Niger, la manifestation de tous les dangers  

A la grande surprise du pouvoir, Mahamane Ousmane , le principal opposant au régime, affiche une détermination sans failles à remettre en cause le résultat de la Présidentielle en appelant ses partisans à manifester, ce mardi 30 mars, au Niger.

Un meeting de l’opposant numéro un, Mhamane Ousmane, qui considère qu’il a gagné contre Mohamed Bazoum, candiddat du pouvoir

   

Le pouvoir nigérien, encore sous les ordres du président Mahamadou Issoufou, avait tout scénarisé : que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) proclame la victoire de son candidat Mohamed Bazoum. Que ses résultats provisoires soient ensuite confirmés par la Cour constitutionnelle. Que toute contestation de la victoire de Bazoum soit affaiblie avec l’emprisonnement préventif du chef de file de l’opposition Hama Amadou et de l’ancien chef d’état-major Moumouni Boureima dit Tchanga, considérés comme des jusqu’au-boutistes. Pour le pouvoir, Mahamane Ousmane, l’homme au tempérament accommodant, « le sage » allait au fil du temps concéder sa défaite et ouvrir la voie à la consolidation de la victoire du dauphin du président Issoufou. Il n’en fut rien. L’ancien président a trouvé un ton et une posture intransigeante dont on le ne soupçonnait pas. Mahamane Ousmane apparaît déterminé à ne pas « laisser une oligarchie qui veut se maintenir coûte que coûte au pouvoir confisquer sa victoire. » 

Mettant en avant les résultats du second tour qui le donnent gagnant dans toutes les régions du pays sauf à Tahoua, fief du président sortant Mahamadou Issououf, le candidat de la coalition de l’opposition est sûr d’avoir gagné la présentielle.  

Il est convaincu que la Cour constitutionnelle nigérienne n’a pas dit le droit en lui accordant 44,34% des suffrages exprimés contre 55,66% pour son adversaire. 

« La Cour, a-t-il argumenté, s’est placée de fait au-dessus de la volonté populaire et plus particulièrement de la Constitution de laquelle elle tire sa légitimité et ses prérogatives ». 

Les limites du tout répressif  

Soutenu par une coalition de dix-huit partis politiques dénommée CAP 20-21, Mahamane Ousmane est désormais à un point de non-retour dans la confrontation avec le pouvoir. Il a ainsi formellement appelé les forces de défense et de sécurité nigériennes à « accompagner la lutte du peuple souverain pour le triomphe de la vérité et de démocratie ». 

L’ancien chef de l’Etat a franchi un cap dans da contestation du pouvoir en estimant que l’armée et les forces de sécurité intérieure doivent « s’abstenir d’obéir aux ordres illégaux données par des autorités elles-mêmes, illégales et illégitimes. » 

Surpris par « la radicalisation » de Mahamane Ousmane le pouvoir dispose d’une marge de manœuvre très étroite. Il a brutalement découvert les limites du tout-répressif après avoir embastillé des dizaines de militants de l’opposition et coupé internet pendant une dizaine de jours.  

Le contexte sécuritaire du pays marqué par des attaques terroristes qui ont fait plus de 200 morts en une semaine (15-22 mars) sur la frontière nord-ouest ne se prête pas non plus à un usage excessif de la force publique qui aurait été plus utile pour protéger les populations civiles des régions de Tillabéri et Tahoua, limitrophes du Mali, victimes d’attaques des groupes armés terroristes. Enfin, la répression ne peut pas tenir lieu de mode de gouvernance pendant un tout un quinquennat.  

Alors que le camp de Mohamed Bazoum prépare son investiture pour le 2 avril prochain, celui de Mahamane Ousmane annonce une série de manifestations pacifiques à partir du 26 mars pour contester « le hold-up ».