- Mondafrique https://mondafrique.com/societe/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Wed, 02 Apr 2025 16:13:33 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/societe/ 32 32 Le tourisme en Côte d’Ivoire (3/4), la sauce gouagouassou au menu des restaurants huppés https://mondafrique.com/video/le-tourisme-en-cote-divoire-3-4-la-sauce-gouagouassou-au-menu-des-restaurants-huppes/ https://mondafrique.com/video/le-tourisme-en-cote-divoire-3-4-la-sauce-gouagouassou-au-menu-des-restaurants-huppes/#respond Sat, 29 Mar 2025 08:58:27 +0000 https://mondafrique.com/?p=130644 Dans un Abidjan qui se développe à un rythme effréné, la Côte d’Ivoire implémente sous le fouet de la demande une gastronomie typiquement ivoirienne qui a déjà été adoptée dans les principaux hôtels de luxe. Correspondance à Abidjan, Bati Abouè Dans les cuisines du restaurant de l’hôtel Palm Beach, le chef Léandre Kouamé, un ivoirien […]

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (3/4), la sauce gouagouassou au menu des restaurants huppés est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Dans un Abidjan qui se développe à un rythme effréné, la Côte d’Ivoire implémente sous le fouet de la demande une gastronomie typiquement ivoirienne qui a déjà été adoptée dans les principaux hôtels de luxe.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Côte d’Ivoire : la cheffe Zeinab Bancé bat le record Guinness du plus long marathon de cuisine

Dans les cuisines du restaurant de l’hôtel Palm Beach, le chef Léandre Kouamé, un ivoirien formé en France, expose avec délicatesse des produits locaux qu’il prépare soigneusement avec son savoir-faire français. Comme lui, plusieurs de ses confrères parfois formés par des restaurateurs ayant pignon sur rue de l’Hexagone sont de plus en plus enclins à utiliser les spécialités locales.

Au nombre de celles-ci, la sauce gouagouassou, emblématique de la cuisine ivoirienne ne manque plus au menu des restaurants huppés. Autour d’une viande de lapin qui mijote dans une marmite, des dizaines de tranches d’aubergines et de tomates africaines cuisent à petit feu avant que le tout ne soit arrosé d’huile rouge, de poudre d’akpi – une amande – et d’un brin de poivre appelé dans le jargon local « fèfè » puis enfin d’un grand bol d’eau.

Hommage à la cuisine de maman

C’était la recette culte de la mère de Léandre décédée depuis 2018. Alors, forcément, elle est devenue la sienne. « Je l’ai tellement appréciée durant mon enfance », admet-il, avant d’ajouter que la revisiter était presque une obligation de rendre hommage à ma mère qui ne m’a pas vu devenir un chef cuisinier.

Amoureux de la cuisine, Léandre, formé en France, espère ouvrir dans quelques années son propre restaurant. En attendant, il a rendez-vous avec Jérôme Grobli qui patiente dans une salle attenante éclairée à la lumière du jour pour goûter le gouagouassou en cassolette qu’il a commandé.

Ce midi, il partage ce repas copieux présenté avec soin avec son amie, Maïmouna Doumbia. Elle ne cache pas sa surprise de voir le gouagouassou, un plat traditionnel typiquement ivoirien dans un restaurant pareil. « Franchement c’est un plaisir », soupire-t-elle d’émerveillement.

Ici, rien à voir avec les maquis, ces restaurants typiques informels et très animés où l’on mange à la main le poulet ou le poisson braisé avec de l’attiéké (semoule de manioc) ou l’alloco (bananes plantain frites).

Des chips de manioc

A plusieurs kilomètres de là à Angré, au nord de la commune de Cocody, Hermiole Kassi expérimente sa nouvelle création d’amuse-bouche inspiré du placali, plat typiquement ivoirien fait de sauce gluante au gombo, de morceaux de viande et de poisson séché qui accompagnent la pâte de manioc fermenté.

