Dans un entretien en arabe avec la journaliste vedette de la chaîne Qatari Al Jazeera, Khadija Bengana, le président algérien Tebboune livre sa vision des relations internationales. Rien de très neuf dans ce long entretien qui permet au chef de l’état algérien de reprendre l’initiative sur le terrain diplomatique dans la perspective de sa candidature à la prochaine Présidentielle: une hostilité viscérale contre le Maroc, la volonté de retrouver des liens apaisés avec la France, la confirmation, mais sans plus, d’une une relation « ancienne »avec la Russie; le soutien au président tunisien, victime d’un complot; la relance des accords énergétiques avec l’Italie; la dénonciation enfin des positions récentes de l’Espagne, avec qui, souligne le président Tebboune, les relations ne sont pa totalement rompues.
Au total, le Président algérien aura été d’une extrême prudence.
Alors que le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, vient de quitter le gouvernement pour se mettre en réserve de lla République, et non comme nous l’avions écrit à tort en raison d’un état de santé qui serait mauvais, le président Tebboune, affaibli par ce départ, tient à montrer qu’il reste le seul véritable patron de la politique internationale en Algérie. Ce qui est, chacun le sait, une simple posture, compte tenu du role déterminant de l’institution militaire en Algérie.
À la seule question concernant la situation interne de l’Algérie marquée par les multiples « entraves » à l’exercice des libertés publiques, le président algérien formule une réponse à peu près incompréhensible qui témoigne d’une gêne évidente; « La question des entraves est reliée, à travers une relation organique, avec les tentatives de provoquer la confusion et l’instabilité dans le pays ».
Al Jazeera : Concernant les relations régionales avec les voisins de l’Algérie à savoir l’Espagne, le Maroc, l’Italie. Concernant le Maroc, en dépit des médiations proposées par des États intermédiaires, où l’on est les relations avec le Maroc ?
Le président Tebboune : Tout d’abord, il est regrettable d’avoir de telles relations entre voisins. On doit faire un récapitulatif des relations. En 60 ans d’indépendance, les frontières ont été fermées 43 ans sont autant de preuves à la réponse de votre question. Finalement, on est arrivé au point de non retour. Notre posture est une réaction à une réaction. Nous n’avons jamais été les initiations des plans d’agression
Al Jazeera: Et les conditions de normalisation des relations ?
Le président Tebboune : Nous avons accepté » la médiation des frères. Cependant, nous n’avons pas trouvé matière à la médiation. Nous avons fermé les frontière terrestres et aériennes pour ne pas arriver à une situation non voulue, à savoir l’affrontement.
Al Jazeera Avec l’Espagne les relations se sont détériorées. Quelles sont les conditions d’une normalisation avec l’Espagne ?
Le président Tebboune : Nous avons avec l’Espagne un traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération » conclu en 2002, mais dont le gouvernement espagnol s’est affranchi franchis. Ce gouvernement espagnol a oublié qu’il était l’autorité administrante du Sahara occidental. Le gouvernement Sanchez a pris la décision de manière unilatérale et sans recourir au parlement. Sans l’annonce du Roi Mohammed VI, on ne serait pas au courant.
Al Jazeera Lors de sa récente visite à Alger du Haut représentant de la politique étrangère de l’EU, Monsieur Joseph Borell, a-t-il proposé une médiation entre votre pays et le sien ?
Le président Tebboune : Oui, il a tenté mais je lui ai expliqué la situation et surtout notre position. Certes, nos relations commerciales ont diminué de manière drastique. L’Espagne est affectée économiquement.
Al Jazeera Est-ce un début d’un partenariat économique ?avec l’Italie
Le président Tebboune : Les échanges avec l’Espagne ont diminué certes, mais ils ne se sont jamais complètement rompus. Il y a encore des échanges entre acteurs économiques du secteur privé. Il y a des contrats qui sont en cours et d’autres en attente d’être renouvelés peut-être.
L’Espagne et l’Italie étaient à égalité dans les échanges. Avec l’Italie, nous avons conclu des traités qui nous permettent d’élever nos relations au niveau stratégique. Nous avons toujours eu avec l’Italie des relations solides y compris durant la guerre de libération. C’est une relation historique.
Al Jazeera Qu’en est-il des accords d’énergie avec l’Italie ?
Le président Tebboune : Les accords sont conclus avec l’Italie pour le pétrole, le gaz, l’électricité et l’hydrogène, On avait un projet de pipeline qui a été gelé. Une étude est en cours pour réactiver ce projet. Il y a des problèmes de financement par l’UE, mais on peut le financer en partenariat avec l’Italie.
