High Tech : le Golfe pris en étau entre la Chine et les Etats Unis 

Les Etats richissimes du Golfe Persique misent sur les hautes technologies pour devenir des puissances mondiales, mais le duel Chine-Etats Unis les confronte à des choix politiques et stratégiques pas toujours simples.

Un fleuron chinois des semi-conducteurs serait sur le point de lancer une machine DUV capable de graver des circuits dont la taille est de 28 nanomètres : une véritable percée et un pied de nez à Washington

La guerre que les États-Unis et la Chine se livrent sur les puces électroniques haut de gamme – ou plutôt, le goulot dans lequel Washington tente d’enfermer Pékin concernant ce domaine d’approvisionnement ultrasensible -, n’affecte pas seulement les entreprises technologiques. Les États du Golfe qui ont pour projet de se positionner comme des acteurs clés de l’Intelligence Artificielle (AI) et de la transition écologique se demandent de quel côté pencher.

L’avance américaine

Pour l’instant, le rapport de forces et les investissements sont du côté des États-Unis. En août 2022, l’administration Biden a adopté la loi CHIPS and Science Act, qui a budgété 280 milliards de dollars pour la recherche nationale et la fabrication de puces sur le sol américain. A la même date, le ministère américain du Commerce a interdit à Nvidia et Advanced Micro Devices, deux des principaux fabricants américains de puces, d’exporter leurs produits en Chine, ce qui a plongé le secteur chinois de l’IA dans un état de panique. Les entreprises chinoises ne peuvent se fournir qu’en contrebande, ce qui ajoute à la désorganisation du secteur.   

L’épicentre de la bataille des semi-conducteurs est Taïwan, qui fabrique plus de 60 % de la production mondiale de semi-conducteurs, et 90 % des puces les plus avancées. La Chine dépend fortement des semi-conducteurs fabriqués à Taiwan. Pour riposter aux mesures d’embargo qui la visent, la Chine a imposé le 3 juillet des restrictions sur l’exportation de germanium et de gallium, des métaux spécialisés essentiels à la production de semi-conducteurs et d’électronique. Auparavant, la Chine avait également interdit au fabricant américain de puces Micron de participer à des projets d’infrastructure vitaux. Quelques jours seulement avant cette décision, les Pays-Bas, en coordination avec les États-Unis, avaient imposé des restrictions sur l’exportation de machines avancées de fabrication de puces de la société néerlandaise ASML vers la Chine.

Le géant chinois de la technologie Huawei a participé à la construction de réseaux 5G dans la plupart des États du Golfe

Les États du Golfe, en particulier les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, qui tentent de s’insérer sur différents segments de la fabrication des semi-conducteurs souffrent de cette guerre des puces entre les États-Unis et la Chine. Les chaînes d’approvisionnement sont perturbées et les coûts de production vont croissant. 

Les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite sont d’autant plus gênés de ce conflit qu’ils se sont efforcés d’entrer sur le marché mondial des semi-conducteurs en localisant leur production et leurs talents dans le cadre de  l’initiative chinoise de la Route de la soie numérique. Le géant chinois de la technologie Huawei a participé à la construction de réseaux 5G dans la plupart des États du Golfe et les responsables du Golfe se sont déclarés ouverts à une coopération plus poussée avec la Chine dans le domaine de l’IA.

Taiwan à la manoeuvre

Ce penchant chinois des États du Golfe ne les empêche pas d’envisager une coopération technologique plus large avec des entreprises américaines ou taiwanaises. L’année dernière, le taiwanais Foxconn a proposé de construire une usine de fabrication de semi-conducteurs dans le cadre du giga-projet immobilier Néom en Arabie Saoudite.

