Tchinga Gildas – 32 ans au moment des faits – a disparu au Gabon le 31 Août 2016. Depuis, sa famille ne désespère pas de le retrouver et de savoir ce qu’il est devenu.
« Qu’est-il devenu ? » six ans après sa disparition, les proches de Gildas Tchinga né en 1983 à Tchibanga dans le sud du Gabon, se posent toujours la question. Depuis le 31 août 2016, sa famille est sans nouvelles de lui.
Nous sommes le 31 août 2016 en fin d’après-midi, le Gabon est en pleine effervescence politique et pour cause : les résultats de l’élection présidentielle viennent d’être proclamés et donnent Ali Bongo vainqueur grâce à une fraude évidente. Spontanément, les Gabonais descendent dans les rues de la capitale Libreville – et d’autres villes du Gabon- pour réclamer la vérité des urnes.
Gildas Tchinga fait partie de la foule de manifestants. Cet ébéniste qui travaille à son compte à Libreville (la capitale du Gabon) est choqué comme tous les autres gabonais qui ont décidé de descendre dans la rue. Gildas Tchinga quitte son domicile du haut de Gué-Gué à Libreville en compagnie de son frère pour rejoindre la marche. Les deux frères se séparent au niveau de l’ancienne Radiotélévision Gabonaise (RTG) et ne se reverront plus.
L’assaut contre Jean Ping
Peu après la proclamation des résultats, la répression commence : tirs à balles réelles, arrestations (on en dénombrera plus 1.000 au plus fort de la répression), escadrons de la mort… Les premières vidéos montrant des personnes abattues dans la capitale du Gabon tournent sur la toile et sur les chaines d’informations en continu, le Gabon fait la une. L’Assemblée nationale en feu est le symbole de ce Gabon dont on dit qu’il est « en passe de sombrer dans la violence ». En réalité, une chappe de plomb s’abat sur le pays et la machine répressive tourne à plein régime.
Dans la nuit, le quartier de Jean Ping est violemment attaqué par la garde républicaine. Ali Bongo selon des témoins oculaires assiste en personne à l’assaut. Cette nuit-là, selon de nombreux témoins, plusieurs dizaines de personnes qui se trouvent là sont abattues. Combien sont-elles ? Cela est très difficile à dire d’autant plus que les assaillants disposent « d’un service de nettoyage » qui emportent les corps.
Les mares de sang au sol et les impacts de balles sur les murs du quartier général de Jean Ping témoignent de la violence de l’assaut « ils arrosaient (…) c’étaient des tueurs » dira plus tard un témoin. Un autre dira à France 24 : « J’ai vu au moins huit personnes couvertes de sang et inanimées, dont au moins deux étaient mortes. On a essayé de dormir un peu, à côté des morts. »
Cynisme des autorités gabonaises
Malgré toutes les recherches effectuées par ses proches, il n’a plus eu aucune trace de Gildas Tchinga depuis le 31 Août 2016.Plusieurs personnes sont formelles et disent avoir vu Gildas Tchinga au quartier général de Jean Ping en début de soirée le 31 Août 2016. Après de très longues recherches, Gildas Tchinga n’a été retrouvé ni en prison, ni dans un poste de Police ou de gendarmerie, ni dans un hôpital, ni dans une morgue. Sa famille a saisi la justice gabonaise sans qu’une enquête soit ouverte.
Cynique, l’exécutif gabonais a déclaré en janvier 2019 qu’il n’a « connaissance à ce stade d’aucune enquête judiciaire ou administrative ouverte concernant ces faits (…) et que si les informations étaient apportés et si les victimes déposaient des plaintes, elle seraient traités en droit » tout en proposant de dédommager les familles des victimes de la répression post électorale de 2016.
Un peu avant, sur France 24, Ali Bongo avait assuré que les familles finiraient « par retrouver leurs enfants disparus ».
Un sort funeste ?
Qu’est-il arrivé à Gildas Tchinga ? Si à ce jour, il n’y a qu’un faisceau d’indices qui laissent poindre et craindre qu’il a connu un sort funeste. Six ans après, seule une enquête judiciaire impartiale et correctement menée pourra déterminer ce qui lui est arrivé.
Une chose est sûre, Gildas Tchinga (qui n’est pas le seul disparu de cette crise post-électorale au Gabon) n’a pas disparu de lui-même.
Rappelons que pour les cas de disparition forcée, il n’y a ni prescription ni possibilité d’habeas corpus. Depuis le 1er juillet 2002, la disparition forcée est considérée comme un crime contre l’humanité selon le statut de Rome de la Cour Pénale Internationale (C.P.I.).