La scène diplomatique de la Méditerranée oreintale est en plein bouleversement. La Turquie s’engage, contre toute attente, dans un réchauffement de ses relations avec l’Arabie Saoudite, mais aussi avec les Emirats arabes unis.
Le week-end dernier, juste avant la fin du Ramadan, le président turc Recep Tayyip Erdogan s’est rendu en Arabie saoudite pour y rencontrer le roi Salmane, mais aussi le prince héritier Mohammed ben Salmane – surnommé MBS.
Un déplacement quasi inattendu – que l’on peut sans doute qualifier d’historique – qui vient interrompre près de trois ans de tensions et de relations glaciales entre les deux pays. Ankara et Riyad sont des puissances régionales rivales, et toutes deux prétendantes au leadership du monde sunnite.
La parenthèse Khashoggi fermée
Ces tensions et cette froideur avaient notamment été exacerbées par l’assassinat dans des circonstances terribles du journaliste saoudien – et critique du clan el-Saoud – Jamal Khashoggi en octobre 2018 au consulat saoudien d’Istanbul. La Turquie avait alors directement pointé la responsabilité de hauts responsables saoudiens dans cet assassinat.
Mais depuis plusieurs mois, la Turquie veut jouer l’apaisement. Une série de gestes avaient été entamés par Ankara dès l’année dernière afin de restaurer des relations avec l’Arabie saoudite et d’autres pays de la région (notamment l’Égypte et les Émirats arabes unis). Le dernier d’entre eux, et non des moindres, s’est produit il y a quelques semaines. Lorsque la justice turque a décidé de renvoyer l’affaire Khashoggi aux tribunaux saoudiens.
Vers la levée de l’embargo
Les retrouvailles turco-saoudiennes représentent également une opportunité pour Recep Tayyip Erdogan.Le président turc peut, entre autres, espérer une levée de l’embargo actuellement imposé par le royaume wahhabite sur les produits turcs. De quoi permettre de serrer l’étreinte que subit l’économie turque, alors que l’inflation atteint plus de 60%. La livre turque a dégringolé durant l’année 2021. La levée de l’embargo encouragerait par ailleurs les investisseurs saoudiens à venir en Turquie, et redonner des couleurs à l’économie du pays.
Cette occasion de renouer de bons rapports avec l’Arabie saoudite – mais aussi les autres pétromonarchies du Golfe –, Recep Tayyip Erdogan compte ainsi s’en saisir, surtout en vue de l’élection présidentielle, l’année prochaine. Une élection que le reïs turc considère comme particulièrement spéciale, vu qu’elle aura lieu en 2023, année centenaire de la fondation de la république turque par Moustapha Kemal « Atatürk ».