Syrie - Mondafrique https://mondafrique.com/tag/syrie/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Sat, 28 Jun 2025 21:38:26 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg Syrie - Mondafrique https://mondafrique.com/tag/syrie/ 32 32 L’attentat de Daech à Damas sert des intérêts qui restent obscurs https://mondafrique.com/moyen-orient/lattentat-de-daech-a-damas-sert-des-interets-qui-restent-obscurs/ Sat, 28 Jun 2025 21:37:08 +0000 https://mondafrique.com/?p=136286 Le terrible attentat perpétré, le 22 juin à Damas, par deux kamikazes dans l’église grecque orthodoxe de Mar Elias a exacerbé le climat de terreur qui règne au sein de la communauté chrétienne syrienne. Cet acte terroristee, qui a coûté la vie à au moins 25 personnes, a remis sur le devant de la scène […]

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Le terrible attentat perpétré, le 22 juin à Damas, par deux kamikazes dans l’église grecque orthodoxe de Mar Elias a exacerbé le climat de terreur qui règne au sein de la communauté chrétienne syrienne. Cet acte terroristee, qui a coûté la vie à au moins 25 personnes, a remis sur le devant de la scène la vieille menace que constitue Daech qui a été souvent instrumentalisé pour servir les intérèts troubles des grandes forces géo-politiques de la région.

Badih Karhani 

Bien que le groupe terroriste ait semblé affaibli ces dernières années, une nouvelle structure jihadiste, « Saraya Ansar al-Sunna », a revendiqué l’attaque, promettant de poursuivre les minorités alaouite, chiite et druze, ainsi que les partisans du régime syrien. Mais derrière ce nom, se cache une réalité plus complexe.

Un nom aux résonances suspectes

Le nom « Ansar al-Sunna » n’est pas anodin. Historiquement associé à la mouvance jihadiste sunnite, il aurait eu plus de sens durant les années les plus intenses du conflit syrien, où des groupes comme Jabhat al-Nosra dominaient certaines régions. Mais aujourd’hui, alors que le pouvoir syrien est majoritairement sunnite et soutenu localement et internationalement, le recours à cette rhétorique semble déplacé – voire artificiel.

Certains analystes n’hésitent pas à voir dans cette appellation l’empreinte d’un discours fabriqué à l’extérieur du contexte syrien, avec des accents libanais bien marqués.

Daech, des connexions troubles

L’histoire de Daech, depuis sa genèse sous Abou Moussab al-Zarqaoui jusqu’à son expansion en Syrie et en Irak, montre des connexions ambigües entre le groupe et des services de renseignement régionaux. À l’époque de sa formation, le groupe comptait dans ses rangs de nombreux anciens officiers baathistes, notamment irakiens, qui ont structuré l’organisation comme une entité militaire et sécuritaire efficace.

Des documents et témoignages crédibles suggèrent que certaines antennes médiatiques de Daech émettaient depuis la Syrie, sous protection des services syriens. Une réalité qui jette une ombre sur les prétentions d’indépendance idéologique du groupe.

Chaque fois que le régime syrien d’Assad ou son allié iranien traversaient une période de tension, Daech semblait réapparaître opportunément, comme pour détourner l’attention ou créer une nouvelle donne sécuritaire. Ce n’est pas un hasard si plusieurs experts comparent le groupe à une entreprise à actionnariat multiple, où chacun tire profit à sa manière du chaos généré.

L’attaque de Damas survient dans un contexte régional chargé, entre pressions économiques sur l’Iran, incertitudes au Liban, et équilibres fragiles en Irak. Le retour de Daech pourrait donc servir plusieurs agendas, bien au-delà des slogans religieux.

Vigilance et lucidité

Il ne faut pas sous-estimer la capacité de nuisance de Daech, mais il est tout aussi important de comprendre qui tire profit de sa réactivation. La lutte contre le terrorisme passe aussi par la mise à nu de ses manipulateurs, et par une lecture lucide des dynamiques régionales qui transforment les groupes jihadistes en outils au service de puissances bien réelles.
 
 

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Syrie, d’une économie de guerre à la construction d’un proto État https://mondafrique.com/moyen-orient/la-syrie-passe-dune-economie-de-guerre-a-la-construction-dun-etat/ Tue, 29 Apr 2025 17:36:51 +0000 https://mondafrique.com/?p=132592 Après sa prise de contrôle de la majeure partie de la région d’Idlib, Hay’at Tahrir al-Sham (HTS), le mouvement qui a renversé le clan Assad et imposé son leader Abou Mohammad al-Joulani à la tète de l’2tat syrien, est passé d’un simple groupe islamiste à un véritable appareil étatique en charge de plusieurs millions de […]

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Après sa prise de contrôle de la majeure partie de la région d’Idlib, Hay’at Tahrir al-Sham (HTS), le mouvement qui a renversé le clan Assad et imposé son leader Abou Mohammad al-Joulani à la tète de l’2tat syrien, est passé d’un simple groupe islamiste à un véritable appareil étatique en charge de plusieurs millions de citoyens. Il a donc dû remettre sur pied une économie détruite par des années de guerre tout en changeant les modes de ressources de son financement interne.

Marie de La Roche Saint-André

En effet, après la dissociation avec Al-Qaïda de Jabhat al-Nosra et la fondation de HTS, le groupe ne pouvait plus compter sur ses anciens donateurs. D’autant que la stratégie de réhabilitation de HTS au niveau international par son leader Abou Mohammad al-Joulani, passait également par la mise en place de modes plus traditionnels de financement.

Des butins de guerre à la zakat

Dès le début de sa formation, HTS est largement autofinancé et va utiliser des méthodes proches du jihadisme traditionnel pour trouver des fonds (enlèvements, rançons, contrebande). En 2018, selon un rapport du Middle East Institute daté de 2021, il aurait gagné 149 millions de dollars grâce à des butins de guerre pris au régime syrien et à d’autres factions de l’opposition.

Le groupe aurait également touché au moins 94 millions de dollars grâce à des accords d’échange de prisonniers avec le régime d’une part, mais également avec des pays étrangers comme l’Iran et le Liban. En plus de ces accords, HTS va monnayer le retour de corps de combattants tués au combat à l’Iran et au Hezbollah.

En 2013, Jabhat al-Nosra était connu pour ses pillages de sites historiques et la contrebande d’objets archéologiques. Il est possible que HTS ait gardé ces pratiques au début de la formation du groupe. Selon la National Public Radio, il bénéficierait également de dons de Syriens fortunés, basés à l’étranger, qui s’opposent depuis longtemps à Bachar el-Assad.

Avec la mise en place du Gouvernement de salut syrien (GSS) dans le nord-ouest du pays, HTS va développer des ressources financières plus traditionnelles. Selon le spécialiste de HTS Aaron Y. Zelin, le GSS va mettre en place une véritable bureaucratie, en délivrant des services comme le recensement et la délivrance de papiers d’identité, en plus de l’eau et l’électricité. En échange, il va mettre en place des impôts et notamment la “zakat”, un impôt spécifique sur les productions.

La zakat (aumône) est imposée aux agriculteurs et aux chefs d’entreprises comme les commerçants, son montant varie selon les productions. D’abord collectée par la police religieuse, la zakat va ensuite être gérée par le département de la Zakat au sein du GSS.

À titre d’exemple, selon le rapport du Middle East Institute, en août 2019 un décret a été émis ordonnant aux agriculteurs de payer 5% de la valeur totale de leur récolte en tant qu’impôt, sous peine d’emprisonnement. Puis en novembre de la même année, un décret a ordonné aux producteurs d’olives de payer soit 10% de leur récolte, soit 10% de l’huile d’olive qu’ils produisent.

En plus des impôts de production, HTS va mettre en place des loyers pour les personnes déplacées qui sont installées sur des terrains publics. En septembre 2020, le loyer annuel d’une tente était de 50 livres turques. Le GSS va en outre interdire aux citoyens d’acheter ou de vendre des terres ou des biens appartenant à l’État.

Entre fin 2018 et fin 2019 selon un rapport du Washington Institute daté de 2020, HTS va saisir des maisons et des biens de ceux qu’il qualifie “d’apostats et de chabihas”, des termes vagues qui englobent les minorités religieuses qui ont fui la région, mais également toute personne ayant des liens avec le régime. À titre d’exemple, au moins 550 maisons et magasins appartenant à des chrétiens dans la ville d’Idlib ont été saisis.

Des villages chiites comme Al-Fua et Kafarya ont également fait les frais de cette politique. En outre, plusieurs centaines de propriétés de recrues de l’armée syrienne, d’employés du gouvernement syrien et de membres du parti Baas vont être saisies. Grâce à ce système, HTS va pouvoir récompenser ses membres en leur attribuant une maison ou un terrain.

