La « zone des 3 frontières » à cent kilomètres de Niamey au Niger est de nouveau frappée par une effroyable attaque qui a fait une centaine de morts et provoque de nouvelles vagues migratoires. Un article de nos confrères de « la Tribune ».
« Je voudrais au nom du peuple nigérien et en mon nom propre adresser nos condoléances les plus émues aux populations de Tchombangou et Zaroumdareye, suite à l’attaque lâche et barbare de leur village. Que l’âme des disparus repose en paix et prompt rétablissement aux blessés », tweetait Mahamadou Issoufou, le président du Niger, dimanche 3 janvier, au lendemain des attaques terroristes qui ont provoqué la mort d’au moins 100 civil
Samedi dernier, de nouvelles violences ont ensanglanté le Niger, non loin de la frontière malienne, du côté de Tillabéri. L’attaque du village de Tchombangou aurait fait 70 morts et plusieurs blessés graves et celle de Zaroumdareye, perpétrée simultanément, aurait provoqué au bas mot, le décès d’une trentaine de civils. Entre épisode terroriste et conflit intercommunautaire, le fond de cet épisode meurtrier reste imprécis.
« Les assaillants sont arrivés nombreux vers 9h. Ils ont attaqué les villages de Tchombangou où l’on a compté 70 morts et Zaroumdareye, où 30 personnes ont perdu la vie », a déclaré Almou Hassane, maire de Tondikiwindi, la commune qui administre les deux villages, à La Tribune Afrique, dans la soirée de dimanche. « Il y a eu également plusieurs blessés dont certains ont été évacués à Niamey et à Ouallam », a-t-il précisé.
De sources bien informées, un évènement avait précédé cette sanglante attaque quelques jours plus tôt, impliquant deux présumés terroristes. Venus en reconnaissance à moto dans un petit village situé dans le département de Ouallam, deux hommes avaient été repérés par un groupe local d’auto-défense qui les aurait lynchés. « Apparemment, il s’agissait d’une réaction contre les populations locales qui se sont organisées pour se défendre contre des attaques terroristes. Les civils avaient identifié deux terroristes venus en moto, quelques jours avant l’attaque (…) Ils ont tué ces hommes et ce qu’il s’est passé samedi, serait une forme de représailles », explique Almou Hassane.
Le 2 janvier 2021, des terroristes de la même mouvance seraient donc revenus en nombre dans la ferme intention de se venger en prenant les villageois par surprise, attaquant tous ceux qu’ils croisaient sur leur passage : femmes, enfants et vieillards avant de mettre le feu aux villages.
Vers un renforcement de la sécurité dans la région de Tillabéri
Dimanche 3 janvier, au lendemain du raid sanglant qui a couté la vie à une centaine de personnes, en blessant plusieurs dizaines d’autres grièvement, une délégation officielle conduite par le Premier ministre Brigi Rafini et par Alkach Alhada, le ministre de l’Intérieur, s’est rendue sur place pour « soutenir moralement les populations ». Un conseil national de sécurité exceptionnel est prévu ce lundi 4 janvier dans la matinée. Des forces de sécurité supplémentaires devraient être déployées dans les jours à venir. « Une stratégie et des mesures propres seront prises pour sécuriser les populations » a d’ailleurs précisé Brigi Rafini, le Premier ministre du Niger dépêché sur place.
Cette attaque est intervenue le jour où la Céni proclamait les résultats du premier tour des élections présidentielles, et où 2 soldats français de la force Barkhane qui réalisaient une mission de renseignement près de Ménaka au nord-est du Mali perdaient la vie dans cette même zone dite « des 3 frontières » (Mali, Niger et Burkina Faso). Déjà, le 12 décembre dernier, le Niger avait été en proie à une violente attaque de Boko Haram qui avait provoqué la mort de 34 personnes à Toumour. La région enregistre en effet, une flambée de violences meurtrières et Diffa tout comme Tillabéri au Niger, payent un lourd tribut face aux terroristes venus notamment du Nigéria voisin.
Dans ces localités où les forces de sécurité sont exsangues et l’Etat absent, les populations s’organisent en groupe d’auto-défense contre les terroristes de Boko Haram et de la Province de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Le contrôle de la zone des 3 frontières fait d’ailleurs l’objet de luttes intestines entre différentes factions terroristes, prenant ainsi les populations locales en otage. A cette heure, aucune revendication n’a été faite bien que le modus operandi de ces dernières attaques ressemble fort aux méthodes de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS).
« Avant l’arrivée des forces de l’ordre sur place, environ 3 heures après l’attaque, les assaillants sont repartis vers la frontière du Mali mais il semblerait qu’à Tchombangou, dans leur face à face avec les villageois, il y aurait eu des victimes du côté des assaillants. Leurs corps auraient été emmenés afin qu’on ne puisse pas les identifier », toujours selon le maire de Tondikiwindi, qui ajoute que ces attaques ont provoqué des déplacements massifs de « populations terrorisées » du côté de Mangaize. Au drame sécuritaire s’ajoute désormais le spectre d’une catastrophe socio-migratoire.