Al Jazeera Les relations avec la Russie sont solides et anciennes, classiques et stratégiques. Lavrov, le ministre des affaires étrangères a rendu visite à Alger et au mois de Mai vous allez vous rendre à Moscou.
Le président Tebboune : Notre relation est ancienne, le président Poutine veut me rencontrer.
Al Jazeera Est-ce que l’Algérie s’apprête à jouer une médiation dans la guerre qui oppose la Russie à l’Ukraine d’autant que votre ambassade est de nouveau ouverte à Kiev.
Le président Tebboune : Oui, l’Algérie est habilitée à jouer le rôle de médiation. Nous avons tenté une médiation au sein de la ligue arabe initiée par l’Algérie mais qui n’avait pas abouti.
Al Jazeera Votre ambassadeur n’est pas revenu à son poste à Paris, et vous-même aviez programmé, ce printemps, une visite à Paris avant Moscou. Comment voyez vous vos relations avec la France?
Le président Tebboune : Notre relation avec la France est normale, avec des oscillations de haut en bas (rires). Nous avons vécu ensemble un passé douloureux ayant vécu ensemble durant 132 ans. Il y a des choses pas bien se sont produites et notre peuple a peur pour son histoire. Nous ne pouvons faire des concessions sur notre histoire et notre mémoire.
L’ambassadeur reprendra son poste, nous avons une forte communauté. Concernant Borell, le Gouvernement Sanchez ne reviendra pas sur ses engagements. Par contre, si le gouvernement change, la position engagée par Sanchez changerait.
Al Jazeera La question du Sahara occidental est-il pour l’Algérie une question de décolonisation ou sécurité nationale ?
Le président Tebboune : C’est une question de décolonisation purement et simplement. Elle est traitée ainsi au sein des nations unies
Al Jazeera :, La situation a changé, il y a des reconnaissances internationales
Le président Tebboune : Non, il y a un folklore diplomatique. Le Polisario est reconnu par 74 pays, il est membre de l’UA. L’Algérie a mis tout son poids diplomatique dans la lutte contre l’apartheid, Timor oriental, …etc. L’Algérie soutient le droit des peuples. Je vous donne un scoop, l’Espagne nous a proposé de nous donner le Sahara occidental en 1964 que Benbella a refusé.
Al Jazeera: La relation avec la Chine et les Etats unis ? La Chine joue la médiation entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. Elle a une relation stratégique avec l’Algérie.
Le président Tebboune : Nos relations avec la Chine sont très bonnes. En 1962, les premiers médecins qui sont venus en Algérie étaient des chinois. La chine nous a aidé depuis 1956 bien avant l’indépendance.
Al Jazeera Les Etats-Unis voient vos relations avec la Russie de mauvais œil.
Le président Tebboune : nous tentons d’expliquer aux Américains que nos relations ne reflètent pas un alignement militaire ou idéologique. Nous sommes un État médian dans le non alignement. Nous nous considérons comme des amis des Américains. Nous faisons partie des pays non alignés. Nous traitons avec les Etats Unis, la Russie, la Chine. D’ailleurs, la plus grande compagnie pétrolière dans le pays est américaine comme Chevron et autres.
Al Jazeera Le Qatar est le premier investisseur en Algérie.
Le président Tebboune : Notre relation avec le Qatar est plus que bonne. Elle est connue de tous, elle dépasse tous les secteurs économiques et autres. Mes sentiments fraternels pour son excellence l’Émir TAMIM sont excellents et c’est réciproquement. Nous sommes très proches.
Concernant l’Arabie Saoudite, et pour la première fois un haut conseil de coordination Saoudo Algérien a été mise sur pied présidé conjointement par le Mohammed Ben Selman et le premier ministre algérien. Nos relations avec le Royaume sont anciennes. Bien avant l’indépendance, sa contribution à notre révolution est quelque chose d’inoubliable notamment celle du Roi Fayçal. Nos relations sont ininterrompues, nous n’acceptant aucune atteinte au royaume. Toute atteinte au royaume provoquera une réaction immédiate de l’Algérie.
Al JazeeraLa Libye a de longues frontières avec l’Algérie, y-a-t-il des défis sécuritaires ?
Le président Tebboune : IToutes nos frontières sont des défis sécuritaires. Notre sécurité est menacée et nous sommes encerclés. En tant qu’État non belliqueux, nous tentons de vivre avec ce contexte difficile.
