Le Premier ministre libanais Najib Mikati et le chef d’état major du pays du Cèdre, Joseph Aoun, sont à Paris pour une visite officielle. Un écran de fumée? Les efforts diplomatiques de la France pour dépasser l’impasse politique où se trouve le Liban ne progressent guère. Lors de leur tournée récente auprès des responsables politiques, les ambassadeurs des pays du Quintette (États-Unis, France, Arabie saoudite, Égypte, Qatar) n’ont pas enregistré de percées majeures pour sortir la présidentielle de l’impasse.
Basssam Abou Zeid, Ici Beyrouth
L’importance de cette tournée, dont la première phase s’est achevée jeudi, réside cependant dans les messages sans équivoque qu’elle a véhiculés. L’ambassadeur saoudien, Walid Boukhari, n’a pas pris part à la réunion avec le chef des Marada, Sleiman Frangié. Les raisons de son absence n’ont pas été communiquées par l’ambassade, mais il a été dit qu’elle était motivée par un problème de santé. Un motif couramment invoqué dans les milieux politiques, notamment par ceux qui veulent éviter une situation embarrassante ou, surtout, envoyer un message en s’abstenant de participer à une rencontre déterminée.
L’ambassadeur d’Arabie saoudite a pris part aux entretiens de mardi avec les députés de l’Entente nationale, du Renouveau, du Changement et du Tachnag, mais pas à celles de mercredi avec les chefs des Marada, Sleiman Frangié, et des Kataëb, Samy Gemayel. Il a ensuite pris part à la réunion de jeudi avec Gebran Bassil, le chef du Courant patriotique libre, ce qui suggère qu’il n’y a pas de rupture entre le Royaume et Bassil, mais pas à celle avec les députés du Hezbollah.
L’absence de M. Boukhari aux deux réunions avec Sleiman Frangié et les députés du Hezbollah constitue bel et bien un message politique. L’Arabie saoudite cherche de la sorte à signifier à Frangié qu’il ne répond pas aux critères que Riyad souhaite voir chez le futur président de la République. Concernant le Hezbollah, le message consiste à dire que la position saoudienne à l’égard de ce dernier n’a pas changé, en dépit du rapprochement saoudo-iranien.
Washington reste fâché avec le Hezbollah
En revanche, d’après ces mêmes sources, la présence de l’ambassadrice américaine, Lisa Johnson, à la réunion avec Frangié, témoigne de l’intérêt que les États-Unis portent au discours que le chef des Marada devait tenir devant les ambassadeurs du Quintette. Ces derniers lui ont posé une série de questions portant sur divers sujets d’intérêt, notamment sa relation avec le Hezbollah. M. Frangié a répondu avec sa franchise habituelle, affirmant son engagement à maintenir cette relation, ainsi qu’à soutenir ses armes et son rôle en tant que formation de « résistance ». Selon des sources informées, les propos de M. Frangié n’ont pas convaincu l’ambassadrice américaine, qui n’a cependant exprimé aucune réaction, se contentant de l’écouter.
Il était évident que l’ambassadrice américaine ne participerait pas à la réunion avec le bloc du Hezbollah, classé comme organisation terroriste par son pays. Cependant, elle a été informée que le Hezbollah ne faciliterait pas le processus électoral, en raison de son attachement à la candidature de Frangié, à laquelle il ne semble pas près de renoncer, même en cas de dialogue. De son côté, le président de la Chambre ne convoquera pas une séance électorale avant un consensus préalable sur le futur président. Cette décision réduirait la convocation à une séance à une pure formalité, consolidant, une fois de plus, un nouvel accord aux dépens des intérêts du peuple libanais.