Diaspora algérienne (volet 2), la France base arrière du Hirak !

Le mouvement populaire baptisé « Hirak », en recul en Algérie, reste toujours très populaire au sein de la diaspora algérienne en Europe et en France. La France est devenue désormais l’ultime agora où le débat politique algérien puisse encore s’exprimer même si la lutte sans merci menée contre les opposants a provoqué un reflux des forces militantes qui se retrouvent, chaque dimanche, place de la République.

Le pouvoir algérien a tenté d’organiser lui aussi à Paris des manifestations de soutien au régime, mais sans grand succès .

Beaucoup d’observateurs ont parié sur la fin du Hirak, au premier rang desquels Xavier Driencourt, l’ancien ambassadeur de France à Alger fort proche du clan Bouteflika qui joue des jeux troubles entre Paris et Alger. Pourtant ni la pandémie mondiale du Covid 19, ni la machine répressive du régime ne sont venues au bout de la mobilisation populaire. Les manifestations de millions d’Algériens, qui ont débuté le 22 février 2019 à Kherrata, sont désormais contenues en Algérie. C’est désormais la diaspora algérienne qui porte, chaque dimanche Place de la République, le flambeau de cet formidable essai qui n’a pas été pour l’instant transformé.

Une vingtaine de collectifs   

A Paris, Place de la République, une vingtaine de collectifs ont vu le jour reprenant les slogans de leurs compatriotes manifestant dans les villes algériennes. Issus dans leur grande majorité de la société civile mais aussi des représentants des partis politiques, ces collectifs, agrées par les autorités préfectorales, organisent et structurent les manifestations du Hirak chaque dimanche sur la place parisienne. Nombres de ces collectifs méritent d’être cités.

Le collectif « Libérons l’Algérie »

Ce collectif est dirigé par Tahar Si Serrir et hacene Loucif et leurs jeunes camarades issus du FFS « canal historique ». Il s’agit de militants restés fidèle à la ligne d’opposition frontale contre le système se revendiquant de l’héritage historique du fondateur du parti en 1963 Hocine Ait Ahmed dont ils se réclament. En rupture avec leur parti dont ils considèrent désormais « domestiqué » par le pouvoir. Ce collectif occupe toujours un espace, chaque dimanche, à la place de république et participe à toutes les manifestations organisées à Paris

« L’agora du peuple »

Ce mouvement est dirigé par Malik Ouled Addia et Nacer Kellali, proche du RCD le parti de Said Saadi qui a soutenu l’arrêt du processus électoral de 1992, Il a servi de caution à la politique sécuritaire des militaires durant la décennie rouge. Il a également participé aux élections communales et législatives, et même, avec trois ministres, au premier gouvernement de Bouteflika, dont il mené une campagne de boycott à son élection 1999. Il passe à l’opposition forcée par les 121 morts de jeunes kabyles lors des événements de 2001. Les militants de l’agora du peuple inscrivent leur engagement dans un RCD renouvelé et la page Said Saadi est désormais tournée.

La « nouvelle Algérie »

Ce collectif animé par Mohamed Benaissa proche du mouvement Rachad, le principal détracteur du pouvoir militaire et l’héritier lointain du Front Islamique de Salut (FIS), a été très présent en Algérie aux débuts du Hirak au point d’apparaitre comme le moteur de la mobilisation, à l’exception d’Alger et de la Kabylie. Ses dirigeants se déplaçaient de Genève et de Londres pour prendre la parole sur la place Parisienne. L’ancien diplomate Mohamed Larbi Zitout, qui depuis Londres est présent quotidiennement sur YouTube, tout comme Mourad Dhina, le vrai patron de Rachad réfugié à Genève, surfent sur la vague des forces du Hirak rassemblées en France, en espérant récolter les dividendes.