Al Jazeera Khadija Bengana Bruxelles a évoqué la possibilité de l’effondrement de l’Etat Tunisien.
Le président Tebboune : L’Algérie soutient la Tunisie. Comme nous l’avons fait de l’époque de Kaid Beji Essaibssi et bien avant.
Al Jazeera Mais certains acteurs tunisiens considèrent l’Algérie leur président comme un dictateur.
Le président Tebboune : Nous soutenons Hais Saied, le symbole de l’Etat tunisien. Élu par le peuple, il n’est pas au pouvoir par la force ou un coup d’État.
Al Jazeera Khadija Bengana Est-ce un soutien au président ou à l’état tunisien ?
Le président Tebboune : Les deux. Soutien à l’Etat à travers celui qui la dirige. Si on apporte notre soutien à la Tunisie à travers des organisations, cela signifie qu’on s’immisce dans les affaires intérieures. Nous avons comme interlocuteurs des institutions d’Etat officielles avec lesquelles on travaille.
Nous ne laisserons pas la Tunisie tomber et nous ne nous abandonnerons pas la Tunisie, n’en déplaise à ceux qui s’y opposent. Parce qu’actuellement, il y a un complot contre la Tunisie.
Al Jazeera Par qui ?
Le président Tebboune : Il y a plusieurs protagonistes. La crise s’est empirée depuis la réception du président Sahraoui Ibrahim Ghali par le président tunisien.
Al Jazeera Faut-il cautionner les dépassements du président du cadre des institutions de l’Etat ?
Le président Tebboune : Se sont des affaires intérieures dont on ne doit pas s’immiscer
Al Jazeera Concernant la demande de l’Algérie d’intégrer le BRICS, en sachant qu’il s’agit du plus grand pays d’Afrique et Arabe, premier exportateur du pétrole en Afrique et quatrième économie du continent. Le pays n’a pas de dette. Est-ce que tous ces éléments sont suffisants pour l’adhésion de l’Algérie au BRICS ?
Le président Tebboune : Ces éléments sont un soutien à sa candidature. Il reste un travail à faire pour cette année, on doit augmenter la production de nos produits nationaux. On doit élever le niveau de l’industrie. On doit opérer des ajustements des indices économiques qu’on doit réformer.
C’est ainsi qu’on peut prétendre à une entrée au sein du BRICS la tête haute. La Russie, la Chine, l’Afrique du sud ont donné leur accord. Quant au Brésil, avec Lulla cela doit passer contrairement à son prédécesseur. Donc, la porte est ouverte.
Al Jazeera Quand la décision sera prise ?
Le président Tebboune : Je crois cet été. Il y aura une réunion qui statuera.
Al Jazeera Une question qu’il faut prendre comme elle se présente en ayant un cœur ouvert. Il y a des critiques sur les questions relatives aux entraves aux libertés dans le pays.
Le président Tebboune : (coupe prématurément la question) La question des entraves est reliée, à travers une relation organique, avec les tentatives de provoquer la confusion et l’instabilité dans le pays.
Chaque cinq ans, on tente à travers le soft power en injectant et soutenant des éléments pour accomplir cette mission. Je vous donne deux chiffres. On a en Algérie 8500 journalistes et 180 quotidiens, ainsi que 20 télévisions privées sans évoquer les revues et les magazines. On n’a jamais usé de la contrainte.
Al Jazeera Mais tous gravitent dans l’orbite du système
Le président Tebboune : L’opposition au pouvoir par la réflexion et à travers les idées, les critiques des choix économiques du gouvernement est exigée. Mais l’insulte, la défense des intérêts étrangers ainsi que les soutiens financiers. Amnesty International ferait mieux d’aller défendre les enfants palestiniens dans les prisons israéliens.
Comme d’habitude, monsieur Teboune nous a habitué aux mensonges et contre-vérités. J’en citerai deux parmi d’autres : il dit que l’Espagne a proposé de céder le Sahara occidental à l’Algèrie en 1964 !!!! et que Ben Bella l’ancien président Algérien avait refusé. Ceci n’est qu’une invention de Teboune adressé aux Algériens. La deuxième mensonge est celle concernant la République Fantomatique Sahraoui qui est reconnue par 74 États !!! d’après lui. Il a fait mine d’oublier de dire que nombreux pays ont retiré leur reconnaissance à ce « pays » établi à Tindouf en Algérie. Actuellement, ils sont une quinzaine de pays à reconnaître cette République chimère.