Ramadan jugé pour viols neuf ans après les faits 

Presque neuf ans après les premières plaintes pour viols, le prédicateur devra répondre de ses actes (viols et viol aggravé) du 2 au 20 mars 2026 devant la cour criminelle de Paris. Tariq Ramadan n’a toujours pas modifié sa ligne de défense : il est victime d’un complot.      

Ian Hamel

L’auteur de « Mon intime conviction »  a été condamné en septembre 2024 à trois ans de prison (dont un an ferme) pour viol à Genève. On attend le jugement du Tribunal fédéral, la plus haute instance judiciaire de Suisse. En France, en octobre 2024, la cour de cassation a rejeté le dernier pourvoi de Tariq Ramadan. Initialement, l’audience devant la cour criminelle de Paris était programmée en décembre 2025. Elle a finalement été reportée à mars 2026, sans plus de précisions. Grâce à une armée d’avocats (près d’une quinzaine entre la France et la Suisse), le petit-fils de Hassan al-Banna est parvenu depuis 2017 à repousser l’échéance pour des motifs les plus invraisemblables les uns que les autres.   

Depuis octobre 2017, Tariq Ramadan a toujours soutenu qu’il était victime d’un complot. A l’origine, dans son livre « Devoir de vérité », paru le 11 septembre (sic) 2019, il accuse le pouvoir français. Motif : il gênait « la classe politique », ajoutant : « Il y avait une sorte d’unanimité entre les politiques, les intellectuels et les médias : ma chute était une aubaine, je dérangeais trop de monde ». Dans l’ouvrage de 283 pages, Tariq Ramadan multiplie les accusations contre les plaignantes. « On cite le motif premier de l’argent : des individus l’auraient poussée à agir ainsi contre une importante rétribution », écrit-il concernant l’accusatrice suisse. Au passage, il met aussi en cause une multitude de personnes, d’Alain Soral à Caroline Fourest, en passant par le site Oumma.com, destiné à la communauté musulmane, qui a eu l’impudence de ne pas le soutenir.  

 

La théorie du complot    

 

En 2023, le prédicateur change brutalement de comploteur : ce serait les Émirats arabes unis qui auraient voulu le faire tomber. Mais il n’avance pas d’avantage de preuves. Dans son réquisitoire, la cour d’appel de Paris, le 7 mars 2024, dès la page 4, écrit : « Monsieur Tariq Ramadan n’a eu de cesse de dénoncer l’existence d’un complot entre des accusatrices (…), d’un complot ourdi par ceux qu’il appelle “ses pires ennemis“ », mais « aucun élément ne vient corroborer la thèse du complot en permanence rappelée par Monsieur Ramadan ». Même constat de la part de la Chambre pénale d’appel et de révision de Genève dans son arrêt du 28 août 2024, condamnant Tariq Ramadan à trois ans de prison, dont un an ferme, « le piège qu’aurait d’emblée tendu la lésée (…) dont le but de rencontrer et de pouvoir compromettre l’homme public, n’est pas démontré ».  

 

Tariq Ramadan lui-même croit si peu à cette thèse, qu’il l’abandonne en cour de route… Les magistrats suisses soulignent que « cette hypothèse [d’un complot] évoquée dans un premier temps par le prévenu, n’est d’ailleurs plus plaidée par la défense au stade de l’appel. A juste titre. Rien à la procédure ne vient asseoir une telle machination ». Cela n’empêche nullement l’ancien enseignant à l’université d’Oxford de continuer à porter sur son site officiel, dans des vidéos, les accusations les plus graves contre les plaignantes. On peut tout de même s’étonner que les justices française comme suisse ne mettent pas un frein à ces incessantes campagnes de dénigrement. Sans oublier les menaces et les insultes proféraient sur les réseaux sociaux par une armée de trolls.