On a pointé la pauvreté du doigt après le drame de ces quinze femmes écrasées lors d’une distribution alimentaire. Un peu court!
Quinze femmes sont mortes écrasées par un mouvement de foule lors d’une distribution de denrées alimentaires dans la localité de Sidi Boulaalam près d’Essaouira. Les victimes s’étaient déplacées en masse suite à l’appel d’Abdelkader El Hadidi, un imam très connu de la place. Indignation générale sur les réseaux sociaux et ailleurs, des voix se sont élevées pour dénoncer la pauvreté de ces femmes mortes pour quelques kilogrammes de farine et de sucre et même l’irresponsabilité des autorités locales. Est ce qu’il incombe à l’État d’apprendre aux citoyens de faire la queue.
Les mortes ont été enterrées. En revanche, on se trompe toujours sur le coupable. On pointe la pauvreté du doigt. La vérité est que personne ne meurt de faim au Maroc. Oui, personne et cela ne veut pas dire que les pauvres n’existent pas dans le pays.
Ces femmes n’ont pas succombé aux conséquences de leur précarité, elles sont mortes tuées par l’appât soudain de la gratuité. Aucune classe sociale n’est à l’abri d’une telle tentation. J’ai été témoin du même type de comportement dans un hôtel 5 étoiles où était tenue la remise d’un prix littéraire. Des femmes se bousculaient pour s’arracher des romans marocains, écrits par des auteures médiocres et qu’elles ne liront pas de toute manière. En plus, en cette période de fin d’année, c’est la saison.
Les religieux 2.0
Dans le drame de Sidi Boulalam, le vrai coupable est le prêche de ce cheikh qui fait d’un acte de charité un black Friday. Cela lui aurait coûté quoi de distribuer ces biens de première nécessité discrètement? Était-il nécessaire de rameuter 5000 personnes pour quelques paniers coûtant à peine 150 dirhams ? La morale islamique n’incite-t-elle pas à cacher à la main gauche ce que donne la main droite ? Non, il a fallu que cet homme supposé pieux se mette au centre de sa supposée baraka et qui replonge le message religieux dans la préhistoire.
Depuis l’avènement des réseaux sociaux, exorcistes, guérisseurs et super cheikhs se multiplient comme des bactéries dans un bouillon de culture. On aurait cru que le progrès nous protégerait. Et bien non!