La prise du poste frontière de Bab el-Hawa en juillet 2017 va constituer un tournant dans les finances du groupe. En effet, il va hautement bénéficier de l’instauration de droits de douanes pour les biens et marchandises, à la fois pour les livraisons d’aides et pour le commerce. HTS toucherait entre 3 et 7 dollars par tonne de marchandise selon les experts, ce qui aboutirait selon les estimations à entre 10 et 15 millions de dollars par mois. Des taxes sont également prélevées à chaque checkpoint de la région.

Ces revenus vont permettre au groupe de payer le salaire de ses combattants et d’acquérir des armes, tout en économisant pour les batailles futures.

Revitaliser l’économie d’Idlib

Avec la mise en place du GSS, l’économie à Idlib va redémarrer peu à peu, grâce à une série de mesures. À partir de juin 2020, la livre syrienne est remplacée par la livre turque afin de lutter contre la forte dépréciation de la monnaie syrienne.

À la même période, l’agence monétaire du groupe décide d’interdire l’achat de livres syriennes et les transferts d’argent liquide vers et depuis les zones du régime. Ils vont en outre délivrer des licences pour les bureaux de change et de transfert d’argent afin de s’assurer que leurs directives sont appliquées.j“L’économie à Idlib était meilleure que dans les zones du régime, qui avaient les effets combinés des sanctions et de la corruption”, affirme à Ici Beyrouth Thomas Pierret, chercheur au CNRS et spécialiste de Syrie, ajoutant que “à ldlib, l’économie n’était pas sous sanctions et a tiré avantage de la proximité avec la Turquie. La Turquie a apporté une aide au niveau des infrastructures comme pour l’électricité et Internet”.

Même constat pour le spécialiste de HTS Aymenn Jawad al-Tamimi, qui explique que “près du poste-frontière de Bab el-Hawa, vous trouverez de nombreux concessionnaires automobiles et autres commerces, et des projets d’expansion avec une zone industrielle sont en cours. De même, la ville de Sarmada, au nord d’Idlib, est réputée pour être un lieu de shopping agréable dans les quartiers d’Alep anciennement sous contrôle du régime”.

Cependant, ils soulignent également la présence de nombreuses personnes dans les camps de réfugiés qui étaient largement tributaires de l’aide internationale. De son côté, un expert syrien de HTS qui a requis l’anonymat estime que “les dernières années, HTS a construit des centres commerciaux à Idlib, décoré certaines rues et aménagé quelques carrefours, pour donner une impression de prospérité, mais seule une minorité d’habitants y avait accès”.

“Le reste de la population vivait dans la misère, que ce soit dans les camps – qui abritaient plus d’1 million de personnes – ou ailleurs. La plupart des gens vivaient sous le seuil de pauvreté, les opportunités de travail étaient rares, les salaires étaient bas et les loyers élevés”, ajoute-t-il.

Une économie monopolisée

Selon le rapport du Middle East Institute, à la tête de la stratégie économique de HTS se trouve Moustafa Qadid, le cerveau qui va assurer la mainmise du groupe sur l’économie de la région d’Idlib. Nommé à la tête du département économique de HTS, une agence indépendante du GSS, il va mettre en ordre le secteur d’échange et de transfert d’argent en créant la société Al-Waseet, qui va taxer tous les magasins du secteur.

Il a également la charge de l’Agence monétaire générale pour la gestion de la trésorerie et la protection des consommateurs créée en 2017 qui délivre les licences pour les bureaux de change. Selon le Middle East Institute, le capital d’Al-Waseet aurait dépassé les 30 millions de dollars, avant d’être transformé en Sham Bank en 2018.

Après l’opération Rameau d’olivier en 2018, où l’armée turque prend le contrôle de la région d’Afrin, Qadid va créer la société Watad Petroleum, une société en charge du commerce des dérivés du pétrole dans la région suite à l’interruption des livraisons du pétrole des FDS. La société obtient des droits exclusifs pour importer des dérivés du pétrole et du gaz de Turquie.

Partenaire du GSS, Watad Petroleum va avoir la charge de réguler les prix concernant la distribution de gaz et de pétrole dans la région d’Idlib. En juin 2019, son bénéfice mensuel était de 1,67 million de dollars américains.

Le monopole de Watad Petroleum va susciter de nombreux mécontentements à Idlib, tant en termes de fermetures de commerces que de prix du pétrole. Pour calmer les choses, deux autres sociétés vont être créées dans la région en décembre 2020 (Kaf Company et Al-Shahba). Si cela casse le monopole de Watad, beaucoup d’habitants d’Idlib estiment qu’elles appartiennent également à Qatani.

À partir de 2020, HTS va également mettre en place SYR Connect, un nouveau monopole sur Internet. L’entreprise devient alors l’unique fournisseur et distributeur des services Internet dans le nord-ouest syrien.

L’accumulation des taxes et la présence de monopoles ont suscité le mécontentement d’une partie de la population. Certains estimaient, en effet, que les taxes étaient une forme d’extorsion qui n’avait pas pour objectif d’améliorer les conditions de vie.

Cependant, la proximité de la Turquie et l’absence de sanctions internationales ont permis à la région de bénéficier de meilleurs services que les régions voisines, même si elle restait malgré tout dans une économie de pays en guerre.

 

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La difficile réhabilitation internationale du président Assad https://mondafrique.com/decryptage/notre-serie-sur-la-syrie-2-la-tentative-de-rehabilitation-du-president-assad/ Fri, 05 Jul 2024 16:22:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=97170 L’accueil très chaleureux qu’ont réservé les Chinois au Président Assad, qui est venu durant l’été 2023avec son épouse, participer à l’ouverture des jeux asiatiques, montre à quel point le régime syrien,  dont l’image était totalement dégradée en raison d’une répression sanglante contre son peuple, est en train de sortir de son isolement international. Outre Pékin […]

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L’accueil très chaleureux qu’ont réservé les Chinois au Président Assad, qui est venu durant l’été 2023avec son épouse, participer à l’ouverture des jeux asiatiques, montre à quel point le régime syrien,  dont l’image était totalement dégradée en raison d’une répression sanglante contre son peuple, est en train de sortir de son isolement international. Outre Pékin qui voit dans le régime syrien un pion utile dans sa stratégie moyen-orientale, des puissances régionales comme la Turquie et l’Arabie Séoudite, adversaires traditionnels de la Syrie, tentent de trouver une normalisation de leurs relations avec Damas. Ce processus n’est pas gagné d’avance! 

À l’occasion de sa première visite en près de vingt ans dans l’Empire du milieu, le président syrien, Bachar al-Assad, a rencontré son homologue chinois, Xi Jinping. Ce dernier a annoncé, vendredi, un « partenariat stratégique » entre les deux pays.

Dès le début de la guerre en Syrie, Ankara avait pris fait et cause pour la rébellion sunnite syrienne. La Turquie a ainsi accueilli les cadres de l’Armée syrienne libre (ASL) et de l’opposition civile. Ce qui avait naturellement provoqué l’hostilité de Damas. Depuis, le président Erdogan a pris ses distances avec les forces djihadistes. Dans un deuxième temps, l’irrédentisme kurde qui avait transformé le Nord de la Syrie en base arrière avait amené l’armée turque  lancer quatre opérations militaires dans le nord de la Syrie entre 2016 et 2020. Autant de positions du Président Ankara qui expliquent les très mauvaises relations qu’entretenaient les deux pays. 

La main tendue d’Erdogan

Aujourd’hui, la volonté d’Ankara de renouer avec Damas par l’intermédiaire de Moscou, bute sur le refus de Bashar al Assad d’accepter l’occupation d’une partie de son territoire par la Turquie. Par l’intermédiaire d’une milice djihadiste appelée « Armée nationale syrienne » (ANS), composée d’anciens de l’Etat islamique et de volontaires syriens, la Turquie a organisé une zone tampon entre les Kurdes du Rojava syrien et les Kurdes de Turquie. Elle ne dédaigne pas de compléter cette occupation du territoire syrien par des bombardements aériens quand le besoin s’en fait sentir.