La démission de Bouteflika et le succès du Hirak ont permis à « Rachad » de se développer et de se structurer en Algérie. Mais ses militants ont payé le prix fort face à la répression. Un tiers des détenus politiques, indiquent à Mondafrique des sources fiables, seraient fidèles à cette organisation. Fa

Au sein du Hirak où Rachad n’a pas que des amis, leurs détracteurs les ont accusés, alors qu’en 2019 le général Gaïd Salah était à la tète de l’État, d’avoir négocié avec le pouvoir militaire, notamment avec le général Ouassini Bouazza, le patron à l’époque du contre espionnage (DGSI). Ce qui est vrai, c’est qu’il existait des passerelles entre une partie de l’entourage de l’ancien chef de l’armée algérienne et une partie de la mouvance islamiste qui ont tenté, sans succès, de jeter les bases d’un projet politique à la fois moderniste, pluraliste et islamique.

L’agora MJC 

Rachid Nekkaz, à la tète d’Agora MJC (Mouvement de la jeunesse et du changement), est  présent dans les banlieues parisienne. Bien qu’ayant participé à la récolte des signatures en vue de participé aux élections présidentielles de 2014, Nezzaz n’a cessé de vaciller entre opposition légale et opposition populaire. Maintes fois arrêtés, il a été condamné et emprisonné en Algérie mais ses proches partisans marquent timidement leur présence Place de république.

L’ACDA (Agir pour le changement et la démocratie en Algérie)

Ce groupe  dirigé collectivement par Toufik ALLAL, Omar BOURABA, Omar KEZOUIT, Sanhadja AKHROUF, est un mouvement très marqué à gauche, né dans le sillage des revendications populaires de 2011. « Il a pour but de soutenir et accompagner toutes les luttes démocratiques non violentes pour la fin de la dictature et l’instauration d’un État de droit » mentionne la brochure du mouvement. Il tente de rassembler les collectifs sous la même bannière mais en vain. Les clivages idéologiques et partisans ont pris le pas sur l’intérêt commun qui consiste à détrôner les militaires et asseoir une légitimité civile et démocratique.  

L’association « Democratic Algeria » composée de jeunes actifs en région parisienne ayant vécus la décennie noire en Algérie et fortement hostile au régime d’Alger. Ces membres agissent avec intelligence à travers des opérations médiatiques à Paris, à Genève, et d’autres capitales européennes.

Des faux témoins 

Des partis politiques, agrées en Algérie, ont élu domicile tous les dimanches sous des chapiteaux improvisés Place de la République. A l’exception des partis ayant participé aux divers gouvernements de Bouteflika comme le FLN, RND, MSP, les partis marqués dans l’opposition ont tenu un stand chaque dimanche, notamment le premier parti d’opposition qu’est le FFS , mais aussi son frère ennemi, le RCD.

Certains ont tenté, via la place de la République, de se blanchir. Ainsi deux partis, l’UCP de Zoubida Assoul, et Jil Jadid de Sofiane Djillali disposaient également d’une antenne à Paris. Les deux chefs de Parti, connus pour être membres du CNT « conseil national de transition », le parlement fantoche placé par les militaires au lendemain de l’arrêt du processus électoral du 11 janvier 1992, en espérant que leurs partis respectifs soient agréés en même temps. Ce qui ne fut pas le cas. 

À la fin de l’ère Bouteflika, les mêmes créèrent ensemble le mouvement « Mouatana » qui tenta d’instrumentaliser le mécontentement populaire. Réputés très proches des cercles de l’État sécuritaire, ces personnalités politiques se positionnaient, via Paris, dans le jeu politique après l’élection présidentielle de 2019.

Il existe d’autres structures qui a milité en dehors du cadre de l’assemblée des collectifs du Hirak en France. En dépit d’une mobilisation exemplaire, les collectifs pourtant très structurés, n’arrivaient pas dégager une représentativité consensuelle. Une voix unie qui pouvait se présenter comme interlocuteur crédible de la diaspora algérienne en France.

La peur de la répression

Le pouvoir algérien procède désormais par l’intimidation. Les arrestations d’émigrés algériens lors de leur séjour en Algérie se sont multipliés. C’est qu’ils sont souvent dénoncés par des « indicateurs » liés aux services.

