Depuis le début de ses ennuis judiciaires, le prédicateur ne cesse d’accabler la justice française. En revanche, il épargne la justice suisse, misant sur la prescription qui serait tombée en 2023. Peine perdue, le Ministère public de Genève vient d’annoncer « qu’un acte d’accusation sera prochainement rédigé ». L’instruction est achevée et la décision « n’est pas sujette à recours ». En clair, il sera renvoyé en jugement pour viol dans sa ville natale, pour reprendre le titre du site de la Radio-Télévision suisse.
Ian Hamel
Les deux informations sont tombées à un mois d’intervalle. En avril, les deux juges d’instruction parisiennes ont signifié aux parties la fin des investigations de viol visant Tariq Ramadan (il est mis en examen pour des viols sur cinq femmes et a été incarcéré dix mois en 2018). En mai, le Premier procureur genevois Adrian Holloway annonce à son tour que l’instruction est achevée et qu’un acte d’accusation sera prochainement rédigé. Cette annonce est un coup particulièrement dur pour le prédicateur qui possède un passeport à croix blanche. En effet, depuis les premières plaintes qui sont tombées en 2017, Tariq Ramadan a soigneusement évité de s’en prendre à la justice helvétique, réservant ses coups à la justice tricolore accusée de tous les maux, à commencer par celui de l’islamophobie.
Les raisons ? L‘auteur de « Islam, la réforme radicale » a longtemps bénéficié d’importants soutiens dans la Cité de Calvin, à commencer par le sociologue Jean Ziegler. Son père, Saïd Ramadan, gendre de Hassan al-Banna, le fondateur des Frères musulmans, est arrivé dans les années 50, fondant le Centre islamique de Genève, aujourd’hui dirigé par son frère Hani Ramadan. L’un de ses frères est un chirurgien réputé, un autre une personnalité reconnue dans le monde de l’enseignement. De plus, le dossier Ramadan embarrasse beaucoup de monde dans la ville du bout du lac : alors qu’il enseignait dans des collèges de 1984 à 2004, Tariq Ramadan aurait eu des relations sexuelles avec ses élèves, sans que l’Instruction publique (l’équivalent de l’Éducation nationale) ne le sanctionne.
Une adresse dans le canton de Genève
En Suisse, le prédicateur est accusé par une femme, surnommée « Brigitte », de l’avoir violé dans un hôtel à Genève en 2008. Des actes sexuels brutaux, accompagnés de coups et d’insultes. Tariq Ramadan s’est-il lui-même persuadé que le palais de justice laisserait passer la prescription, qui serait tombée l’année prochaine ? Par ailleurs, comment expliquer que dans un document de la Cour de justice du 5 juillet 2019, Tariq Ramadan donne un domicile rue du Grand-Bay aux Avanchets, une commune de 6 000 habitants dans le canton de Genève, alors qu’il a quitté la Suisse pour Londres en 2004. Et que depuis 2018, il a l’interdiction de quitter le territoire français… Par ailleurs, il adresse des courriers depuis Saint-Julien-en-Genevois, une ville savoyarde à la frontière avec Genève.
Le petit-fils de Hassan al-Banna imaginait peut-être pouvoir se réfugier en Suisse si la justice française le condamnait, la Confédération n’extradant pas ses ressortissants. C’était sans compter sur l’image aujourd’hui très dégradée de Tariq Ramadan et de sa famille. Commentant un rapport sur les pratiques interdites de certains enseignants, Antonio Hodgers, alors président du Conseil d’État (le gouvernement genevois) déclarait le concernant : « ce rapport fait froid dans le dos. On a eu affaire à un prédateur qui s’est servi de son poste d’enseignant pour assouvir ses propres besoins sans aucune considération. C’est un rapport poignant qu’on oublie pas » (1). Quant à son frère Hani Ramadan, il a été désavoué en mars 2020 par les communautés religieuses de Genève, réunissant chrétiens, musulmans, juifs, bouddhistes. Le directeur du Centre islamique de Genève (CIG), évoquant le Covid, prétendait que la cause des maladies nouvelles « est le fait que les hommes se livrent ouvertement à la turpitude, comme la fornication et l’adultère ». Alors qu’il justifie la lapidation en cas d’adultère, Hani Ramadan innocente son frère et voue aux flammes de l’enfer les plaignantes… Par ailleurs, le directeur du CIG est interdit de territoire français depuis avril 2017.