Le 9 aout 2023, Bashar al Assad a refusé toute rencontre avec le président turc Tayyip Erdogan tant que les troupes d’Ankara occuperaient le nord-ouest de la Syrie. « Notre objectif est le retrait (de la Turquie) du territoire syrien, tandis que l’objectif d’Erdogan est de légitimer la présence de l’occupation turque en Syrie », a déclaré Assad à l’agence Reuters. « Par conséquent, la réunion ne peut pas avoir lieu dans les conditions d’Erdogan. » « Pourquoi Erdogan et moi nous rencontrerions-nous ? Pour boire un coup ? »

En juillet, Erdogan avait déclaré qu’il était prêt à rencontrer Assad mais pas à changer de politique. « La porte est ouverte … Assad veut que la Turquie quitte le nord de la Syrie. C’est hors de question. Nous combattons le terrorisme là-bas », a riposté le président turc. Le président syrien a clairement indiqué qu’aucune réunion n’aurait lieu dans les circonstances actuelles. « Aucune condition préalable signifie une réunion sans ordre du jour, a-t-il déclaré. Aucun ordre du jour signifie aucune préparation ; pas de préparation signifie aucun résultat, alors pourquoi Erdogan et moi nous rencontrerions-nous ? »

Après les propos de Bachar al-Assad sur un retrait impératif des forces turques pour initier une normalisation des relations bilatérales, le ministre turc de la Défense Yasar Guler a rejeté la demande syrienne.  « La Turquie veut sincèrement la paix mais nous avons aussi des sensibilités. Il est impensable pour nous de nous retirer sans assurer la sécurité de nos frontières et de notre peuple», a-t-il déclaré à la télévision nationale le 13 août.Outre l’occupation du nord de la Syrie, la Turquie a un autre sujet de discussion avec Assad : les réfugiés.  La Turquie accueille environ 3,6 millions de réfugiés syriens, ce qui déclenche des attitudes xénophobes au sein de la population turque. 

Le prince héritier Mohammed ben Salmane accueille Bachar al-Assad pour son retour au sein de la Ligue arabe. Mais il attend des contreparties de la part de la Syrie. Jeddah, 19 mai 2023.

MBS à la manoeuvre

Après avoir dépensé des dizaines de millions de dollars à soutenir des milices arabes sunnistes– et le plus souvent djihadistes – en Syrie contre l’Iran et le Hezbollah, l’Arabie saoudite a souhaité au printemps derneir que Damas réintègre la Ligue arabe. Son objectif reste de convaincre le président Assad de s’éloigner de ses alliés iraniens. L’Arabie Saoudite est consciente de la supériorité militaire de l’Iran qui est de plus associé en Syrie à la Russie. Elle sait aussi que la présence de l’Iran en Syrie fait obstacle à son grand projet d’union régionale arabe auquel Israel serait associé.

N’ayant pas les moyens d’éjecter les Iraniens par la force, l’Arabie tente de convaincre Assad de le faire à sa place. En d’autres termes, elle a entrepris de convaincre Assad que certes l’Iran et la Russie ont sauvé la mise de son régime, certes encore l’Iran et la Russie ont financé l’administration syrienne et son armée, et surtout, l’Iran et la Russie ont aidé la famille Assad a retrouver le contrôle de 90% de son territoire. Mais pour les Saoudiens, tout cela appartient au passé : l’avenir, la paix, la prospérité sont du côté arabe. Une chose est sure en effet, ni l’Iran ni la Russie ne dépenseront un dollar pour reconstruire le pays et lui donner un avenir. Les Etats pétroliers du Golfe en revanche… ont les moyens d’investir dans l’économie syrienne.

Mohamed Ben Salmane, prince régnant d’Arabie a donc commencé un travail de longue haleine qui consiste à convaincre le despote syrien qu’il doit redessiner ses priorités diplomatiques. Les deux parties vont devoir démontrer leur volonté réciproque de surmonter les obstacles nombreux sur ce processus de normalisation, notamment au Liban, terre d’influence pour les deux pays. Les choix MBS et Assad sont très éloignés sur le candidat idéal pour l’actuelle élection présidentielle qui se joue au pays du Cèdre depuis presque un an.

Sleimane Frangié, ami d’enfance du Président Assad, est soutenu par le Hezbollah et n’est pas franchement le candidat favori des Séoudiens pur la Présidentielle.libanaise

 

Le Liban, pierre d’achoppement 

Pour l’Arabie Saoudite, le régime syrien devrait tout d’abord donner un gage de bonne volonté en respectant la décision du Tribunal international sur l’assassinat de Rafic Hariri. Le 18 août 2020, le Tribunal Spécial pour le Liban a rendu son verdict dans le procès des auteurs présumés de l’attaque à la voiture piégée qui a visé, le 14 février 2005, le convoi de l’ancien premier ministre Rafic Hariri, provoquant sa mort et celle de 21 autres personnes. Dans leur jugement (que beaucoup de commentateurs à l’époque ont jugé timoré), les juges de la chambre de première instance ont reconnu à l’unanimité la culpabilité de Salim Ayyash, membre du Hezbollah. Ils ont acquitté trois autres membres de l’organisation chiite, et ont indiqué n’avoir aucune preuve de l’implication du leadership du Hezbollah ou du régime syrien dans cette attaque et n’avoir pas non plus de preuve suffisante de l’implication de l’ancien accusé, Mustapha Badreddine, haut responsable du Hezbollah tué en Syrie en 2016.   

Un engagement de la Syrie contre Salim Ayyash serait pour l’Arabie Saoudite un premier geste qui serait apprécié à sa juste valeur.

L’Arabie saoudite et la Syrie doivent aussi se donner les moyens d’agir ensemble pour contrôler la situation intérieure dans les arènes libanaise et irakienne, de résoudre les crises et de désamorcer les conflits. Cela conduira les deux parties à redéfinir leurs politiques régionales conformément aux intérêts arabes. 

Ce calibrage ne sera pas une tâche facile au cours de l’étape à venir et nécessitera du temps et de la confiance entre les deux parties pour poursuivre le dialogue et échanger des informations sur des questions coopératives et litigieuses. 

La vraie difficulté de ce processus est bien entendu militaire. La Syrie a certes récupéré 90% de son territoire, mais des pans entiers de ces 90% sont sous le contrôle russe ou iranien. La Russie contrôle elle-même directement des pans entiers de ce que l’on appelle la « Syrie utile ». Ces zones ont une grande valeur stratégique non seulement en raison de leur situation sur la bande côtière et le long des régions frontalières, mais aussi en raison de leur abondance de ressources telles que le phosphate et le gaz. Ces zones sous contrôle russe comprennent des quartiers de Damas et de sa campagne, mais aussi des villes comme Homs, Lattaquié et Tartous. 

Il existait depuis longtemps un désaccord russo-iranien sur les zones d’influence en Syrie qui est passé au second plan quand les Russes et les Iraniens ont commencé à coopérer dans la guerre russo-ukrainienne. Certaines zones du nord de la Syrie sont sous contrôle turc tandis que d’autres restent sous le contrôle du régime syrien. En outre, certaines parties d’Idlib continuent d’être contrôlées par l’opposition syrienne.

Joe Biden fait de la résistance

Les sanctions américianes représentent l’obstacle le plus sérieux à l’avancement des relations saoudo-syriennes, en particulier dans les domaines économique et commercial. Washington s’oppose fermement à la normalisation des relations avec le régime syrien et le justifie en pointant l’absence d’avancées réelles et durables vers une solution politique conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité, un projet de résolution américain adopté en décembre 2015. La résolution prévoit d’autoriser l’aide humanitaire à atteindre les zones assiégées, la mise en place d’un gouvernement de transition et la tenue d’élections libres sous la supervision de l’ONU. 

Washington justifie également sa position de rejet sur la normalisation avec Damas qui n’a pas répondu aux appels internationaux pour libérer les prisonniers politiques, permettre le retour en toute sécurité des réfugiés, poursuivre les auteurs de crimes de guerre en Syrie et traduire les responsables en justice.

Washington a imposé des sanctions à la Syrie en vertu du Caesar Act, que l’ancien président américain Donald Trump a promulgué le 20 décembre 2020, pour cinq ans après la date de promulgation. Il prévoit l’imposition de sanctions à tout gouvernement, entreprise ou individu qui traite directement ou indirectement avec le régime syrien. La loi permet également aux États-Unis d’imposer des sanctions à tout gouvernement, entreprise ou individu qui traite avec le régime syrien dans quatre secteurs vitaux : l’énergie, l’aviation, la finance, la banque, la construction et l’ingénierie.

Ce qui rend la coopération saoudienne avec la Syrie sur des projets de reconstruction très acrobatique.

La Syrie, un pays en ruines

 

 

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Quatre décennies d’exportation de la Révolution islamique https://mondafrique.com/a-la-une/quatre-decennies-dexportation-de-la-revolution-islamique-volet-1/ Thu, 07 Mar 2024 04:45:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=106298 Les roquettes du Hezbollah sur le nord d’Israël, le harcèlement des Houthis contre les bateaux en mer Rouge, le soutien logistique au Hamas de Gaza, les attaques contre les bases américaines: derrière toutes ces actions, les États dénoncent la main de Téhéran. De fait, depuis 45 ans, la République islamique d’Iran n’a cessé d’étendre son […]

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Les roquettes du Hezbollah sur le nord d’Israël, le harcèlement des Houthis contre les bateaux en mer Rouge, le soutien logistique au Hamas de Gaza, les attaques contre les bases américaines: derrière toutes ces actions, les États dénoncent la main de Téhéran. De fait, depuis 45 ans, la République islamique d’Iran n’a cessé d’étendre son influence dans la région.

