Alassane Ouattara annonce à demi-mot sa candidature à la présidentielle

Le président ivoirien qui continuait d’être silencieux, depuis des mois, sur son avenir politique a laissé entendre, ce jeudi 9 janvier, devant le corps diplomatique, qu’il sera candidat à un quatrième mandat dans un pays qui n’en autorise officiellement que deux, en estimant qu’il a eu raison de renoncer à passer la main à une nouvelle génération comme il l’avait initialement prévu et en affichant à la fois sa bonne santé et son intention de continuer à servir son pays.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Fin du suspense donc. Même si Alassane Ouattara n’a pas encore dit qu’il est officiellement candidat à un quatrième mandat, en revanche il en a dit assez pour que les coûteuses cérémonies d’appel à sa candidature pour la prochaine présidentielle cessent. Car il a confessé aux ambassadeurs accrédités en Côte d’Ivoire, lors de ses vœux corps diplomatique, que même s’il leur avait promis, en 2020, de laisser la place à une nouvelle génération pour prendre la tête du pays, il a eu raison d’écouter ses partisans qui lui demandaient de continuer.

Qu’au surplus il est en bonne santé et a envie de continuer à servir son pays. « Il y a cinq ans, j’indiquais au corps diplomatique qu’il était de mon intention de ne plus être candidat parce que j’estimais qu’il fallait passer la main à une nouvelle génération. Aujourd’hui, je peux vous dire que j’ai bien fait d’accepter la proposition de mon parti. Aujourd’hui, je peux vous dire que je n’ai pas encore pris de décision. Mais je peux aussi vous rassurer que je suis en pleine santé et désireux de servir mon pays. », a dit Ouattara sous les applaudissements nourris de ses partisans.

Les appels incessants pour le 4è mandat

Comme tout président sortant qui veut laisser croire qu’il est accaparé par le quotidien des populations qu’il dirige et non son avenir personnel, Alassane Ouattara était resté muet pendant des mois sur sa candidature. En lieu et place, son entourage a longtemps scénisé un appel pressant des populations à le voir briguer un autre mandat, le quatrième- totalement illégal au regard de la constitution qui stipule que le président de la République est rééligible une fois- en raison de son bilan socio-économique flatteur.

Ces appels de pieds téléguidés ont ensuite donné lieu à des cérémonies d’hommage parfois loufoques comme le paiement de la caution de candidature pour le président sortant dont le montant est fixé à 50 millions. Cette décision avait néanmoins provoqué le courroux d’une partie des syndicats de planteurs qui ne se reconnaissaient pas dans ce stratagème. Mais cela n’avait rien changé à la position du Conseil-cacao dont les responsables jouaient leur carrière en manipulant ainsi, dans leur intérêt, des associations de planteurs.

Mais le président Ouattara a également profité de sa réponse au doyen du corps diplomatique, Mgr Mauricio Rueda Beltz, qui a souhaité voir s’organiser en Côte d’Ivoire « des élections libres, transparentes, inclusives et non violentes dans le respect des idées de chacun aussi différentes soient-elles », que l’élection présidentielle à venir sera démocratique et transparente comme il l’avait déjà dit dans son discours de nouvel an. Et que ce « processus a été enclenché en octobre 2024 avec la révision de la liste électorale ».

 

Les crispations de l’opposition

Aucun mot, en revanche, sur les crispations de l’opposition qui ne fait pas confiance à la Commission électorale indépendante (CEI) et encore moins sur la question de l’inscription de l’ancien président Laurent Gbagbo sur la liste électorale. Le doyen du corps diplomatique a pourtant insisté sur le caractère inclusif du scrutin présidentiel à venir. Mais cela n’a pas semblé retenir l’attention du président ivoirien dont la fermeté voit ressurgir une fois de plus la perspective d’une confrontation directe entre ses partisans et ceux de l’ancien président.

Samedi, lors d’un comité central de son parti, le Parti des peuples africains (PPA-CI), Laurent Gbagbo s’est en effet agacé de ce que le pouvoir ivoirien rechigne encore à l’inscrire sur la liste électorale. Assurant qu’«il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre », il a confié à ses partisans que l’Organisation des Nations Unies (ONU) a écrit au président ivoirien pour qu’il mette son nom sur ladite liste, ce qui le rendrait potentiellement éligible à l’élection présidentielle du 31 octobre prochain. Mais le porte-parole du gouvernement a ironisé sur le sujet en répondant qu’il attend que cette lettre soit mise à la disposition des populations ivoiriennes par celui qui parle de son existence.

Mais au parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), cette quasi annonce de la candidature du président de la République devrait maintenant obliger la direction à ouvrir le jeu et à organiser la convention nationale du parti pour désigner son candidat pour la prochaine élection présidentielle. Alors que Tidjane Thiam, élu en septembre 2023 à la tête du PDCI, se voyait comme le candidat naturel, Jean-Louis, son rival interne, pousse depuis des mois pour aller à cette convention. Mais jusque-là, Tidjane Thiam refusait de le faire tant que le candidat du parti présidentiel n’était pas connu. C’est maintenant fait.   

 

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