En mars 2021, es tribunaux d’Alger ont émis quatre mandats d’arrêt internationaux à l’encontre des activistes établis à l’étranger très écoutés sur les réseaux sociaux. Des militants politiques appartenant au MAK (mouvement indépendantiste Kabyle) comme ceux de Rachad (mouvement islamiste) accusés d’appartenir à des groupes terroristes.  Le pouvoir algérien ne compte pas arrêter sa lutte contre ses opposants. 

A la date du 19 mars 2023, quatrième anniversaire du mouvement de la contestation, les militants de la diaspora organisaient une marche à Paris dont le point de départ était la place de la République. Un journal très proche des services de sécurité algériens annonce que des patriotes algériens ont lancé un appel à un rassemblement concurrent pour dénoncer « l’offensive politico-médiatique menée quasi quotidiennement contre l’Algérie et son peuple pour la déstabiliser ». Une offensive qui «ne peut plus durer ». La préfecture de Paris décidait d’accorder aux deux protagonistes deux lieux distincts dans la capitale.

Résultat, dix-sept nervis ont tenté de perturber la marche en provoquant des altercations. Repérés par les forces de sécurité en civil, le groupe est vite neutralisé et la plupart des agents algériens mis hors de place.  

L’essouflement de la mobilisation

Avec une endurance exceptionnelle, le Hirak a tenu tête au système sans céder manipulations, violences, ou dégradations des biens publics. Rien ne pouvait l’arrêter à l’exception de la malencontreuse pandémie mondiale de la Covid 19. Une aubaine inestimable pour le pouvoir de couper le souffle d’un mouvement qu’aucune digue ne pouvait l’arrêter.

Le répit offert aux pouvoir militaire algérien par l’épidémie lui a permis de déployer un arsenal juridique répressif La réforme introduite au code pénal, spécifiquement l’article 87-bis, qui adopte une interprétation très large du terrorisme (1). Toute personne, ou organisation, qui appelle au changement du système de gouvernance par des moyens non constitutionnels sont assimilées à une activité terroriste.Le dispositif judiciaire déployés au pays en a dissuadé une majeure partie de ne plus manifester. 

L’incendie est contenu, mais les braises sont toujours présentes qui inquiètent le pouvoir militaire. Au point que les autorités algériennes ont tenté d’obtenir de leurs interlocuteurs français une surveillance des opposants résidant en France. Ce qu’à leur grand désespoir, les militaires algériens n’ont pas obtenu.

(1) La loi 87 bis en Algérie prévoit que quiconque reproduit ou diffuse sciemment des documents, imprimés ou renseignements faisant l’apologie des actes visés à la présente section, est puni d’une peine de réclusion à temps de cinq à dix ans et d’une amende de cent mille dinars à cinq cents mille dinars.

Dans le troisième et dernier volet de notre enquête: « Paris est sommé par Alger de neutraliser les opposants »

3 Commentaires

  1. Les animaux sont de sortie, soutenir un régime haineux, corrompus et hostile envers son propre peuple et ses voisins, est ce que c’est légitime..?
    Vous les médias vous êtes les vecteurs de cette ignoble propagande débrayée par ces généraux incultes, corrompus qui dépouille les richesses du pays, vous êtes la risée du monde du journalisme de ce Monde .
    La poignée de manifestants à Paris n’était autre que des incultes, arriérés, Harragas et des sans-papiers soutenant un RÉGIME DICTATEUR.
    De plus, qu’est ce qu’il a avoir le pays voisin dans cette manifestation, ces individus sans cervelle scandants des propos haineux et hostile à son égard. Vous appelez ça une manifestation pacifique.??
    Honte à vous!! Vous êtes la risée du monde , vous faites HONTE à notre peuple.

  2. Ils ont manifesté pour insulter les marocains et le Maroc. La France a choisit un mauvais chemin en s alignant au régime algérien.

  3. Si ces généraux DAF arabo-islamistes, qui colonisent l’Algérie depuis 1962 pour le compte de mama la France, font pression sur la France de Macron (lui même grand dictateur français), c’est qu’ils sont à bout de souffle.
    Un conseil à Macron : on échange pas la liberté du peuple algérien opprimé contre le gaz pétrole des généraux algériens voleurs)

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