Tandis qu’Eric Zemmour préconise de bombarder la ville belge de Molenbeek qui abrite une communauté africaine nombreuse, les bombardements se poursuivent à un rythme soutenu sur la planète.
24h de bombes = 2,5 millions d’euros
On estime à 5 milliards de dollars par jour les dépenses mondiales liées à la guerre, directement ou indirectement, dont les bombardements sont la partie la plus coûteuse en dehors de l’installation de systèmes de surveillance satellite. Pour l’exemple de la Syrie que la France bombarde, deux types de munitions sont utilisées, les GB-12 américains à guidage laser, cédés à 20.000 euros l’unité et annoncés à 1 mètre circulaire d’erreur, et les A2SM français de Sagem, avec une précision équivalente mais beaucoup plus chers, 250.000 euros l’unité. Toutes deux larguées d’un avion Rafale à 135 millions d’euros, dont l’heure de vol coûte environ 40.000 euros au contribuable.
En gros, on estime qu’une journée de bombardement coûte 2.5 millions d’euros, soit le coût mensuel de 3000 retraites en France. Au sol, c’est déjà moins cher. Un fusil d’assaut Famas de Saint Etienne est facturé entre 2000 et 3000 euros selon le modèle, pour des munitions à 25 centimes d’euros l’unité, ce qui explique entre autres la généralisation de la doctrine US du Power Air, à savoir ne pas descendre, rester en l’air et enrichir les marchands d’armes avec le minimum de pertes humaines. On peut aujourd’hui, avec un joystick et un drone, bombarder la terre entière à partir d’une maison à Mougins, dans le Sud de la France.
L’Afrique sous une pluie de bombes
Un exemple, 10 milliards de dollars d’armement, c’est le montant du dernier contrat signé entre la France et l’Arabie Saoudite, officiellement pour détruire le Yémen mais sans clause particulière de suivi des livraisons. Après le Moyen-Orient, véritable mine d’or pour les industriels de ce secteur qui brassent 70 milliards de dollars par an (la France fait un bon 18% de croissance à l’export), le continent le plus bombardé au monde est celui qui fabrique le moins de bombes, à savoir l’Afrique.
Le 5 novembre dernier, l’aviation nigérienne bombardait des positions de Boko Haram dans le sud-est du pays. En janvier 2015, des hélicoptères de combat de l’armée tchadienne bombardaient la ville nigériane de Gamboru (nord-est), située à la frontière camerounaise et tenue par le groupe islamiste Boko Haram. En février, l’aviation égyptienne bombardait des positions de l’Etat islamique (EI) en Libye, et au Soudan, des rebelles sud-soudanais bombardaient des positions gouvernementales dans la ville pétrolière de Bentiu au nord, pendant qu’au Niger, à proximité de la frontière avec le Nigeria, des avions non identifiées bombardaient un village de civils.
En mars, des avions de chasse libyens bombardaient la base aérienne située à l’aéroport de Maitigua, dans la banlieue est de Tripoli. En avril, le Kenya bombardait deux camps de shebabs en Somalie et le même mois, deux bateaux clandestins d’immigrants africains étaient bombardés par la marine égyptienne. En mai, le gouvernement soudanais bombardait la région des monts Nouba, dans l’État du Kordofan du Sud.
Le même mois, le camp de transit de la MONUSCO de Kanyabayonga dans le Nord Kivu, était bombardé par les soldats de l’armée congolaise. En juin, l’armée du Nigeria bombardait quatre villages situés dans l’Etat de Borno et occupés par Boko Haram, pendant que des zones résidentielles étaient bombardées à Benghazi, en Libye, et les USA bombardaient Adjabiya, en Libye toujours, où une réunion de jihadistes aurait été identifiée. Le bilan de cette année n’est pas clairement établi mais l’on sait déjà que les marchands d’armes ont du y faire un très bon bénéfice.
L’invention du bombardement
Ironie du sort, c’est en Afrique qu’a été inventé le premier bombardement aérien de l’histoire. Car si l’on date généralement la première guerre aérienne de l’histoire en 1914-1918, opposant des avions militaires entre eux, le premier bombardement aérien fut inventé par les militaires italiens, en 1911.
La Libye, Tripolitaine de l’époque, était alors sous la domination de l’Empire Ottoman, et l’Italie, voyant son retard sur la course à la colonisation africaine, décida de s’emparer de cette terre. Pour ce faire, elle eut l’idée de larguer des bombes précédant une invasion terrestre en bonne et due forme. Dès l’année suivante, les Français emboîtent le pas et bombardent à leur tour le Maroc et le Liban avec des avions, pendant que l’Amérique envahit le Nicaragua et le Honduras… à pied.
On doit d’ailleurs aux frères américains Wright d’avoir opéré le premier vol de l’histoire, le 17 décembre 1903, dans les dunes de Caroline du Nord. Belle envolée mais qui tout de suite, à inquiété une partie du monde sur la possibilité d’utiliser des avions pour faire la guerre. C’est d’ailleurs en Italie que les frères Wright ont fait une démonstration de leur appareil. La suite est connue. Pour ne parler que des Etats-Unis, ces derniers ont bombardé officiellement 22 pays depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Ce n’est sûrement pas terminé.