Les Abidjanais dégustent également avec gourmandise le manioc soufflé et transformé en chips. Aux Trois Palmiers, le chef cuisinier, le Français Matthieu Pernier, propose des amuse-bouches de ce type chaque semaine, avec l’idée de « réveiller un souvenir chez les personnes qui connaissent parfaitement ces plats ». Car la moitié de sa clientèle est ivoirienne, avoue-t-il.

« Même si notre cuisine se veut être internationale parce que c’est un hôtel cinq étoiles, je pense que c’est un non-sens de ne pas faire un clin d’œil à tous les beaux produits qui nous entourent », affirme-Pernier. D’autant que grâce aux savanes du nord du pays où le climat est chaud et sec, il y a des céréales » à foison ou encore le « fonio » et le « sorgho », détaille Léandre, tandis que dans la zone forestière du sud, les « feuilles d’épinard », de « taro » et « des produits typiquement tropicaux » sont disponibles.

La gastronomie enseignée à l’école

Pour apparaître sur la carte culinaire internationale, la Côte d’Ivoire cherche à normer et à codifier sur des fiches techniques les éléments qui identifient sa gastronomie. Et avec cela parvenir à cette norme et l’enseigner dans toutes les écoles hôtelières, a récemment expliqué le directeur du Festival de la Cuisine ivoirienne (FCI), Dr. Klo Fagama.

Lancé en 2023, ce festival s’est rapidement imposé comme un événement incontournable du calendrier culturel et touristique de la Côte d’Ivoire puisqu’en seulement trois éditions, il est devenu une vitrine des richesses culinaires locales et un levier pour la reconnaissance internationale de la gastronomie ivoirienne.

Car pour le directeur du FCI, « la gastronomie est un véritable marqueur identitaire, un élément de cohésion sociale, un vecteur de développement et d’attractivité touristique. Qui permet non seulement de préserver notre héritage culinaire mais aussi de le moderniser et de l’exporter ».

L’Association des chefs créateurs d’émotions culinaires de Côte d’Ivoire ne dit pas autre chose. Puisqu’elle contribue également à enraciner cette vision qui a commencé au milieu des années 2000. Avant cette date, les chefs de restaurants huppés avaient l’habitude de faire des plats occidentaux avec des produits importés.

Mais le coût de la vie devenant cher, tous se sont tournés vers des produits moins onéreux et disponibles. Outre l’aspect financier, il y a une volonté de donner « l’accès » à la cuisine locale aux « grands restaurants de luxe » qui fleurissent depuis plusieurs années à Abidjan.

2025, année « Côte d’Ivoire, terre de saveurs »

La semoule de manioc très pauvre en gluten, en protéine et en matières grasses, mais extrêmement riche en magnésium, potassium, calcium, vitamine et fer. Ce qui en fait un allié de choix pour les soucis digestifs et les régimes minceur.

Surfant à la fois sur la grande visibilité offerte par l’immense succès de la CAN 2023 organisée par la Côte d’Ivoire, ainsi que l’inscription de l’attiéké (semoule de manioc) au patrimoine de l’Unesco l’année dernière, Abidjan a déjà placé l’année 2025 sous le signe de la « Côte d’Ivoire, Terre de saveurs » afin de positionner la cuisine ivoirienne comme un atout touristique majeur, lors du forum ivoiro-thaïlandais organisé par l’Ambassadrice ivoirienne, Ada-Kouassi, en poste en Thaïlande.

A cette occasion, Mme Ada-Kouassi a mis en parallèle les traditions culinaires de la Thaïlande et de la Côte d’Ivoire. La première renommée pour ses saveurs exotiques et ses marchés de rue, tandis que la seconde se distingue par ses plats emblématiques comme le gouagouassou, l’Attieké, inscrit au patrimoine de l’Unesco, ou encore le Kedjenou, (recette de ragoût très épicée de viande de brousse ou de poulet) et l’alloco, (frite de banane mûre ».

