L’attaque du super camp de l’ONU à Tombouktou voici une semaine démontre que les djihadistes parviennent désormais à monter des opérations sophistiquées. Et cela malgré la présence militaire française depuis cinq ans!
Les djihadistes sont plus forts que jamais au Nord du Mali. Ils s’en sont pris, voici une semaine, au super camp de l’ONU à Tombouktou considéré comme un sanctuaire.. Le nombre d’hommes engagés dans cette opération du coté des terroristes était considérable, dont certains déguisés en casques bleus. Plus aguerris que jamais, les djihadistes sont parvenus à monter une opération de diversion par l’explosion de trois véhicules aux abords du camp avant d’investir les lieux pendant quatre longues heures.
Autant dire que jamais le rapport de forces n’a été aussi favorable aux djihadistes depuis 2013, date de la présence militaire française au Mali. Deux ans plus tard, ces attaques se sont étendues dans le centre et dans le sud du pays et le phénomène déborde sur les pays voisins, en particulier le Burkina Faso et le Niger.
Un bilan très lourd
Le bilan, extrêmement lourd, témoigne du choc de l’affrontement. Un casque bleu a été tué et une dizaine blessés. Sept militaires français ont été également blessés. Au moins quinze terroristes ont été mis « hors de combat ».
L’offensive qui ne peut qu’inquiéter les Maliens et leurs alliés français a donné lieu à un communiqué laconique de l’état-major. « Cette attaque visait à prendre le contrôle de ce camp et à occasionner le plus grand nombre de dégâts. Elle a compris notamment des tirs indirects, vraisemblablement de mortiers, et l’explosion de trois véhicules piégés dans le but de créer une brèche dans l’enceinte». Aucune voix politique ne s’est élevée pour tirer les conclusions de l’escalade à laquelle on assiste.
Un Etat Major sans états d’âme
Dans le livre d’auto satisfait qu’a commis en 2017 l’ancien chef d’Etat Major, le général Pierre de Villiers, ce haut gradé qui n’est pas forcément un grand visionnaire, écrivait: « L’opération Barkhane vise à la neutralisation progressive et permanente des groupes armés terroristes qui sèment la panique dans les populations sans défense »(1). La France, à l’en croire, est reconnue comme « pilote » en termes de défense de la bande sahélo-sahélienne par « la communauté internationale ».
Au point que le bon général explique benoitement que l’armée française se pique aussi de développement, en initiant « une dynamique de rapprochement » depuis juin 2016 avec l’Agence Française de Développement (AFD), le bras armé économique du Quai d’Orsay, qui serait désormais sous tutelle de nos glorieux militaires. Et cet ancien patron des armées de conclure: « Nos armées sont de plus en plus populaires. Elles incarnent une stabilité de valeurs et une institution qui force le respect ». Et de réclamer que l’on ne diminue pas « la voilure » des armées françaises, autrement dit qu’on ne rogne pas sur les budgets militaires.
Plus prosaïquement, l’armée française en cinq ans de présence au Mali, son principal théatre d’opération à l’extérieur, n’a pas empêché que le pays soit au bord du chaos sécuritaire. Une telle situation dont les militaires tricolores sont loin d’être les seuls responsables, mérite un peu de modestie.
(1) Pierre de Villiers,, « Servir », Edition Fayard, 2017