La descente aux enfers de Tunisair

Fraîchement nommée présidente de Tunisair, Olfa Hamdi, consultante “grands projets”, diplômée en génie de la construction et gestion de projets de l’Université du Texas, ne fait désormais pas l’unanimité en Tunisie. Sur fond de menace de faillite imminente de la compagnie aérienne!

Une chronique de Meher Hajbi (Maghreb Intelligence)

Experts économiques, figures médiatiques et activistes de la société civile sont montés au créneau pour contester le pari risqué de Moez Chakchouk, ministre des Transports. Ils se posent tous la question : quelle est son expertise du secteur du transport aérien et son expérience dans la restructuration des grandes entreprises publiques en faillite ?

Contrairement à Wassef Ayadi, ingénieur spécialisé dans l’aviation et Directeur Général de Lufthansa Technik, ayant refusé au mois d’octobre de succéder à Elyes Mnakbi, Olfa Hamdi est peu expérimentée pour ce poste en dépit de son self-branding à l’américaine. À vrai dire, le chantier Tunisair est colossal et la faillite, imminente, semble inéluctable. Une descente aux enfers rythmée par un déficit abyssal, une flotte réduite, les retards chroniques, le vol honteux des bagages et les revendications syndicales démesurées… Tous les plans de sauvetage se heurtent au refus catégorique de la Centrale Syndicale, opposée à la cession de 30% du capital et à toute tentative sérieuse de restructuration. Et si les capacités de la jeune Olfa Hamdi à redorer le blason terni du transporteur national sont mises en doute, sa non affiliation partisane présumée l’est également. 

Quand tout semble la séparer d’Ennahdha, seul Radhouane Masmoudi, lobbyiste aguerri et président du Centre d’Études sur l’Islam et la Démocratie (CEID), peut les réunir. Proche de Rached Ghannouchi, il avait été recommandé, en 2012, par le mouvement islamiste pour le poste d’ambassadeur aux États-Unis, où il a résidé plus de trente ans. Masmoudi aurait promis la Kasbah à Olfa Hamdi, ensuite, le ministère des Affaires étrangères, avant de revoir ses plans et enfin se contenter du poste à la tête de Tunisair. Il aurait aussi orchestré son ascension fulgurante via une opération séduction médiatique sur Carthage+, une chaîne dirigée par le nahdhaoui Lassaad Khedher… Certes, la jeune femme, au compte LinkedIn brillant, peut compter sur l’appui et le soutien, dans l’ombre, des islamistes, mais pour relancer la Gazelle, il lui faut un miracle.