Attaques contre les magistrats
En revanche, il ne se passe pas un jour sans que des trolls, sur les réseaux sociaux, n’accablent non seulement la justice française, mais les magistrats en charge de l’instruction. Dans son livre « Devoir de vérité », paru le 11 septembre (sic) 2019, Tariq Ramadan écrit notamment : « Cette histoire serait drôle, si elle ne révélait la mauvaise foi des juges et leur absence de scrupule pour justifier le maintien en prison d’un homme malade et dont tout le dossier prouve non seulement son innocence, mais le mensonge de ses accusatrices ». Plus loin : « Pour les juges, désormais, la priorité semble être de constituer un dossier qui, en l’absence de la moindre charge objective de viols, dessinerait le portrait d’un prédateur odieux » (2). Quant au Bureau européen de Tariq Ramadan, il écrivait le 6 septembre 2019 : « « Cette affaire est politique et doit être appréhendée dans le contexte de la société française, de l’islamophobie qui s’y est normalisée (notamment dans les médias) » (3).
Le 30 avril 2020, un « Appel international à l’intention de Nicole Belloubet [alors ministre de la Justice] », paru sur un blog du site Mediapart, lui demandait carrément d’annuler les mises en examen de Tariq Ramadan pour viols et de révoquer les magistrats en charge de son dossier… En d’autres terme, le dernier carré du prédicateur exigeait que le politique foule aux pieds l’indépendance de la justice ! Cet appel international signé par 150 personnalités qualifiées « d’intellectuels et d’activistes de renommée internationale » ne mobilisait que très peu de Français, en dehors de l’ancien chercheur François Burgat et de Houria Bouteldja, prêtresse du Parti des indigènes de la République. Pire en Suisse, on ne retrouvait que trois noms, dont ceux de deux enseignants de plus de quatre-vingt ans, et celui de l’ancienne femme de Bilal Ramadan, l’un des frères de Tariq.
En avril dernier, Le Figaro révélait que les conclusions des trois psychiatres ayant examiné Tariq Ramadan et les femmes qui l’accusent de viols sont accablantes pour le prédicateur. Elles évoquent clairement une « emprise de la part de M. Ramadan […] une ensemble de mécanismes qui permettent à un psychisme d’exercer tout pouvoir sur un autre psychisme, à son seul bénéfice, sans tenir compte du désir de l’autre ». Une autre petite phrase des psychiatres a dû rester en travers de la gorge du petit-fils de Hassan al-Banna, lorsqu’ils rappellent « la mise en évidence de difficultés sexuelles anciennes » chez le prédicateur (4).
- Sophie Roselli, « Le Rapport sur les abus fait froid dans le dos », La Tribune de Genève, 29 novembre 2018.
- Pages 134 et 149.
- « Les nouvelles enquêtes et retours de commissions de la brigade criminelle innocentent Tariq Ramadan et révèlent les dessous politique d’un “fiasco judiciaire“ ».
Stéphane Kovacs, « Affaire Tariq Ramadan : fin de l’instruction », Le Figaro, 12 avril 2022.
Et dire que la guôche bien pensante traitaient d’islamouphoube tout ceux qui dénonçaient la duplicité et le double discours de ce tartuffe à commencer par le directeur de mediapart qui n’a jamais rien vu, jamais rien entendu et qui aujourd’hui est curieusement muet.
Ce predicateur voulait changer l’Europe en sa faveur, il a fini comme un male perdu sous les jupons de ses adeptes qui l’avaient pris pour un prophete des temps modenes. Entre la spirirualité de l’islam et la bonne chaire musulmane, le pOvre n’avait pas tellement le choix. Quelle decheance et quelle hypocrisie.