En novembre 2017, Robert Mugabe (93 ans), chef d’Etat de l’ancienne Rhodésie, devenue Zimbabwe, qui vient de disparaitre, avait été poussé vers la sortie
Robert Mugabe était le chef d’Etat el plus âgé de la planète. Depuis 1980, ce héros de l’indépendance avait mené son pays d’une main de fer. Il avait remporté sans coup férir chaque élection présidentielle, notamment contre son éternel challenger et son ancien premier ministre Morgan Tsvangirai, décédé voici un an.
Grace Mugabe, l’impossible Régente
Le cacochyme président était encore, au début 2017, pressenti par la Zanu-PF pour envisager une dernière candidature, en 2018. De plus en plus affaibli physiquement, le vieux lion s’était rendu compte que l’élection était devenue trop lointaine. Son épouse, l’intrigante et impétueuse Grace Mugabe, 41 ans plus jeune que lui, l’avait compris depuis longtemps.
Réputée pour son ambition démesurée et son goût du luxe qui lui avait valu le surnom de « Gucci », Grace Mugabe s’était fait remarquée par ses frasques dans des hôtels de luxe comme en Afrique du sud où une rixe avec un mannequin avait débouché sur une crise diplomatique entre les deux pays.
Ses deux fils n’étaient pas en reste dans la chronique des faits divers. Grace Mugabe n’a jamais fait pas partie du sérail zimbabwéen, aussi son ambition présidentielle constituait, pour beaucoup, une ultime et inacceptable provocation.Par ses intrigues et son comportement, elle aura gâché la sortie de Robert Mugabe.
L’impossible limogeage de Mnangagwa
Avec le soutien d’une partie de la jeunesse de la Zanu-PF, Grace Mugabe avait donc entrepris une double opération de candidature auprès de son mari et du parti. Ayant convaincu Robert Mugabe qu’elle pouvait lui succéder, il ne restait plus qu’à éliminer ses concurrents potentiels, comme le premier vice-président Emmerson Mnangagwa, un autre héros de l’indépendance nationale.
Le limogeage de ce fidèle compagnon de route de Robert Mugabe, le 6 novembre 2017, aura été la faute qu’il ne fallait pas commettre. Très apprécié des caciques de la Zanu-PF, des services de renseignement qu’il a dirigé et des chefs de l’armée qu’il a promu, le « crocodile », surnom donné à Mnangagwa pour son caractère impitoyable envers ses adversaires, ne pouvait supporter « le manque de loyauté » que Robert Mugabe et surtout son épouse lui reprochaient.
Annoncé en exil au Mozambique, Emmerson Mnangagwa a commencé à régler ses comptes avec Robert et Grace Mugabe. Les officiers généraux de l’armée, avec à leur tête le chef d’Etat-major le général Constantino Chiwenga, avaient organisé une démonstration de force pour éliminer » les criminels qui entourent le président Mugabe ».
Robert Mugabe et surtout son épouse ont été ainsi poussés vers la sortie
L’Afrique aux Africains
Le naufrage de Robert Mugabe devrait alerter plusieurs chefs d’Etat qui restent sourds et aveugles devant les exigences d’une jeunesse qui vit dans « le nouveau monde » et devient insensible aux discours démagogiques de ces dirigeants politiques qui ne gouvernent pas pour le bien-être de leur peuple. Porté, par ses pairs en 2015, à la présidence de l’Union africaine, Robert Mugabe était un peu considéré comme le « gardien du temple » ayant pour dogme » l’Afrique aux Africains ».
En dépit d’avoir ruiné son pays, d’avoir mis au chômage 90 % de la population active, d’avoir fait massacrer des dizaines de milliers de personnes, notamment dans le Matabeleland, d’avoir été contraint d’abandonner le dollar zimbabwéen pour le dollar américain, Robert Mugabe était encore considéré comme une icône d’une indépendance heureuse.
L’intouchable « vieux lion » apparaissait, dans certains cercles de pouvoir hors sol, comme le successeur lointain, à la fois, de Fidel Castro, pour son anti-impérialisme, de Nelson Mandela, pour son courage à libérer son peuple de l’apartheid, de Nkame Nkrumah pour son panafricanisme voire de Idi Amin Dada, pour son anti-colonialisme parfois caricatural.
Avec le décès de Robert Mugabe, c’est l’ancien monde africain qui disparait. Du oins, espérons le !