La diaspora algérienne peut manifester sa colère autant qu’elle veut sur les réseaux sociaux, le pouvoir d’Alger n’entend pas rouvrir ses frontières de sitôt.
Officiellement, l’épidémie de Covid est sous contrôle en Algérie. Le pays (44 millions d’habitants) enregistre actuellement une moyenne de 200 cas seulement de contamination par jour. Plus de 125 000 cas positifs ont été déclarés. Quelque 3 375 décès ont été recensés en Algérie depuis l’enregistrement du premier cas de Covid-19 le 25 février 2020- soit infiniment moins qu’en France où on dépasse le cas des 100000 morts. Mais pourtant comme pour l’été passé, il n’y aura pas de vacances au bled pour les Algériens de l’étranger. Le gouvernement attend de vacciner sa population au Spoutnik russe -qu’il espère produire localement et administrer à partir de septembre- avant d’envisager une ouverture des frontières.
De deux choses l’une: soit le pouvoir algérien ment sur les chiffres de l’épidémie, ce qui ne serait pas une surprise. Soit le régime veut éviter que les algériens de la diapora ne renforcent, cet été, les manifestations du Hirak qui reprennent de plus belle. Une hypothèse tout à fait plausible.
Des bourdes en série
Aussi radicale soit-elle, cette politique aurait pu être lisible si les autorités algériennes n’avaient pas multiplié les bourdes.
Le 16 mai, le conseil des ministres approuvait « le programme préliminaire de la reprise des vols d’Algérie » et annonçait à partir du 1er juin, pouvoir assurer 5 vols allers-retour quotidiens en International (soit à peu près 10% du traffic d’avant la pandémie).
Cette timide ouverture a suscité un immense espoir chez les Algériens résidents ou bloqués en Algérie.
Une semaine plus tard, revirement du gouvernement. Ce n’est plus 5 vols par jour, mais 5 vols par semaine.
Le plus normalement du monde, le Premier ministre Abdelaziz Djerad a annoncé lundi 24 mai qu’au lieu de cinq vols quotidiens annoncés par le Conseil des ministres il a été arrêté un programme de cinq vols hebdomadaires. Deux en direction de Paris, un en direction d’Istanbul, 1 en direction de Barcelone, le dernier en direction de Tunis. En outre tous les voyageurs arrivant en Algérie devront se soumettre à une quarantaine de cinq jours dans un hôtel dédié, et à leurs frais, et ce, même dans le cas où un test de dépistage négatif au Covid-19 datant de moins de 36 heures était présenté à l’arrivée. Alors que les prix des billets d’avion flambent, pas moins de 1000 euros le Paris-Alger- Paris, le gouvernement a annoncé qu’il maintiendra les frontières terrestres et maritimes fermées « Alors c’était une blague l’ouverture des frontières ? De mauvais goût ! Ou l’art de désespérer les gens » tempête sur son compte FB l’essayiste Wassyla Tamzali.
La diaspora en colère
La grogne monte. Un père de famille a publié sur sa page la capture d’écran d’une réservation d’hôtel à Alger pour toute la durée de la quarantaine obligatoire : 708 euros pour deux chambres au Mazafran (sur la côte ouest d’Alger) entre le 18 et le 23 juillet : “À ce prix, plus celui des billets et des tests, je préfère renoncer au voyage, quitte à ne pas revoir ma mère et à ne pas me recueillir sur la tombe de mon père qui vient de décéder”.
La page des Algériens Bloqués à l’Etranger rengorge de témoignages amères et de manifestations de colère des étudiants, des franco-algériens et des immigrés interdits de fait de séjour en Algérie . Contre les ces mesures du gouvernement, des appels à manifester ce samedi devant l’Ambassade Algérienne à Paris circulent.