Une enquête de nos partenaires du site « Ici Beyrouth »

Le point de départ est une révolution religieuse sans précédent, portée par l’ayatollah Khomeini en 1979. Auréolé par la mystique des chiites duodécimains, Khomeini a imposé la suprématie du Guide religieux et défini comme objectifs fondamentaux de l’État clérical « lexpansion de la souveraineté divine dans le monde, la défense des opprimés et l’unité du monde islamique ». « La révolution en Iran n’avait pas pour but le renversement du régime monarchique, mais bien de poser les fondements d’une république d’inspiration divine ».

Dans un discours prononcé peu après son retour triomphal à Téhéran le 1ᵉʳ février 1979, l’ayatollah Rouhollah Khomeini ne cache pas ses intentions. Il est bien déterminé à transformer l’Iran en République islamique, projet qu’il a mûri pendant ses quinze années d’exil. Il sera concrétisé deux mois plus tard, après que ses séides auront fait main basse sur le pays et réduit au silence tous les opposants à la théocratie en marche.

Le visage sombre et la voix sourde, le religieux de 77 ans est tout le contraire d’un tribun fougueux. Seul son regard, dur et impitoyable, trahit un feu intérieur, une implacable volonté de revanche. Pour s’être opposé au Shah depuis les années 60, il jouit d’un immense prestige auprès du bas-clergé et des classes populaires pieuses. Il est arrivé appuyé par un groupe d’intellectuels religieux qui ont préparé son avènement et qui vont l’aider à réaliser sa stratégie de conquête.

Déjà, deux mois avant son retour, des milliers d’Iraniens, criant Allah Akbar! de maison en maison, affirmaient avoir vu le visage de l’ayatollah apparaître sur la lune! Par une habile récupération de cette fable, les mollahs avaient célébré l’événement dans les mosquées, clamant dans une formule hardie que « lorsque le soleil se lèverait à l’ouest, le Mahdi reviendrait »(sic). Or, Khomeini, dont le visage se reflétait sur la lune comme le soleil, se trouvait à l’ouest, en France, à Neauphle-le-Château…

Sans doute faut-il chercher dans l’inconscient collectif des Persans la source de cette vénération mystique. La figure de Khomeini fait écho au mythe duodécimain de l’imam caché. Le chiisme duodécimain, ou imamat, dont les Iraniens sont les adeptes les plus nombreux, est né du conflit qui opposa entre eux les successeurs du prophète Mohammed. Les chiites reconnaissent Ali, le gendre de Mohammad, et ses onze descendants comme les seuls véritables guides spirituels des musulmans. Le douzième imam, Mohammad, mystérieusement disparu aux yeux des vivants à l’âge de 5 ans, est considéré comme le Mahdi, le seigneur du temps, le sauveur qui réapparaîtra à la fin de sa grande occultation pour apporter la révélation du vrai Coran, le gouvernement parfait et la justice universelle.

S’il n’est pas le Mahdi, Khomeini en est le puissant vicaire. Dès son retour, il est paré du titre d’imam et d’une impressionnante collection d’épithètes: « Le Guide suprême des musulmans », « le régent de l’imam caché », « le glorieux défenseur de la foi », « le vengeur », « le briseur d’idoles », « celui qui écrase Satan », « le seul espoir des opprimés ».

« Culte du martyre »

Aux yeux de ses adeptes, la gloire de Khomeini tient aussi à ses longues années d’exil qui ont fait de lui « un persécuté », « un martyr ». Son image se confond alors avec celle du prince des martyrs, Hussein, le troisième imam tué et décapité par ses opposants à la bataille de Kerbala, en 680, événement qui fut à l’origine de la scission entre chiites et sunnites. Les descendants d’Ali ayant tous connu une fin tragique, le culte du martyre est profondément ancré dans la pensée religieuse chiite. L’un des théoriciens de la République islamique et proche conseiller de Khomeini, Morteza Motahari, prônait que « l’islam n’est pas le christianisme, c’est la religion de l’agitation, de la révolution, du sang et du martyre ».

Le symbole le plus éloquent de cette mystique chiite du martyre se trouve au grand cimetière sud de Téhéran. Une fontaine de 5 mètres de haut d’où s’écoule un liquide rouge sang, devant laquelle les pèlerins sont invités à se recueillir. Selon Khomeini, ce monument exprime « l’essence même du message de l’islam ».

Mais le principe du martyre atteindra des sommets lors de la guerre avec l’Irak, de 1980 à 1988. Le Parti d’Allah mobilisera alors des milliers d’adolescents sur le front, avec ce slogan cynique: « Offrez un de vos enfants à l’imam! ». Appel auquel répondront plus d’un million de familles fanatisées. Les enfants à qui on remettra une kalachnikov et une clé du Paradis en plastique à porter autour du cou prêteront serment: « … Au nom d’Allah le vengeur, je jure sur le Livre saint de remplir mon devoir sacré d’enfant de l’imam et de soldat de l’islam dans notre guerre sainte pour rendre à ce monde la lumière de la justice divine ».

Un certain nombre de ces enfants, ceints du bandeau rouge de candidat au martyre, seront envoyés se faire sauter sur les champs de mines pour faciliter la progression des troupes.

Lorsqu’il aura assis son pouvoir, le « glorieux défenseur de la foi » n’apparaîtra plus que juché sur un balcon, enveloppé d’un astucieux jeu de lumière qui lui confère une apparence sacrée. On accourra de tous les coins du monde islamique pour apercevoir le saint homme dans son sanctuaire de Niavaran et écouter sa parole miraculeuse. Pour les fidèles assis sur le sol en contrebas, il est bien le représentant de Dieu, l’infaillible porteur d’un message messianique à l’adresse du monde musulman dans son ensemble. N’a-t-il pas déclaré que le 1ᵉʳ avril 1979, date de la création officielle de la République islamique, est « l’aube du premier jour du gouvernement d’Allah qui aura vu l’effondrement du faux dieu et de la domination satanique, et leur substitution par le gouvernement des déshérités »?

« Un roi philosophe »

Pour ceux qu’intéressent les leçons de l’Histoire (dont jamais personne ne tire profit!), il est bon de rappeler que, dans les premiers temps de la révolution, rares sont ceux, hors de l’Iran, qui perçoivent le dessein universaliste de Khomeini. Frappés de myopie, comme souvent lorsqu’il s’agit de l’Orient compliqué, quelques intellectuels européens ayant pignon sur rue, en particulier Jean-Paul Sartre et Michel Foucault, ne cachent pas leur sympathie pour la révolution religieuse dans laquelle ils voient une « explosion spontanée d’énergie spirituelle », « un retour de la foi dans la vie politique ». Depuis longtemps, ils ont fait du régime autocratique du Shah, certes non exempt de défauts et d’erreurs, leur cible privilégiée, et le fait que l’ayatollah soit parvenu à abattre la dictature des Pahlavi assujettie aux Américains suffit à leur bonheur. Fascinés par le vieil homme qui prêche d’une voix tranquille, tête baissée, sous son pommier de Neauphle-le-Château, certains n’hésitent pas alors à le décrire comme un « saint du XXe siècle », comme « le Ghandi de l’islam »! Jusqu’à la CIA qui, dans un rapport cité par Time Magazine, le 10 février 79, signale que « Khomeini est une sorte de roi philosophe, un moraliste idéaliste dans la tradition platonicienne, qui entend mettre fin à la corruption, puis se retirer dans son école de la ville sainte de Qom ». Mieux: lorsque les officiers supérieurs de l’armée impériale, fidèles au Shah, ont voulu s’opposer à la prise du pouvoir par Khomeini, le général américain Huyser est venu négocier en secret leur neutralité, au prétexte « qu’un régime islamique en Iran serait le meilleur rempart contre l’influence soviétique dans la région ». Une erreur majeure que les Américains reproduiront en Afghanistan en soutenant Oussam Ben Laden et les Talibans contre l’invasion russe.

Pourtant, comme dans Mein Kampf, tout était écrit. Et Khomeini n’est pas Ghandi. Il aurait suffi de lire les textes les plus anciens de l’ayatollah et d’écouter les cassettes que ses partisans diffusaient par centaines pour connaître son projet d’état religieux et décrypter sa rhétorique émaillée d’anathèmes de toutes sortes, en particulier « contre les juifs et les adorateurs de la croix qui ont scellé un pacte secret afin d’humilier, puis d’éradiquer l’islam de l’Iran ».

