Frederic Bongo (volet 1), la grandeur d’un tortionnaire

Frédéric Bongo (au fond à droite) lors d'une rencontre privée entre Omar Bongo et Nicolas Sarkozy à Paris. Il a été radié de la Garde Républicaine peu après la prise de pouvoir de Brice Oligui Nguema.

Pièce maîtresse du Système sécuritaire du clan, le lieutenant-colonel Frédéric Bongo, fils d’Omar Bongo, puissant patron de la Direction Générale des Services Spéciaux a été limogé par son demi frère et président Ali Bongo.

Mondafrique propose en deux volets le retour sur la grandeur puis sur la décadence de ce « Prince Africain ».

C’était le 21 Octobre 2019, Le Lieutenant-Colonel Frédéric Bongo a officiellement été remplacé par Le Colonel Brice Clotaire Oligui Nguema au cours d’une cérémonie de passation de pouvoir sobre et toute militaire. Cette cérémonie, très discrète, consacre plus que l’installation du nouveau patron du service de renseignement le plus secret et le plus puissant du Gabon.  Il marque la fin d’une époque à la Direction Générale des Services Spéciaux et marque aussi un coup d’arrêt à la carrière fulgurante de l’un des fils préférés d’Omar Bongo.

Une jeunesse entre la Sarthe et Paris

Frédéric Bongo naît à Paris le 26 Août 1979, dans le 16me arrondissement. Il est le fils d’Omar Bongo, Président de la République du Gabon et d’Edmond Jacqueline Coq originaire des Antilles françaises. Il suit une scolarité remarquable au Prytanée militaire de Paris. Adepte des sports de combat, des armes à feu et féru de football, Frédéric Bongo est un fervent supporter du Paris Saint Germain.

Un officier bien formé

Après le Prytanée militaire de la Flèche, il choisit naturellement la carrière militaire et intègre la prestigieuse Ecole Spéciale militaire de Saint Cyr-Coëtquidan au début des années 2000. Très bien noté, notamment dans le « pilier intégré » de la formation militaire (Brevet para, stage commando, Stage d’aguerrissement et formation sportive « crapahut ») il est diplômé six semestres plus tard.  Lieutenant à sa sortie de Saint-Cyr, Frédéric Bongo choisi la Gendarmerie Nationale Française et intègre l’École des Officiers de la Gendarmerie Nationale de Melun près de Paris. Mais son père Omar Bongo qui a d’autres projets pour lui et envoie son fils aîné et ministre de la défense Ali Bongo – qui assiste à la cérémonie de remise de diplôme de Frédéric – le chercher.

Un gendarme d’élite et brutal

Au Gabon, Frédéric Bongo est affecté au Camp Roux au siège la Direction Générale des Recherches (DGR) de la Gendarmerie gabonaise à Libreville à deux pas du « Palais Rénovation » la Présidence de la République du Gabon. La DGR est un service d’investigation et de renseignement dépendant directement du Président de la République du Gabon.

Officier compétent, il n’hésite pas à faire des interventions avec ses collègues ni à monter au feu lorsqu’ils doivent neutraliser des criminels armés. Un sous-officier de Gendarmerie ayant servi sous ses ordres raconte : « Le colonel est un homme courageux, il a plusieurs fois sauvé ses gars en intervention, il n’a vraiment pas peur. Quand il venait avec nous on était rassurés, il accroissait vraiment notre force de frappe et surtout notre puissance de feu ».

A la DGR, il s’adonne également aux « méthodes de la maison », c’est-à-dire à la torture dans le cadre notamment d’interrogatoires. Hervé Opiangah le décrit clairement comme quelqu’un d’inhumain et raconte que son épouse a été à plusieurs reprises interrogée à la DGR pendant plus de 10 heures et parfois avec un revolver sur la tempe !

A la cour de son père

Heureux de voir ce « bon fils » s’épanouir ainsi, Omar Bongo l’intègre dans son cercle de confiance en 2008. Il change de corps et rejoint la Garde Républicaine – véritable garde prétorienne du régime gabonais – et est nommé peu après, Directeur Général des Services Spéciaux (le service de renseignement de la Garde Républicaine, le plus puissant du Gabon, ndlr.). Très proche de son père, il veille sur lui, prend part aux voyages officiels, monte en grade et en puissance. Fils du « Roi du Gabon » Omar Bongo, Frédéric Bongo n’est certes pas le prince héritier du trône (Ali Bongo l’est officiellement depuis le « projet royal » de 1986), il est cependant un Prince puissant, un homme qui compte et sur qui il va falloir compter. Et en 2009, il va pouvoir le démontrer.