Chaque fois que le pouvoir algérien se retrouve dos au mur, il brandit son arme préférée: les pénuries. Sous le règne de Tebboune comme sous celui,jier, de Bouteflika
Une chronique de Djaffar Amokrane
Les récentes pénuries de l’huile d’avant l’élection législative ont été considérées comme une punition contre une éventuelle abstention. Chose faite, le pouvoir crée la pénurie d’eau potable dans la capitale alors que le ministre chargé du secteur avait déclaré que la capitale ne subira pas de coupures. La population est soumise au rationnement de l’eau potable qu’elle voit comme punition collective. Ainsi, les images de livraison de citernes aux quartiers populaires, fiefs des hirakistes, sont interprétées comme des avertissements. « Si seulement, ils pouvaient réquisitionner l’oxygène et de nous le restituer sous condition ».
Étrangement, l’apparition des pénuries coïncident souvent avec des crises inhérentes au système. Les pénuries deviennent ainsi un indice révélateur de guerre de clans au sommet de la pyramide. Les pénuries d’avant et d’après les événements d’Octobre 1988, celle de 2011, et celle d’aujourd’hui sont plus liées à la fois à des guerres de positions au sein du sérail et commei un moyen coercitif contre la population afin de la détourner de l’essentiel.
Faute de proposer des solutions, le pouvoir procède par l’accentuation des pénuries, seul moyen pour lui de détourner le sens de revendications légitimes.
Un jeu d’échecs dramatique
Depuis le passage d’une économie centralisée à travers la période du socialisme de « mamelle » de Boumedienne à l’actuelle économie de « bazar » imposée par les réformes post octobre 88, les pénuries sont devenues le quotidien de la population. Ce passage d’une économie étatique à une économie clanique a permis l’émergence de barons dans le secteur agroalimentaire. Ces derniers ne sont en réalité qu’un relais de clans de généraux qui usent de ce pouvoir coercitif au sein des castes mais aussi contre la population.
Le pouvoir dispose d’un certain nombre de leviers pour créer des pénuries pour chaque catégorie sociale. Internet est un outil coercitif contre les jeunes épris de réseaux sociaux, seule fenêtre de communication sur le monde extérieur. Les jeunes algériens impliqués dans le Hirak font de la toile leur seul moyen de mobilisation et d’organisation. Profitant des épreuves du BAC, le pouvoir coupe internet dans l’ensemble du pays alors que le président Tebboune avait promis, il y a une année, qu’internet sera maintenu durant les épreuves du BAC car des moyens technologiques implémentés bloquent toute éventualité pour des tricheurs.
La pénurie de liquidité a frappé les retraités dépendants des guichets postaux alors que la population préfère globalement garder l’argent à la maison tant que la confiance avec les établissements bancaires est quasi nulle. Ce levier n’a pas eu les résultats escomptés, pire les files d’attentes de personnes âgées en plein mois de Ramadhan accentuent l’inimitié exprimée envers le pouvoir qui châtient la population la plus vulnérable.
Le pouvoir espère être plus efficace en touchant les ménages à travers les pénuries du blé, du lait, pendant que le président Tebboune se trouve à l’étranger pour des soins et le pays sous confinement. A cette période le hirak était en arrêt total mais les clans au sein des sérails étaient en activité permanente. Dans cette logique, le pouvoir se dévoile en donnant un sens aigu aux pénuries qui ne relèvent plus désormais d’un manque des produits plus qu’un mode de gestion inhérent aux pratiques d’un système qui ne dispose plus de ressources politiques pour réformer le pays.