Timide opposition et répression 

Les premières semaines de son retour à Téhéran ne sont toutefois pas sans danger pour le représentant d’Allah qui ne dispose pas encore des organes nécessaires pour assurer son pouvoir. Il installe un gouvernement provisoire, mais des tensions opposent de multiples factions. L’anarchie menace. Le haut-clergé lui-même est divisé. Découvrant les intentions réelles de Khomeini, de grands ayatollahs respectés, comme Taleghani et Chariat-Madari, font de la résistance, conformément à l’ancienne tradition chiite qui s’oppose à l’intervention des religieux dans les affaires de l’État. Pour les tenants du dogme, si le chiisme est une religion de contestation, il ne peut y avoir pour autant d’islam politique et ce serait même une profonde contradiction que de vouloir lier les termes « république » et « islamique ». Mais ces opposants seront progressivement réduits au silence. Tout comme les partis politiques existants qui, des nationalistes laïcs à la gauche, s’ils ont pris acte avec résignation de l’irrésistible révolution khomeiniste, espèrent encore pouvoir instaurer un État libéral progressiste, fût-il de couleur « islamique », et imaginent renvoyer très vite l’ayatollah à ses chères études.

 

Ce n’est bien entendu pas l’intention de Khomeini qui ne prononce jamais le mot « liberté » et pour qui la démocratie est « un système corrompu propagé par l’Occident impie ». Que des individus issus de la société civile se fassent élire pour légiférer hors de la loi divine est une hérésie. À l’adresse des libéraux qui composent le gouvernement provisoire, il proclame: « Abandonnez vos idéologies pour rejoindre l’islam! » Et à ses ouailles, il prêche: « N’écoutez pas ceux qui parlent de démocratie. Ils sont contre l’islam. Cassez les plumes empoisonnées de tous ceux qui parlent de nationalisme, de démocratie et de tant d’autres choses… ». Et, plus menaçant: « Je frapperai l’actuel gouvernement à la figure. Je ferai passer tous ces gens en justice devant les tribunaux que je formerai! ».

Et il va frapper. Dès le mois de mars 1979, le message religieux se prolonge dans l’action politique autoritaire, et c’est dans ce glissement que réside la particularité du régime clérical iranien. Les partisans de l’Imam entreprennent de neutraliser tous ceux qui résistent à l’emprise du clergé sur les rouages de l’État. Posant les prémices d’un État totalitaire, les militants du Parti d’Allah occupent désormais le pavé, usant de couteaux, de matraques et de cocktails Molotov contre les réfractaires. On assassine des opposants politiques, on incendie des journaux, on pourchasse les femmes qui refusent le voile. Des Comités islamiques font la loi dans les quartiers. Pour asseoir le nouveau pouvoir, Khomeini crée la milice des Gardiens de la révolution. Tout à la fois police et armée parallèles, les pasdarans deviennent le bras armé de l’arbitraire religieux dans tous les domaines de la société iranienne, puis, à l’extérieur, ils seront le fer de lance de la politique étrangère des mollahs.

Au cours de l’été 1979, les tribunaux islamiques sont chargés d’éliminer tous ceux que l’on soupçonne d’être partisans du « système des infidèles ». Des juges expéditifs prononcent 12.000 exécutions et font emprisonner 100.000 opposants, tandis que trois millions d’Iraniens choisissent l’exil. L’impitoyable procureur Ladjevardi déclare: « Certains nous appellent terroristes islamiques. Mais nous ne faisons qu’obéir aux ordres d’Allah. C’est pour lui que nous tuons. C’est pour lui que nous terrorisons les infidèles et les hypocrites. Nous ne sommes que des instruments de la volonté divine. C’est Allah lui-même qui a décidé de nettoyer ce monde avant qu’il ne soit trop tard! »

Enfin, concoctée en grand secret, la nouvelle Constitution promulguée en décembre 1979 est fondée sur le principe du Wilayat al-Faqih, l’autorité du jurisconsulte religieux. Devenu le Guide suprême à vie, Khomeini, ainsi que ses futurs successeurs, et eux seuls, peuvent désormais valider toute décision à caractère religieux, politique, social ou militaire, en veillant à ce que rien ne déroge aux principes de l’islam. Dans son préambule, la Constitution de la République islamique expose « qu’au cours de son accomplissement révolutionnaire, notre nation s’est purifiée des poussières et des moisissures impies. Elle sest lavée des métissages idéologiques avec l’étranger. Elle est revenue à des positions doctrinales et à des conceptions du monde authentiquement islamiques ».

On comprend dès lors le sens des défis que Téhéran n’a cessé de lancer depuis plus de quatre décennies. En effet, le triomphe de l’islam dans un seul pays n’a pas de sens aux yeux du Guide. Récusant le concept de nationalisme « qui détruit le fondement du message des prophètes », il considère l’Iran comme « une partie libérée du territoire de l’islam ».

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L’engagement de Brigades irakiennes pro Hamas https://mondafrique.com/international/lengagement-de-brigades-irakiennes-pro-hamas/ Tue, 07 Nov 2023 09:06:34 +0000 https://mondafrique.com/?p=99614 Le ciblage des bases US en Irak et en Syrie vient en appui à la bataille « Déluge d’Al-Aqsa », qui se poursuit.Le Pentagone a admis que « les forces américaines avaient été attaquées au moins 12 fois en Irak et 4 fois en Syrie la semaine dernière ».

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Le ciblage des bases US en Irak et en Syrie vient en appui à la bataille « Déluge d’Al-Aqsa », qui se poursuit.Le Pentagone a admis que « les forces américaines avaient été attaquées au moins 12 fois en Irak et 4 fois en Syrie la semaine dernière ».

Un groupe armé se faisant appeler « Résistance islamique en Irak », qui est une organisation regroupant plusieurs milices irakiennes soutenues par l’Iran, a affirmé dans un communiqué publié sur Internet que ses combattants avaient mené trois attaques à différentes heures lundi contre la base aérienne d’Aïn al-Assad près de la ville d’al-Baghdadi, à environ 190 km au nord-ouest de Bagdad, la capitale irakienne.

Ce groupe a également déclaré que ses combattants avaient attaqué une base militaire accueillant des forces américaines près de l’aéroport d’Erbil, capitale de la région semi-autonome du Kurdistan dans le nord de l’Irak, indique ce communiqué sans fournir plus de détails.

De plus, le groupe armé a revendiqué deux attaques supplémentaires contre deux bases militaires des Etats-Unis en Syrie, l’une dans la région de Tell Beydar près de la ville d’al-Hasakah et l’autre contre la base militaire d’al-Tanf près des frontières de la Syrie avec l’Irak et la Jordanie, selon ce communiqué.

Les Américains attaqués en Syrie

Il y a quelques jours, « les combattants de la résistance irakienne » ont ciblé la base d’occupation américaine de l’aéroport d’Abu Hajar – Kharab al-Jir dans le nord-est de la Syrie avec une salve de missiles, confirmant que leurs cibles avaient été directement touchées.

Le 29 octobre, des milices armées ont pris pour cible la base du champ pétrolier d’Al-Omar, dans la campagne de Deir ez-Zor. Cela a été précédé par le ciblage de la base US d’Al-Shaddadi en Syrie via des drones, confirmant qu’ils avaient directement touché leurs cibles.

Les mêmes groupes ont bombardé à plusieurs reprises la base Aïn al-Assad et la base Harir adjacente à l’aéroport d’Erbil au Kurdistan irakien avec des drones, ainsi que la base d’Al-Tanf en Syrie. Même le gazoduc reliant le champ gazier de Koniko et le désert d’Abou Khashab, dans la campagne de Deir ez-Zor en Syrie, n’a pas été épargné.

*Source : Xinhua

*Source : Perspectives Med

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Vidéo, le plus grand camp de réfugiés syriens au monde https://mondafrique.com/limage-du-jour/video-le-plus-grand-camp-de-refugies-syriens-au-monde/ Wed, 04 Oct 2023 18:08:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=97746  

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L’Iran et le Hezbollah ont transformé la Syrie en narco-État https://mondafrique.com/moyen-orient/liran-et-le-hezbollah-ont-transforme-la-syrie-en-narco-etat/ Wed, 27 Sep 2023 07:11:04 +0000 https://mondafrique.com/?p=97460 Le captagon, une amphétamine extrêmement addictive envahit aujourd’hui les rues d’Arabie Saoudite, du Koweit, d’Egypte et arrive aussi en Europe. En mai 2017, les douanes françaises avaient saisi 750 000 comprimés de captagon. Le 2 aout 2023, les services jordaniens de lutte contre les stupéfiants  (AND) ont arrêté 1 106 personnes impliquées dans 599 délits liés à la […]

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Le captagon, une amphétamine extrêmement addictive envahit aujourd’hui les rues d’Arabie Saoudite, du Koweit, d’Egypte et arrive aussi en Europe. En mai 2017, les douanes françaises avaient saisi 750 000 comprimés de captagon.
Le Captagon, amphétamine tirée d’un ancien médicament psychotrope, génère trois fois plus d’échanges pour le régime syrien que les cartels mexicains réunis, selon les chiffres officiels.