En mars 2022, un protocole d’accord a été signé entre l’Advanced Electronics Company (AEC) d’Arabie Saoudite, la Yokogawa Electric Corporation de Tokyo et le géant pétrolier sadouien Aramco. Cet accord vise à développer l’écosystème numérique de l’Arabie saoudite, qui englobe également des projets de fabrication localisée de puces semi-conductrices. Parallèlement, le Qatar et la Turquie, tentent aussi de se prémunir d’une guerre Chine-Etats Unis en lançant des investissements conjoints dans la production de puces. Oman a récemment accueilli le Sommet mondial des semi-conducteurs et des puces, signalant une nouvelle fois l’engagement des États du Golfe dans ce secteur.

Prospective

L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Oman ont les moyens financiers de leurs ambitions dans un secteur à forte densité capitalistique. Ils ont accès à des matières premières clés comme le silicium, le cuivre et l’aluminium, nécessaires à la production de puces. 

Une étude de Strategy& Middle East affirme que les produits de haute technologie représentent une opportunité industrielle de 125 milliards de dollars pour le Moyen-Orient. Le rapport ajoute que trois produits, notamment les semi-conducteurs, les capteurs et les robots à usage industriel ou général, pourraient générer un chiffre d’affaires estimé à 25 milliards de dollars d’ici 2025.

Les Émirats arabes unis ont un plan Industrie 4.0 qui vise à augmenter l’industrie manufacturière de 30 % et le PIB du pays de 6,8 milliards de dollars d’ici 2031. L’Arabie saoudite de son côté travaille activement au développement de son projet NEOM, une mégapole de 500 milliards de dollars alimentée par des technologies intelligentes.

Mais la matière grise nécessaire à l’innovation et la maitrise des processus technologiques très complexes obligent à nouer des partenariats avec des entreprises technologiques mondiales qui sont soit aux États-Unis soit en Chine. Et c’est à ce stade que les choix industriels deviennent aussi des choix politiques.

 

 

1 COMMENTAIRE

  1. La Chine ne pourra pas devenir cette 1ere puissance mondiale qu’elle rêve en arrachant la place aux Usa. Selon les économistes de Bloomberg, le ralentissement de la croissance qui a déjà commencé est inéluctable. Et puis autre frein dans cette avancée Chinoise, c’est le modèle politique chinois, il n’est pas viable à long terme, cette union de force entre régions qui n’ont rien à avoir culturellement, mais bon il y’a des pays au monde qui ont ses régions qui culturellement sont antagonistes, les unes des autres mais au moins elles sont unies pas par la force mais elles l’ont voulu, et ainsi chaque région est libre d’exprimer des us et coutumes, or avec la Chine c’est pas le cas, c’est un système d’union dictatorial qui ne permet pas que les régions expriment leurs cultures, le cas de Xinjiang là où se trouve les ouïgours ou le Tibet dont le bouddhisme est toutefois l’objet des persécutions de la part de l’État chinois. En outre il y’a la surveillance de masses avec les nouvelles technologies, tous ces facteurs tiennent aujourd’hui grâce au PCC (Parti communiste chinois), mais « on peut écraser un champ mais on ne peut pas écraser une espèce végétale » dit l’adage, ce qui revient à dire que le PCC ne continuera pas à écraser le peuple tout le temps de générations en générations, c’est un système intenable à long terme, l’histoire nous le montre avec beaucoup d’exemples comme la Yougoslavie après la mort de l’homme fort Tito, et c’est le même système de l’homme fort ou des hommes forts que le PCC utilise maintenant, et c’est intenable, et donc un moment donné à cause de tous ces facteurs mentionnés ci-dessus: la Chine va s’éclater un jour, et toutes ces régions prendront leurs indépendance les unes après les autres, comme l’est déjà Taïwan de facto, et ces nouveaux s’inspireront justement de Taïwan. C’est ce dont je parle dans mon travail, pour ceux qui veulent en savoir plus voici les liens: https://www.academia.edu/105741345/Quand_la_Chine_éclatera_ (en français)
    https://www.academia.edu/105741408/When_China_will_break_out_ (En anglais)

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