« Le président mauritanien Aziz a de la marge ». C’est le titre du dernier et excellent édito du journaliste Ahmed Ould Cheikhe, directeur du Calame, un site partenaire de « Mondafrique » en Mauritanie
Ould Abdel Aziz a été enfin investi le 2 août dernier. Au cours d’une cérémonie marquant le début de son deuxième – et dernier ?- mandat. Qu’on voulait grandiose, avec toutes les invitations lancées par-ci et par-là. Et qui n’a pas été, finalement, aussi importante qu’on le présageait. Seuls cinq chefs d’Etat africains (Sénégal, Gambie, Mali, Tchad et Guinée-Bissau) ont fait le déplacement de Nouakchott. Aucun président, roi ou émir arabe ne nous a honorés de sa présence. Aucune délégation européenne de haut niveau n’a foulé le sol de notre « belle » capitale. Même Nkosazana Dlamini-Zuma, la présidente de la Commission de l’Union africaine que dirige Ould Abdel Aziz s’est fait porter pâle. Seuls les africains proches et liés par de multiples intérêts avec nous ont tenu à partager notre éphémère joie. Désaveu de notre guide bien-aimé ?
Washington, une générosité suspecte
Qu’aucun dirigeant arabe n’ait fait le déplacement lui est certainement resté en travers de la gorge. Mais n’a pas tardé à passer, puisqu’à peine une journée après son investiture, il prenait les airs pour diriger, avec Barack Obama, la grande messe afro-américaine. L’Oncle Sam y a promis monts et merveilles à une Afrique de plus en plus sensible aux charmes des investisseurs chinois. Plus de trente milliards de dollars seront ainsi investis dans nos contrées, entre dons, prêts, subventions et financements. Les Etats-Unis ne font pas dans la demi-mesure, lorsqu’il s’agit de leurs intérêts. Et pas un mot sur les violations des droits de l’Homme, le tripatouillage des lois fondamentales que certains dirigeants africains s’apprêtent à commettre. On attendait, du gendarme du Monde, sinon mise en garde, du moins allusion, à ce déni de démocratie. Mais rien n’est venu assombrir l’entente de façade, clôturée par une séance-photo avec chaque couple présidentiel, à défaut d’entretien en tête-à-tête réclamé parles chefs d’Etat et qu’aucun n’a pu décrocher.
Henri Queuille, le retour
C’est donc la tête plein d’images et encore groggy par cet aller-retour éclair qu’Ould Abdel Aziz est rentré au pays. Où l’attendait les questions existentielles : faut-il ou non changer d’équipe gouvernementale ? Reconduire le Premier ministre ? Quels ministres ont-ils donné satisfaction ? Qui doit partir ? Quels nouveaux visages feront leur entrée ? Tout au long de la dernière campagne électorale, notre leader éclairé nous avait bassinés avec la nécessité de renouveler la classe politique. Le nouveau gouvernement sera un premier test à l’aune de laquelle on mesurera jusqu’où faut-il croire « ces fameuses promesses qui n’engagent que ceux qui y croient ». L’auteur de cette célèbre saillie parlait en connaissance de cause : vingt-et-une fois ministre, sous la 3ème et la 4ème République française, Henri Queuille était encore, quarante années après le début de sa carrière politique, l’homme politique le plus populaire de France. Aziz a de la marge.
Ahmed Ould Cheikhe, directeur du Calame