Le 2 aout 2023, les services jordaniens de lutte contre les stupéfiants  (AND) ont arrêté 1 106 personnes impliquées dans 599 délits liés à la drogue. Au cours de ce raid, 400 000 comprimés de Captagon ont été saisis.

Dimanche 30 juillet 2023, l’Arabie saoudite a annoncé l’échec de trois tentatives de contrebande de plus de 151 000 comprimés de Captagon.

Le 23 juillet, les services jordaniens de lutte contre les stupédiants  ont déclaré que les agents avaient saisi un peu plus de 200 000 pilules de captagon.  

Au début de juillet 2023, les services de sécurité koweitis ont saisi plus d’un million de comprimés de captagon dissimulés dans un container de ciment.

Au même moment, les services de sécurité irakiens ont effectué une saisie record d’un million de pilules de captagon. Outre les conflits ethniques et religieux qui assaillent le Moyen Orient, une guerre d’un autre type frappe les Etats arabes de la région, une guerre de la drogue. 

Synthétisé pour la première fois en 1961, le Captagon est un stimulant de la famille des amphétamines. La molécule porte le nom de fénéthylline et intervient sur le circuit de la récompense dans le cerveau. Le drogué peut bien se casser un bras, il aura le sentiment que tout pour le mieux dans sa vie.

Dans les mains des trafiquants

Les prescriptions ont été interdites en Occident en 1993 en raison des risques de dépression dus à l’addiction, mais aussi parce que le médicament générait de graves lésions cardiaques. Sans que l’on sache par quels circuits, la molécule très facile à fabriquer, s’est retrouvée entre les mains des trafiquants.

L’Agence France Presse estime le trafic de captagon à 10 milliards de dollars annuels. Un comprimé s’échange – selon sa qualité – entre 1 et 25 dollars. Concernant la fabrication, toutes les pistes remontent à la Syrie et au Liban. Plusieurs noms d’ « industriels » du captagon circulent. Maher al Assad, frère de Bashar et chef de la Quatrième division blindée, une division d’élite dont la mission principale est de défendre le gouvernement, est souvent cité comme l’un des principaux promoteurs du captagon. Selon des témoignages recueillis par l’AFP, des gangs de passeurs achètent les comprimés aux officiers de la Quatrième division et les revendent ensuite dans les pays environnants.

Le Hezbollah à la manoeuvre

Mais d’autres noms circulent. Le 23 mai 2022, le gouvernement jordanien a confirmé que « certaines unités de l’armée syrienne pro-iranienne » étaient impliquées dans le trafic de captagon, mais aussi « les milices fidèles à Téhéran ». Or la principale milice « fidèle à Téhéran » en Syrie n’est autre que le Hezbollah libanais. 

En juillet 2023, la BBC a confirmé le rôle du Hezbollah a travers le téléphone portable de Raji Falhout, un chef de milice rallié au régime de Bashar al Assad. Obligé de fuir sous les coups de boutoir d’une autre milice, ce Raji Falhout a abandonné son quartier général dans lequel les assaillants ont trouvé des sacs bourrés de pilules de Captagon, ses papiers d’identité militaire et un téléphone portable déverrouillé.

« En obtenant un accès exclusif au téléphone, la BBC a trouvé une série de messages entre M. Falhout et un contact libanais qui portait le nom de « Abu Hamza » (…) « En utilisant le numéro de téléphone, la BBC a établi la véritable identité de Abu Hamza – qui est Hussein Riad al-Faytrouni. Des journalistes locaux nous ont dit qu’il était lié au Hezbollah, le parti politique libanais et groupe militant étroitement affilié au gouvernement syrien. »

Officiellement, le Hezbollah nie tout rôle dans la production et la contrebande de Captagon, mais – ajoute la BBC – « un journaliste syrien de la région de Suweida nous a certifié que « Le Hezbollah est impliqué, mais fait très attention à ce que ses membres n’apparaissent pas comme ayant un rôle  dans le transport et la contrebande de la marchandise ». L’Institute international for iranian studies, un think tank saoudien connu sous le nom de Rasanah, affirme lui aussi le rôle du Hezbollah dans le trafic de captagon. « Au Liban, les unités de production de Captagon se trouvent dans des zones contrôlées par le Hezbollah comme la vallée de la Bekaa. Les groupes de trafiquants de drogue au Liban et en Syrie opèrent avec le plein soutien du Hezbollah soutenu par l’Iran ». 

Le captagon, outil de financement

Le captagon a eu tout au long de la guerre civile en Syrie une double fonction. La première a été de financer l’aide militaire iranienne au régime. Ghassan Ibrahim, consultant et journaliste pour ArabNews, affirme que quand « le régime (syrien) s’est retrouvé à court de fonds. IL n’a eu d’autre choix que de développer une nouvelle industrie, avec le soutien de l’Iran (…) » Cette industrie c’était la drogue. « Une coopération a émergé entre un groupe de milices iraniennes et leurs alliés, comme le Hezbollah libanais, et certains dirigeants de l’armée syrienne (…). Cette coopération s’est concentrée sur la production des types de drogues les moins chers au monde et sur leur contrebande depuis la Syrie (dans plusieurs directions), avec la possibilité même de traverser la Méditerranée vers l’Europe ».

Le think Tank saoudien Rasanah confirme cette thèse : « les sanctions américaines contre l’Iran ont réduit le soutien financier de ce dernier à ses milices dans la région et pour compenser ce manque à gagner, des milices comme le Hezbollah ont augmenté leurs opérations de trafic de drogue avec le soutien du régime syrien pour acheter des armes, verser des primes et employer des combattants ». 

Matthew Lewitt, chercheur au Washington institute for near east policy, confirme que l’Iran laisse le Hezbollah se financer par le trafic de drogue ou la contrefaçon quand Téhéran peine à boucler ses fins de mois.

L’industrie du captagon s’est développée d’autant plus vite qu’il existait une industrie chimique en Syrie. Quand la guerre a détruit leurs emplois, les chimistes syriens au chômage ont trouvé un débouché professionnel. Ils ont aussi montré que de petits ateliers artisanaux pouvaient faire aussi bien l’affaire que de grandes usines aseptisées.

La Jordanie dans le viseur

Mais au-delà du financement de l’activité militaire du Hezbollah ou d’une administration syrienne, le captagon a une deuxième fonction. Une fonction offensive. Le captagon est aussi une arme de guerre à destination des pays ennemis de la Syrie et de l’Iran. Ce n’est donc pas un hasard si le trafic s’est organisé principalement en direction de la Jordanie, allié des Etats Unis mais aussi bien évidemment, en direction également des Etats du Golfe et de l’Arabie Saoudite, principal rival de l’Iran au Yemen et dans le Golfe.« Nous sommes confrontés à une guerre le long des frontières, à une guerre de la drogue menée par des organisations soutenues par des parties étrangères. Ces milices iraniennes sont les plus dangereuses car elles visent la sécurité nationale de la Jordanie », a déclaré le porte-parole de l’armée jordanienne, le colonel Mustafa Hiari, à la télévision publique Al Mamlaka.

 « Le vice-ministre yéménite des affaires juridiques et des droits de l’homme, Nabil Abdul Hafeez, a déclaré dans un communiqué que la force al-Qods iranienne avait fait passer de la drogue aux Houthis, qui les avaient ensuite détournés vers d’autres pays voisins ». Avec qui les Houthis du Yémen sont-ils en guerre ? Avec l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Au cours des six dernières années affirme ArabNews, le royaume saoudien a intercepté 600 millions de capsules. Rien qu’en 2020 et 2021, c’est 190 millions de capsules qui ont été saisies. La consommation de captagon en Arabie saoudite est un authentique problème de santé publique.

Certains affirment aujourd’hui que si la Syrie est redevenue un « frère arabe » et Bashar al Assad un président fréquentable, la raison est à cherche du côté du captagon.  En effet, faute de juguler le trafic par la répression, les Etats arabes cherchent à obtenir la coopération du gouvernement syrien.

 Les États arabes ont-ils tort de penser que de bonnes relations avec la Syrie, sa réintégration dans la Ligue Arabe et des aides à la reconstruction etc… peuvent rendre Damas moins dépendant de Téhéran, diluer l’influence iranienne en Syrie et inciter à chercher d’autres sources de financement ? En d’autres termes, l’économie de marché et la mondialisation sous la houlette de Mohamed Ben Salmane ne valent-ils pas mieux que l’ostracisme et le grand banditisme fusse-t-il d’Etat ?

Syrian President Bashar Assad, left, speaks with Iranian Supreme Leader Ayatollah Ali Khameneiy

Selon Reuters, en mai 2023, la Jordanie a effectué une frappe aérienne sur une usine de drogue dans le sud de la Syrie et tué un trafiquant. La réponse de Damas – un silence remarquable – a clairement indiqué que la Syrie n’entendait pas réagir. La Jordanie et la Syrie ont depuis convoqué un groupe de travail sur la lutte contre le trafic de drogue.

