaux soutiennent que Belmoktar a bien été tué suite à une frappe militaire dans le désert libyen. Mais à ce jour, il n’y a nulle trace de sa tombe, encore moins la moindre photo de sa dépouille.  

Moins célèbre que l’Algérien Belmoktar, le Burkinabé Malam Ibrahim Dicko fondateur du mouvement djihadiste Ansarul Islam est donné pour mort depuis 2017. De quoi ? Les avis divergent : pour les pays engagés dans la guerre contre le terrorisme au Sahel, « Malam » serait mort à la suite d’une frappe de la force française Barkhane ; pour ses partisans, le fondateur d’Ansarul Islam est décédé de mort naturelle. Mais, ni les premiers ni le seconds ne peuvent indiquer le lieu exact où « le défunt » a été enterré. 

Malam Ibrahim Dicko, le nouveau visage du terrorisme au Nord du Burkina Faso

 Règlement de compte 

Autre décors djihadiste, même morts sans sépulture. Dans le bassin du Lac Tchad, Maman Nur, numéro 2 de la province de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP, en anglais) est donné pour mort depuis avril 2018. Des sources locales citées dans le livre Voyage au cœur de Boko Haram. Enquête sur le djihad en Afrique subsaharienne cosigné en 2019 par le journaliste Seidik Abba et l’ex-gouverneur de Diffa Mahamadou Lawaly Dan Dano assurent que Nur a été tué par les siens à la suite d’un règlement de compte interne. Où Nur a-t-il été enterré ? Aucune indication précise ne permet à ce jour d’y répondre.  

Habib Yusuf, numéro 1 de l’ISAWP,  fils de Mohammed Yusuf le fondateur de Boko Haram, est donné pour mort depuis février 2020 à la suite d’affrontements fratricides entre deux camps de son mouvement djihadiste. Cette mort n’aurait suscité aucun doute s’il y avait la moindre preuve matérielle s’y rapportant.  Là encore, il n’y a ni tombe, ni photo du cadavre du chef djihadiste. 

Au nord Mali comme dans le bassin du Lac Tchad, le mystère est volontairement entretenu sur ces morts des chefs djihadistes. Montrer leurs tombes, c’est admettre qu’ils sont des mortels comme tout le monde, c’est donc casser leur légende. Mais entretenir le flou permet de galvaniser les troupes et de prolonger la légende de leur invincibilité. 

Abdelmalek Droukdel, officiellement abattu par les forces françaises, dont le corps n’a pas été retrouvé

 

Pour des raisons différentes, les Etats en lutte contre le terrorisme ne veulent pas non plus donner des sépultures aux chefs djihadistes qu’ils éliminent. Nul ne sait aujourd’hui encore ce que l’armée française a fait exactement du corps d’Abdelmalek Droukdel, chef d’AQMI au Sahel, tué en juin 2020 par une frappe de Barkhane sur la frontière algéro-malienne. On pourrait en dire autant du corps d’Abou Bakr al-Baghadadi, fondateur de l’Etat islamique, tué en octobre 2019 par l’armée américaine et dont on ne sait pas où se trouve le corps. 

Les chefs djihadistes tiennent à construire leur légende jusque dans leur face-à-face avec la mort. 

Un livre événement sur la dramatique internationalisation de Boko Haram

Francis Sahel 

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