De nombreux pays dépendants exclusivement de la production de céréales de l’Ukraine ne sont plus ravitaillés depuis le début de la guerre. Conséquence : la crise alimentaire mondiale risque de s’aggraver et de pousser sur les routes de l’exil des millions de personnes, prévient Frontex, l’agence des garde-frontières de l’Europe.
L’Union européenne doit se préparer à l’arrivée de nouvelles vagues de réfugiés poussés par une crise alimentaire mondiale, aggravée par la guerre en Ukraine, a averti lundi 12 juillet la directrice par intérim de l’agence de garde-côtes et de garde-frontières Frontex, Aija Kalnaja.
Outre les Ukrainiens, « nous devons nous préparer aussi pour les réfugiés venant d’autres régions à cause de l’insécurité alimentaire », a-t-elle déclaré à la presse en arrivant à une réunion à Prague des ministres européens de l’Intérieur.
Flambée des prix et insécurité alimentaire
La sonnette d’alarme est tirée par l’agence européenne qui surveille les flux migratoires aux portes de l’Europe. Et elle inquiète Bruxelles qui défend depuis des années une politique répressive à l’égard des migrants – en multipliant notamment des accords avec la Libye, la Turquie, l’Algérie ou encore le Maroc – pour enrayer le flux d’arrivée de migrants africains, moyen-orientaux et asiatiques.
Pourquoi une telle inquiétude de « nouvelles vagues d’arrivées » ? Parce que la guerre en Ukraine a stoppé la production de blé du pays, un des plus gros exportateurs au monde de céréales. Environ 20 millions de tonnes de céréales provenant de la récolte de l’année dernière sont bloquées dans les ports ukrainiens sur la mer Noire. Conséquence : les prix flambent et le risque d’une crise alimentaire mondiale guette notamment les pays africains et moyen-orientaux.
En effet, quasi-exclusivement dépendantes de l’Ukraine (et de la Russie) en matière de céréales, la Tunisie et l’Égypte par exemple pourraient bien, à cause du conflit en cours, manquer de pain, aliment de base pour des millions de personnes. En 2021, la Tunisie a consommé 2,42 millions de tonnes de blé (tendre et dur), alors que la production locale atteignait seulement 682 600 tonnes.
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L’augmentation des prix des produits de base, les pénuries, couplées aux contestations sociales qui en découleraient, pourraient pousser encore davantage de personnes à quitter leur pays. Car la crise économique et le manque de perspectives professionnelles sont parmi les raisons qui entraînent, chaque année, des milliers de candidats à l’exil à prendre la mer, au péril de leur vie.
« Plus de 100 millions de déplacés dans le monde »
« Cela va créer des vagues migratoires. Donc nous nous préparons », a ajouté la directrice par intérim de Frontex. L’agence doit augmenter ses effectifs permanents à 10 000 garde-frontières et garde-côtes à l’horizon 2027. Et envisage, dans cette perspective des commandes d’armes « létales et non-létales ».
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Le Haut Commissaire aux réfugiés de l’ONU Filippo Grandi a également averti en juin que sans réponse à la crise alimentaire provoquée par la Russie, le record de 100 millions de personnes déplacées dans le monde allait encore grossir, évoquant « un grand nombre ».
La guerre déclenchée par la Russie en Ukraine le 24 février a provoqué une vague de réfugiés en provenance de ce pays – sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale – qui a poussé l’UE à leur octroyer un statut de protection temporaire inédit.
Selon l’ONU, l’UE accueille 5,6 millions de réfugiés ukrainiens. La Pologne est le pays d’UE qui en compte le plus (1,2 million). La République tchèque est le pays qui en accueille le plus par rapport au nombre d’habitants (près de 400 000).
*Source : InfoMigrants