« Victoire triomphale du peuple sahraoui devant la justice européenne » : mercredi 29 septembre, le Front Polisario, mouvement indépendantiste sahraoui, a salué dans un communiqué les décisions de justice prises le même jour par le Tribunal de l’Union européenne (UE). Ce dernier annulait deux accords commerciaux dans l’agriculture et la pêche entre le Maroc et l’UE concernant le territoire disputé du Sahara occidental à la suite de recours déposés par le Front Polisario.
« Le Tribunal annule les décisions du Conseil [de l’UE] relatives, d’une part, à l’accord entre l’UE et le Maroc modifiant les préférences tarifaires accordées par l’UE aux produits d’origine marocaine ainsi que, d’autre part, à leur accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable », a statué un arrêt très attendu du Tribunal basé à Luxembourg.
Pour expliquer sa décision, le Tribunal de l’UE a aussi reconnu le Front Polisario « sur le plan international en tant que représentant du peuple du Sahara occidental ».
« Le Tribunal juge que le Front Polisario est le représentant du peuple sahraoui qui, par conséquent, dispose de la capacité d’agir en justice devant les juridictions européennes pour défendre les droits souverains de son peuple à l’égard de son territoire national et de ses ressources naturelles », s’est félicité le Front Polisario.
Et « sur le fond, le Tribunal annule les nouveaux accords UE-Maroc car ils ont été imposés illégalement au peuple sahraoui, contre son consentement », a-t-il ajouté.
Dans son arrêt, le Tribunal de l’UE considère en effet que « dans la mesure où les accords litigieux s’appliquent explicitement au Sahara occidental ainsi que, en ce qui concerne le second de ces accords, aux eaux adjacentes à celui-ci, ils affectent le peuple de ce territoire et impliquaient de recueillir son consentement ».
Un porte-parole du Front Polisario a également déclaré à Middle East Eye qu’il s’agissait d’une « victoire juridique importante » et a souligné que l’accord commercial, séparé, du Royaume-Uni avec le Maroc reposait également sur les mêmes motifs, désormais illégitimes.
Ahmed Ettanji, militant sahraoui et journaliste pour l’ONG-média Équipe Media, a aussi salué cette décision comme une « victoire de la justice et du droit ».
« J’espère que ce sera la première étape pour mettre fin à l’implication illégale des États membres de l’UE dans le vol de nos ressources naturelles, et nous espérons que cela poussera l’UE à contribuer à la fin des souffrances du peuple du Sahara occidental occupé », a-t-il ajouté.
Déploiement de la flotte de pêche européenne
« Nous appelons les dirigeants européens à se conformer aux arrêts du Tribunal car leur défiance à l’égard de la justice européenne continue à entraver le processus de décolonisation du Sahara », a par ailleurs déclaré Oubi Bouchraya, responsable du Polisario chargé de l’Europe et l’UE, cité dans le communiqué.
Malgré ce revers, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell et le ministre marocain des Affaires étrangères Nasser Bourita ont promis de « prendre les mesures nécessaires afin d’assurer le cadre juridique qui garantit la poursuite et la stabilité des relations commerciales entre l’Union européenne et le Maroc ».
Produits agricoles marocains contre pêche européenne
Le Maroc et l’UE sont liés par un accord d’association, signé en 1996 et entré en vigueur le 1er mars 2000, qui englobe le Sahara occidental.Ce partenariat prévoit l’application de tarifs préférentiels aux produits du territoire et stipule que ces derniers bénéficient de préférences commerciales. Pour Rabat, la partie la plus importante de ce partenariat a trait à l’exportation de ses produits agricoles vers l’Europe. Pour les 27, l’un des principaux enjeux porte sur le déploiement de la flotte de pêche européenne dans les eaux adjacentes du Sahara occidental.Le protocole de pêche conclu entre l’UE et le Maroc, renouvelé en mars 2019 et annulé mercredi, permettait à 128 navires européens d’accéder durant quatre ans aux zones de pêche des eaux atlantiques marocaines, y compris au large du Sahara occidental.
Situé sur la côte atlantique et bordé par le Maroc, la Mauritanie et l’Algérie, ce territoire est riche en phosphates et son littoral, long de 1 100 km, est très poissonneux.
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