Un article publié par Jeune Afrique intitulé : « Patrice Motsepe, un président fantôme à la tête de la CAF », dénonce de multiples contrats publicitaires supposément passés grâce à des passes droits autorisés par l’homme d’affaires sudafricain et président du football africain depuis 2021.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Patrice Motsepe, le président de la Confédération Africaine de football (CAF) est-il directement impliqué dans les négociations des contrats publicitaires liant l’organisation qu’il dirige aux entreprises qui ont gagné les différents appels d’offres et qui sont condamnées à mots couverts par leurs concurrentes de l’avoir soudoyé ? Jeune Afrique n’assume pas clairement cette accusation. En revanche, il le laisse croire en pointant le contrat de diffusion de la CAN camerounais obtenu par le groupe togolais New World TV comme étant le prototype de contrats louches présentant le plus grand nombre de zone d’ombre.
D’ailleurs aux yeux de Jeune Afrique, le président exécutif d’African Rainbow Minerals a profité de sa position à la CAF pour se faire un maximum d’oseille grâce à la gestion du volet sponsoring. En 2023, sa société aurait ainsi enregistré 2,9 milliards de rands, soit 152 millions d’euros de revenus grâce auxdits partenariats et à diverses relations.
Les accusations de favoritisme
Au nombre des entreprises qui se plaignent du prétendu favoritisme du président de la CAN Patrice Motsepe, il y a l’Union camerounaise des brasseries (UCB), une société qui détient 15 % du marché de la bière et des boissons dans le pays. UCB est également fournisseur exclusif des boissons gazeuses et eaux minérales de la compétition au terme d’un contrat de 500 000 euros signé avec la famille Kadji, propriétaire de la brasserie. Mais le président de la CAF serait réputé proche des Kadji, d’où ces accusations sibyllines.
Son concurrent, le groupe SABC, filiale camerounaise de l’industriel français Castel, qui revendique une plus grande part de marché, 71 % pour la bière et 74 % pour les boissons gazeuses, dénonce les conditions non transparentes dans lesquelles ce contrat a été conclu. D’autant plus clairement que son offre déposée le 29 septembre 2021 aurait été ignorée, malgré de nombreuses relances. C’est plus tard que Javier Olea, le directeur marketing de la CAF aurait notifié à l’entreprise que sa proposition « n’est pas conforme aux exigences qui ont été communiquées » par la CAF.
Les statuts de la FIFA
Patrice Motsepe est également accusé d’avoir fait du favoritisme sur le dossier Canal+ qu’il aurait tenté de remettre en selle en facilitant les négociations pour le rachat du géant sud-africain de la télévision, MultiChoice, par la filiale de Vivendi. Puis, à travers son intervention pour combler le gap de la réglementation sud-africaine qui stipule qu’un étranger ne peut posséder plus de 40 % des parts d’un média local.
« Il n’y a pas une opération audiovisuelle en Afrique où il n’a pas son mot à dire », dénonce une source interne au groupe français interrogée par Jeune Afrique. Mais l’accusation est démentie fermement par la Confédération qui estime que les relations commerciales et philanthropiques que son président entretient sont « conformes aux statuts de la CAF et de la Fifa ».
Selon le journal, les accointances entre le groupe français et la CAF ne dateraient pas d’hier mais en plutôt de mars 2022 lorsque la chaîne, créée en 2015, décroche la diffusion en Afrique francophone de la Coupe du monde au Qatar pour environ 15 millions d’euros. Deux ans plus tard, elle se voit attribuer des droits de diffusion des compétitions et évènements de la CAF, en anglais et en langues locales, en clair et à péage, pour l’Afrique subsaharienne. Un contrat à 70 millions d’euros scelle alors le contrat négocié par Paul Calder, un ancien de la Fifa, et Luxolo September, chef de la division média de la CAF, explique Jeune Afrique.
Le journal reproche à la Confédération d’avoir usé de moyens similaires pour que le groupe togolais New World TV qui affrontait sur ce dossier le mastodonte Canal+ arrache les droits télé. Celui-ci aurait bénéficié du coup de main du plus grand assureur du continent, le holding sud-africain Sanlam, détenu à 5,5 % par Patrice Motsepe, le président de la CAF. Sanlam se serait ensuite portée garant auprès du bailleur de fonds Coris Bank pour que NWT remporte l’appel d’offres de la CAF.
Ce manège aurait laissé les milieux d’affaires songeurs, explique Jeune Afrique qui n’a cependant pu glaner la moindre information reliant NWT ou ses actionnaires, y compris son financement, à la Confédération ou à Patrice Motsepe sur cette autre question.