La trêve de 60 jours entre Israël et le Hezbollah, qui devait s’achever le 26 janvier 2025, a finalement été prolongée in extremis dans la nuit du 26 au 27 janvier. Malgré cet accord arraché grâce à la médiation américaine, la situation au Sud-Liban reste explosive.
Le 26 janvier 2025, alors que les déplacés du sud tentaient de regagner leurs villages après la trêve entre Israël et le Hezbollah, ce dernier a orchestré un véritable show propagandiste. Des convois de dizaines de voitures brandissaient fièrement les drapeaux jaunes de l’organisation chiite. À Maroun al-Ras, des hommes agitaient les étendards du Hezbollah et de son allié Amal à quelques mètres à peine d’un char israélien. Dans la ville frontalière de Kfar Kila, des dizaines d’hommes, de femmes et d’enfants attendaient derrière un remblai de sable, drapeaux du Hezbollah à la main. À Bint Jbeil, bastion historique du parti, des militants distribuaient des portraits de Hassan Nasrallah ainsi que des pâtisseries et de l’eau aux voitures des déplacés.
Mais derrière ces scènes de liesse savamment orchestrées, la réalité est bien plus sombre. Le drame a atteint son paroxysme ce même 26 janvier avec la fusillade meurtrière de Houla et Kfarkila, où des civils libanais tentant de regagner leurs foyers ont été pris pour cible par des tirs israéliens. Un événement tragique qui souligne l’échec cuisant de la stratégie du Hezbollah, dont les provocations incessantes ne font qu’attiser les violences.
Le Hezbollah poursuit ainsi sa stratégie du chaos, oscillant entre rhétorique victimaire et démonstrations de force, plongeant le pays dans une spirale destructrice dont il semble se délecter.
L’organisation chiite se présente comme le grand défenseur de la souveraineté libanaise face à l’occupation israélienne. Mais la réalité sur le terrain est tout autre. Le retrait partiel de l’armée israélienne le 26 janvier a tourné au fiasco, révélant la non-volonté du Hezbollah à respecter les termes de l’accord de trêve et à œuvrer pour une véritable résolution du conflit. Il apparaît clairement que le Hezbollah n’a aucun plan de se retirer ni de remettre ses armes à l’armée libanaise. En effet, le Hezbollah ne peut exister sans ses armes, ni son idéologie mortifère du martyre. Si la zone côtière a été évacuée, l’est du Liban-Sud reste occupé. Une situation intenable pour les Libanais déplacés depuis octobre 2024.
La colère monte chez les Libanais
« J’ai vu le Hezbollah parader dans nos rues comme s’ils étaient les maîtres du pays », témoigne M.K., un habitant. « Ces mêmes hommes qui, il y a quelques mois, juraient défendre notre souveraineté, transforment aujourd’hui nos quartiers en théâtre de leurs provocations. Ils exigent le respect des accords qu’ils sont les premiers à violer. »
Un autre Libanais du sud, A.H., renchérit : « Dans toutes les régions que contrôle le Hezbollah, nous vivons au rythme de leur folie. Un jour, ils nous disent que la victoire est acquise, le lendemain que nous devons nous préparer à la guerre. »
« La prochaine fois, il n’est plus question d’accueillir les habitants de la banlieue sud et du sud dans nos régions », s’indigne F.N. « Leur ingratitude est révoltante. Nous les avons accueillis en dépit de nos divergences politiques. C’est comme ça qu’ils nous remercient ? En venant nous provoquer avec leurs drapeaux jaunes miliciens ? »
Naïm Qassem, secrétaire général du Hezbollah, a beau clamer la « victoire » de la résistance, la réalité est tout autre. « Avant le 7 octobre, seules les fermes de Chebaa étaient occupées. Aujourd’hui, grâce à leur prétendue résistance, des villages entiers sont sous contrôle israélien », déplore T.K., un habitant de la région. « Ils ont transformé notre région en un champ de ruines et osent appeler cela une victoire ! »
À Beyrouth, le spectacle politique est tout aussi affligeant. Le Premier ministre sortant Najib Mikati, complice du système, se montre d’un laxisme complaisant envers le Hezbollah. Pendant ce temps, Nawaf Salam, son successeur désigné, se retrouve dans l’incapacité de former un gouvernement d’unité nationale, paralysé par les manœuvres d’une organisation qui semble préférer le chaos au fonctionnement démocratique.