Bashar al Assad a-t-il réellement un quelconque pouvoir sur son frère fortement impliqué dans le trafic de drogue ? Dispose-t-il d’un rapport de force avec le Hezbollah sur le trafic de captagon ? Il est permis d’en douter.

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« Le boucher de Damas » revient par la grande porte https://mondafrique.com/a-la-une/le-boucher-de-damas-bachar-al-assad-revient-par-la-grande-porte/ https://mondafrique.com/a-la-une/le-boucher-de-damas-bachar-al-assad-revient-par-la-grande-porte/#comments Sat, 20 May 2023 08:56:28 +0000 https://mondafrique.com/?p=90580 Ce 19 mai, Bachar Al-Assad devrait se rendre à Riyad pour assister au sommet annuel de la Ligue arabe. Le dictateur syrien n’avait plus été convié à ces rencontres depuis mars 2010. En novembre 2011, Damas avait été suspendu de la Ligue, du fait de la violence extrême de la répression qu’il avait déclenchée à l’égard de son opposition intérieure. Un […]

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Ce 19 mai, Bachar Al-Assad devrait se rendre à Riyad pour assister au sommet annuel de la Ligue arabe. Le dictateur syrien n’avait plus été convié à ces rencontres depuis mars 2010. En novembre 2011, Damas avait été suspendu de la Ligue, du fait de la violence extrême de la répression qu’il avait déclenchée à l’égard de son opposition intérieure.

Un article du site « The Conversation »

Mais le 7 mai dernier, la Syrie a été réintégrée ; et le 11 mai, son président a reçu une invitation officielle signée du roi Salmane d’Arabie saoudite. Ce retour par la grande porte consacre la réhabilitation du régime de Damas au niveau régional. Il constitue aussi, plus largement, le dernier acte dans la reconstitution d’un « Concert arabe » (par analogie avec le Concert européen établi suite au Congrès de Vienne de 1815) que la vague révolutionnaire de 2011 avait temporairement disloqué. Toutefois, derrière l’apparente unité retrouvée de ce que le politiste Farid El Khazen avait jadis qualifié de « cartel autoritaire », des différences d’approche à l’égard de la question syrienne subsistent entre les États arabes.

 

Ces pays qui ont impulsé la réhabilitation de Damas : Irak, Algérie, Émirats, Bahreïn…

Pour des raisons diverses, plusieurs des 22 États membres de la Ligue arabe avaient dès le départ affiché des réticences face à la suspension de la Syrie décidée en 2011 à l’instigation du Qatar et de l’Arabie saoudite.

Attaché à une stricte neutralité dans les conflits régionaux, Oman avait été la seule monarchie du Golfe à refuser de fermer son ambassade à Damas et, dès 2015, avait accueilli une visite officielle du ministre syrien des Affaires étrangères.

Dominés par des partis proches de l’Iran, allié du régime syrien, les gouvernements libanais et irakien rejetaient également l’ostracisation d’Assad. L’Algérie avait adopté une ligne similaire pour des raisons tenant à la fois à une opposition de principe aux ingérences étrangères dans les affaires des États de la région, et à une mise en parallèle du conflit syrien avec l’insurrection islamiste que le pays avait connue dans les années 1990.

C’est en 2018, suite à la reprise des régions rebelles du Sud et du centre de la Syrie par les forces loyalistes, que le groupe des pays arabes favorables à la réhabilitation d’Assad commence à s’élargir.

Le mouvement est lancé par les Émirats arabes unis et le royaume du Bahreïn qui, fin 2018, rouvrent leurs ambassades à Damas. Tant Abu Dhabi que Manama avaient jusqu’alors suivi une ligne ambiguë vis-à-vis de la question syrienne. Farouchement hostiles aux mouvements révolutionnaires de 2011 (qui avaient menacé la monarchie bahreïnie sur son propre sol), les deux monarchies avaient soutenu certains éléments de l’opposition syrienne afin d’y réduire le poids relatif des islamistes. Parallèlement, elles continuaient d’accueillir non seulement des ambassades du gouvernement de Damas, mais aussi des figures proches du régime (dont la propre sœur d’Assad, Bouchra) désireuses de se mettre à l’abri, avec leurs fortunes, lorsque les combats faisaient rage en Syrie.

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Une fois acquise la victoire militaire du régime de Damas, se rapprocher de ce dernier relève, pour les monarchies concernées, d’une volonté de fermer définitivement la parenthèse des mouvements révolutionnaires du début de la décennie, dont les répliques de 2019 (en Irak, en Algérie, au Soudan et au Liban) vont bientôt montrer qu’ils ne sont pas un simple souvenir. Pour les Émirats, reprendre langue avec Assad s’inscrit également dans une stratégie d’endiguement de l’influence de la Turquie, alors à couteaux tirés avec Damas.

Égyptiens, Syriens et Saoudiens ouvrent leur espace aérien à la Russie

La fin de l’inflexibilité américaine

L’ouverture de 2018 était initialement restée sans lendemain du fait des sévères avertissements de l’administration Trump à l’endroit de ses alliés régionaux et de la mise en œuvre, l’année suivante, de nouveaux trains de sanctions américaines et européennes contre la Syrie.

Il a donc fallu attendre l’arrivée de Joe Biden en 2021 pour que reprennent les tentatives de réhabiliter Assad. Divisé entre tenants de l’intransigeance (très influents au Congrès) et partisans d’une normalisation à bas bruit via un accord entre le régime et les Forces démocratiques syriennes soutenues par Washington, le gouvernement américain se refuse à tout changement dans ses relations bilatérales avec Damas… tout en laissant de facto le champ libre à ses alliés régionaux pour renouer avec Assad.j

C’est dans ce contexte que survient un nouveau réchauffement des relations bilatérales entre le régime syrien et les Émirats qui aboutit, en mars 2022, à la première visite d’Assad dans une capitale arabe depuis le début du conflit.

Jordanie, Égypte, Arabie saoudite : un rapprochement conditionnel avec Damas

Dans l’intervalle, un nouveau protagoniste est monté dans le train de la normalisation avec Damas : la Jordanie. Soucieux de dynamiser son économie, le royaume hachémite rétablit en 2021 les communications terrestres et aériennes avec son voisin syrien. D’emblée, cependant, la Jordanie s’inscrit explicitement dans une stratégie du « pas-à-pas », appelant à une normalisation graduelle en échange de mesures concrètes.

Celles-ci concernent en particulier le retour des réfugiés syriens, dont plus de 600 000 continuent de résider dans ce pays de 11 millions d’habitants. Elles portent, par ailleurs, sur la présence dans le Sud de la Syrie de milices pro-iraniennes, que la Jordanie souhaiterait voir éloignées de sa frontière, ainsi que sur le trafic de Captagon, une drogue dont le commerce a permis aux acteurs militaires et paramilitaires syriens de compenser la chute des revenus tirés, jusqu’en 2018, des droits de passage entre zones loyalistes et poches rebelles. Porte d’entrée des lucratifs marchés du Golfe, la Jordanie identifie le trafic de drogue comme un problème de sécurité nationale, allant jusqu’à mener le 8 mai dernier (soit le lendemain du retour d’Assad dans la Ligue arabe) un raid aérien en Syrie contre des sites de production de Captagon.

Un autre partisan « conditionnel » de la réhabilitation régionale d’Assad est l’Égypte, qui a souligné que la réadmission de Damas dans la Ligue arabe n’équivaut pas à une normalisation pleine et entière. Médiateur entre Israël et les factions armées palestiniennes, Le Caire attend du régime syrien qu’il exerce une influence modératrice sur ces dernières et sur leurs alliés du Hezbollah libanais, de manière à prévenir des incidents tels que le tir, en avril dernier, de plusieurs dizaines de roquettes depuis le Sud-Liban en direction d’Israël.l

Bien que réunissant un nombre croissant de suffrages, le retour de la Syrie dans la Ligue arabe se heurtait encore, lors du sommet tenu à Alger en 2022, aux réticences de l’Arabie saoudite.

Celles-ci seront finalement surmontées quelques mois plus tard à la faveur de deux développements majeurs. Le premier est le séisme meurtrier du 6 février 2023, qui permet de justifier un mouvement multilatéral de normalisation avec le régime syrien) sous couvert d’assistance humanitaire. Le second est la conclusion, en mars suivant, d’un accord portant sur le rétablissement des relations diplomatiques entre le royaume saoudien et l’Iran, détente qui atténue ce qui constituait jusqu’alors l’un des principaux contentieux entre Riyad et Damas, à savoir l’alliance de cette dernière avec Téhéran.

