Le 11 janvier 2013, l’opération Serval était déclenchée. La ville de Kona était libérée par l’armée française de l’occupation d’Aqmi et de ses alliés du Mujao. Un an après, on se souvient
Les véhicules calcinés bordent encore la route qui mène à Konna. Partout on retrouve des traces de l’arrivée des jihadistes et des combats face à l’armée malienne et française. C’était il y a un an. Les soldats maliens reculaient face aux jihadistes annonçant un énième repli. Boubakar Diallo, en charge du jardin d’enfant, se souvient : « on entendait une pluie de tirs. Les militaires étaient affamés, fatigués, ils ont dû abandonner et c’est là que le massacre a commencé… ». Un militaire raconte : « Nous étions en sous effectif ce jour là. Cette journée fut sanglante. Je pense que le bilan est nettement supérieur à ce qui a été dit officiellement». Officiellement justement, il n’y a pas vraiment de chiffres. Dans les rues de Kona, on parle de 25 militaires tués. Jointe par téléphone, la DIRPA ne semble pas capable de donner un bilan précis.
C’était il y a un an mais le souvenir est encore vif. Pour le 31 décembre, le maire de Konna, Ibrahima Diakite a même interdit les pétards. Le bruit du détonement réveillerait les traumatismes de la population… A Konna, l’armée française est la grande libératrice. Damien Boiteux, premier soldat tué de l’opération Serval est porté en héros de guerre. Il y a la rue Damien Boiteux, le garage Damien Boiteux, « et bientôt il y aura un quartier entier baptisé Damien Boiteux » ajoute le maire. L’inauguration d’une statue du soldat se fera à l’occasion du festival des 1 ans de la libération de la ville qui se tiendra du 17 au 19 janvier. Quant à l’école, elle a été rebaptisée « François Hollande ». La ville est devenue un symbole. « Qu’on le veuille ou non, nous sommes entrés dans l’Histoire du Mali » explique Ibrahima Diakite.
Les habitants de Konna ont chacun leur figure héroïque. Il y a l’imam de la grande mosquée qui fut le premier interlocuteur des envahisseurs « J’étais la seule autorité encore présente dans la ville. Le maire, les chefs de village, tout le monde avait fui… ». Au crépuscule, l’imam Saidou a dû officier la prière du vendredi. « Ce que j’ai ressenti pendant la prière, c’est que nous n’avions pas la même religion. Nous n’avons pas le même cœur ». Un jeune homme ajoute ensuite « Depuis l’intervention, certains d’entre nous ont été dégoutés de la religion. Ils ne font plus leur prière. Ces hommes se revendiquaient de l’islam et ça a abimé notre rapport à la religion. »
Boubakar Diallo, lui aussi, est devenu une célébrité. L’homme raconte plein d’entrain, qu’il ne supportait pas de voir le drapeau du MUJAO flotter au dessus de sa mairie. Il n’a pas hésité. Sur un coup de tête, il a grimpé sur le toit de la petite baraque pour y retirer le fanion de ses ennemis alors que la ville était encore occupée. Dans le tiroir de son bureau de professeur, il garde précieusement le large tissu noir.
La ville symbolique se reconstruit cependant peu à peu. Le patron de l’Office du Tourisme de la région reste optimiste « Le pire est passé. On commence à revoir des touristes aller vers le Pays Dogon. Je préfère y croire ».
PAR LAETITIA KRETZ