Le Liban, otage des ambitions du Hezbollah
Le Hezbollah excelle dans l’art de l’escalade contrôlée et de la manipulation. Sa parade motorisée du 26 janvier, organisée avec son allié Amal dans les quartiers chrétiens, en est la parfaite illustration. Sous couvert de célébrer le retour des déplacés, cette démonstration de force vise en réalité à attiser les tensions communautaires, rappelant les heures les plus sombres de la guerre civile.
« Le plus révoltant, c’est leur capacité à jouer sur tous les tableaux », s’insurge S.M. « Ils organisent des parades à mobylette dans les quartiers chrétiens tout en prétendant œuvrer pour l’unité nationale. Ils paralysent la formation du gouvernement tout en accusant les autres de saboter l’État. C’est comme si un pyromane réclamait une médaille pour avoir appelé les pompiers après avoir incendié votre maison. »
Cette incohérence se retrouve jusque dans la communication du Hezbollah. Le discours guerrier de Naïm Qassem, diffusé le 27 janvier, ignore superbement l’accord de trêve annoncé la veille. Une dissonance qui trahit soit un manque de coordination inquiétant, soit une duplicité assumée.
Car le Hezbollah est passé maître dans l’art de la manipulation. Tout en attisant les braises du conflit, il participe aux négociations, jouant un double jeu dangereux qui menace tout espoir de résolution durable. La crise économique sans précédent qui ravage le Liban offre un terreau fertile à cette stratégie de la tension permanente. Loin d’œuvrer au rassemblement, le Hezbollah se nourrit des divisions qu’il creuse chaque jour un peu plus.
Derrière la rhétorique de la « résistance », il y a surtout un acteur politique cynique qui prospère sur le chaos et l’instabilité. En maintenant le Liban au bord du précipice, le Hezbollah sert avant tout ses intérêts, au détriment de ceux du peuple libanais.
« Le Hezbollah n’est plus une résistance, c’est une entreprise de démolition qui prospère sur nos divisions », résume R.D., un autre habitant. « Et pendant ce temps, le Liban se meurt de leur prétendue protection. »
Un sursis précaire en attendant l’inévitable ?
La prolongation in extremis de la trêve jusqu’au 18 février offre un sursis précaire. Mais sans changement de fond, elle ne fait que repousser l’inévitable. Le pays du cèdre se retrouve ainsi pris en otage, victime d’un chantage permanent orchestré par le Hezbollah.
« Face à cette stratégie du chaos, l’avenir du Liban semble plus que jamais incertain », confie M.N., une habitante de Beyrouth. « Le spectre d’une nouvelle guerre, civile ou régionale, n’a jamais été aussi présent. Chaque jour qui passe rapproche un peu plus le pays du point de non-retour. La question n’est plus de savoir si la catastrophe peut être évitée, mais combien de temps le fragile équilibre peut encore tenir avant que tout ne vole en éclats. »
Dans ce contexte explosif, la responsabilité du Hezbollah est écrasante. En instrumentalisant les peurs et les rancœurs, en attisant les braises de la discorde, l’organisation chiite précipite le Liban vers le précipice. Sa quête aveugle de domination à l’interne, faute d’avoir gagné la guerre, met en péril l’avenir de tout un peuple.
Le Hezbollah se comporte comme un mauvais perdant, incapable d’accepter son échec cuisant face à Israël. Plutôt que de tirer les leçons de cette défaite et d’œuvrer à une véritable solution, il se venge sur la scène intérieure en exacerbant les tensions et en paralysant le pays, avec la complicité de son fidèle allié Amal, le mouvement chiite dirigé par Nabih Berri, l’inamovible président du Parlement libanais.
Il est temps que le Hezbollah rende des comptes. Qu’il cesse de se cacher derrière la rhétorique creuse de la « résistance » pour justifier ses exactions. Qu’il mette fin à cette stratégie suicidaire qui sacrifie le Liban sur l’autel de ses ambitions. Car c’est bien l’avenir du pays qui se joue dans cette partie de poker menteur.