Le rapprochement avec Damas avait été initialement présenté par Riyad et Abu Dhabi (notamment auprès des partenaires occidentaux) comme une manière d’éloigner Assad de l’orbite iranienne. Ainsi, les investissements des monarchies du Golfe dans la reconstruction de la Syrie devaient supposément contrebalancer l’influence que Téhéran exerce dans le pays à travers le déploiement de milliers de combattants affiliés aux Gardiens de la Révolution. Mais, en réalité, pour l’Arabie, l’actuelle normalisation avec Damas s’apparente beaucoup plus à une acceptation du protectorat de fait de l’Iran sur la Syrie qu’à une tentative de le contester.

Embourbé au Yémen et désillusionné quant à la crédibilité du soutien militaire américain, le royaume saoudien a opté pour un désengagement des conflits régionaux, espérant ainsi promouvoir une stabilité bénéfique à ses ambitieux projets de développement économique. Comme les Jordaniens, les Saoudiens espèrent que leur normalisation avec Damas encouragera Assad à juguler les exportations de Captagon au départ de son territoire.

L’hostilité du Maroc, du Qatar et du Koweït… 

Même après le retour d’Assad dans le giron arabe, il reste un petit groupe d’irréductibles qui, pour des raisons diverses, se refusent à normaliser leurs relations bilatérales avec les autorités de Damas.

Outre le Qatar, sponsor le plus enthousiaste de l’opposition syrienne, ce « camp du refus » inclut le Maroc, qui reproche au régime syrien son soutien politique aux indépendantistes sahraouis du Front Polisario ; le Koweït, où les révolutionnaires syriens conservent de solides soutiens, notamment parmi les députés islamistes au Parlement ; et le gouvernement yéménite en exil, qui voit logiquement d’un mauvais œil le fait que Damas héberge une ambassade du mouvement Houthi.

Aucun des acteurs précités n’a l’envie ou les moyens de s’opposer à l’axe Riyad-Abu Dhabi sur la question syrienne. Toutefois, le (relatif) consensus arabe sur la réhabilitation d’Assad reste fragile et pourrait se fissurer à l’avenir, sous l’effet de deux facteurs.

Le premier est la capacité éprouvée du régime syrien à trahir ses engagements, qui pourrait échauder les partisans d’une normalisation sous conditions. Le second serait un affrontement militaire majeur entre Israël et l’Iran, dont la probabilité reste faible mais s’accroît du fait de la détente saoudo-iranienne. Du point de vue des responsables israéliens, en effet, cette détente les contraint à assumer seuls la tâche d’endiguer l’influence de Téhéran dans la région. Un tel affrontement, qui se jouerait en grande partie sur le sol syrien, mettrait à nu les contradictions des réalignements stratégiques dont Damas constitue aujourd’hui le pivot. En cas de guerre, ceux-là mêmes qui renouent aujourd’hui avec Assad auraient probablement du mal à cacher leur espoir de voir durablement affaibli son allié iranien, qu’ils perçoivent depuis plus de quatre décennies comme la principale menace stratégique à leur encontre.

En attendant, sa participation au sommet du 19 mai marque indéniablement une grande victoire politique pour Bachar Al-Assad, et une terrible désillusion pour l’opposition. Certes, le président syrien avait, au cours de ces dernières années, rencontré certains dirigeants étrangers, comme Vladimir Poutine ou Ebrahim Raïssi ; mais être accueilli à Riyad et se retrouver à nouveau sur la photo de groupe en compagnie des représentants de 21 autres États arabes constitue une étape supplémentaire dans le retour au premier plan d’un homme qui, il y a quelques années encore, apparaissait comme un paria absolu…

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Syrie, les Américains s’inquiètent de l’agressivité militaire russe en Syrie https://mondafrique.com/a-la-une/syrie-les-americains-sinquietent-de-lagressivite-militaire-russe-en-syrie/ Wed, 26 Apr 2023 11:55:39 +0000 https://mondafrique.com/?p=89639 Les avions de chasse russes ont à plusieurs reprises volé dangereusement près des chasseurs américains et au-dessus des forces américaines en Syrie Russes et Américains ont des troupes en Syrie. Et l’hostilité qui les anime en Ukraine se reproduit en Syrie. L’Etat major américain au Moyen Orient se plaint aujourd’hui ouvertement des opérations d’intimidation que […]

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Les avions de chasse russes ont à plusieurs reprises volé dangereusement près des chasseurs américains et au-dessus des forces américaines en Syrie

Russes et Américains ont des troupes en Syrie. Et l’hostilité qui les anime en Ukraine se reproduit en Syrie. L’Etat major américain au Moyen Orient se plaint aujourd’hui ouvertement des opérations d’intimidation que les avions de chasse et les drones russes mènent envers les forces américaines en Syrie. Les Etats Unis craignent un mauvais enchaînement, une maladresse qui pourraient entrainer un conflit ouvert entre les deux superpuissances militaires.

Des accords de non belligérence existaient entre les deux pays sur le terrain syrien, mais il semble que les règles ne tiennent plus. Au cours des deux derniers mois, des avions de combat russes armés ont violé à plusieurs reprises l’espace contrôlé par les chasseurs à réaction américains au-dessus de la Syrie.

« Il y a une sorte d’erreur de calcul, un manque de professionnalisme que je n’ai jamais vu dans l’armée de l’air russe auparavant » a déclaré le lieutenant-général Alexus Grynkewich, chef du Commandement central de l’US Air Force (CentCom). 

Pendant près d’une décennie, les États-Unis et la Russie ont maintenu un pacte de non-agression en Syrie, alors que les deux nations étaient chacune dans un camp opposé pendant la guerre civile du pays. Les deux pays ont même mis en place une hotline qu’ils utilisent pour éviter les erreurs de calcul lorsque l’un ou l’autre mène des opérations militaires en Syrie.

Le général Grynkewich a déclaré que depuis le 1er mars, les forces russes ont violé l’accord plus de 60 fois. Les jets russes ne volent plus à distance, mais s’approchent à moins d’un demi kilomètre des avions américains. Quand les Américains protestent sur la hotline, les Russes réaffirment leur droit à mener des opérations ou bon leur semble.

Les craintes d’un affrontement meurtrier se sont accrues le mois dernier lorsqu’un chasseur à réaction russe a endommagé un drone américain en mer Noire 

Les forces russes ont permis à Bashar al-Assad de reprendre le contrôle d’une grande partie du pays en repoussant les rebelles qui ont tenté de le renverser au printemps 2011. Le Pentagone a mené une campagne de courte durée en 2014 pour armer les forces anti-Assad et a mené un effort plus intense contre l’État islamique qui occupait de grandes parties de la Syrie.

Les quelques 900 soldats américains présents en Syrie sont dispersés sur plusieurs bases dont une, dans le sud du pays, qui a été la cible des milices pro-iraniennes dans la région.

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Un réfugié syrien élu maire en Allemagne https://mondafrique.com/confidentiels/un-refugie-syrien-elu-maire-en-allemagne/ https://mondafrique.com/confidentiels/un-refugie-syrien-elu-maire-en-allemagne/#comments Thu, 06 Apr 2023 07:41:59 +0000 https://mondafrique.com/?p=88647 Un Syrien arrivé en Allemagne en tant que réfugié en 2015 a été élu maire dans une commune du  Land de Bade-Wurtemberg, dans le sud-ouest de l’Allemagne. Ryyan Alshebl, qui a quitté sa ville natale d’As Suwayda en Syrie il y a huit ans, s’est présenté comme indépendant dans la municipalité d’Ostelsheim. Il a recueilli […]

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Un Syrien arrivé en Allemagne en tant que réfugié en 2015 a été élu maire dans une commune du  Land de Bade-Wurtemberg, dans le sud-ouest de l’Allemagne.

Ryyan Alshebl, qui a quitté sa ville natale d’As Suwayda en Syrie il y a huit ans, s’est présenté comme indépendant dans la municipalité d’Ostelsheim. Il a recueilli 55,41% des voix dimanche, battant deux candidats allemands. Il entrera en fonction en juin. 

Né d’un instituteur et d’un ingénieur agronome en Syrie, Alshebl a décrit sa vie comme insouciante jusqu’à l’âge de 20 ans, selon son site Web de campagne. À l’époque, les manifestations contre le gouvernement syrien qui ont commencé en 2011 ont rapidement dégénéré en guerre chaotique. Alshebl était confronté au dilemme d’être enrôlé pour le service militaire dans l’armée syrienne ou de quitter le pays. À l’âge de 21 ans, Alshebl a entrepris le dangereux voyage vers l’Europe en passant par la Turquie jusqu’en Grèce.

Alshebl a profité de la politique d’immigration de l’ancienne chancelière allemande Angela Merkel en 2015. Cette année là, 1,2 million de demandeurs d’asile en provenance du Moyen Orient, d’Asie et d’Afrique avaient été accueillis en Allemagne. Cette politique d’immigration a été également à l’origine de  la croissance soudaine d’Alternative pour l’Allemagne (AfD) un parti anti-immigration.

 

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