Le tourisme en Côte d’Ivoire (2/4): Abidjan, la magnifique vitrine

Le tourisme en Côte d’Ivoire (1/4), un nouvel eldorado

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (3/4), la sauce gouagouassou au menu des restaurants huppés est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/video/le-tourisme-en-cote-divoire-3-4-la-sauce-gouagouassou-au-menu-des-restaurants-huppes/feed/ 0
Le tourisme en Côte d’Ivoire (2/4): Abidjan, la magnifique vitrine https://mondafrique.com/societe/notre-serie-abidjan-metamorphoses-dune-ville/ https://mondafrique.com/societe/notre-serie-abidjan-metamorphoses-dune-ville/#respond Fri, 28 Mar 2025 07:48:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=130145 Sur un ton à la fois provocateur et détaché, Venance Konan, journaliste et écrivain, lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire 2012, revient dans cette nouvelle chronique sur les métamorphose d’Abidjan, cette ville qui est la sienne et qui est en train de devenir une des grandes capitales africaines où affluent chaque années des touristes […]

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (2/4): Abidjan, la magnifique vitrine est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Sur un ton à la fois provocateur et détaché, Venance Konan, journaliste et écrivain, lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire 2012, revient dans cette nouvelle chronique sur les métamorphose d’Abidjan, cette ville qui est la sienne et qui est en train de devenir une des grandes capitales africaines où affluent chaque années des touristes de plus en plus nombreux

Nous étions en 1987 et je commençais ma carrière de journaliste dans un journal qui venait de naître et qui s’appelait « Ivoir’soir ». Une année plus tôt Kéké Kassiry avait sorti sa chanson « Abidjan », qui faisait danser tout Abidjan, toute la Côte d’Ivoire, et toute l’Afrique sur les rythmes du « gnama gnama », ou la danse des loubards.

« Abidjan é

Oh oh, Abidjan hé !

Y a des sapés

A Abidjan é

Y a des branchés

A Abidjan é

Y a des griffés

A Abidjan é

Y a la vie à Abidjan

Y a la joie à Abidjan y a la fête à Abidjan é »

Oui, à cette époque c’était tous les soirs la fête à Abidjan, la ville la plus branchée et la plus bouillonnante d’Afrique francophone et même au-delà. Abidjan était en pleine croissance. De nouveaux quartiers sortaient de terre à grande vitesse. Adjin, Angré, Attoban, partout, il y avait des promotions immobilières pour toutes les bourses.

« Le Plateau », le Manhattam africain

Le quartier du Plateau, en plein cœur de la ville, avec ses gratte-ciels, cultivait nonchalamment son côté Manhattan d’Afrique. Au temps colonial c’était le quartier des Européens. Les Africains eux, habitaient Treichville, de l’autre côté de la lagune, et Adjamé, dans le prolongement du Plateau. Plus tard, Cocody, à l’est du Plateau devint le quartier des « en haut d’en haut », c’est-à-dire la nouvelle bourgeoisie ivoirienne. Et puis il y eut les cités dortoirs de Yopougon (qui faisait un peu penser à Soweto en Afrique du sud), d’Abobo, de Port-Bouet, d’Attécoubé…

Côté ambiance, Abidjan s’amusait. Il y avait des maquis, des clubs de jazz, des boîtes de nuit, des dancings partout, des concerts tous les week-ends, et de galeries d’art dans les quartiers chics. Abidjan dansait sur la musique de Kéké Kassiry. Et aussi, sur le Zouk venu des Antilles, sur le Soukouss de ce pays qui s’appelait encore le Zaïre, sur le reggae d’Alpha Blondy. Les clubs de jazz, c’était du côté de Marcory et de Cocody, et les dancings, dans les gros quartiers populaires tels que Yopougon ou Abobo. A Treichville, c’était plutôt les boites de nuit, dont le Griffet, celle du célèbre animateur télé Roger Fulgence Kassy qui décédera en 1989. Abidjan était toujours en fête, Abidjan était une fête. Les artistes peintres avaient inventé le Vohou Vohou, ou l’art de faire de la peinture avec tout et n’importe quoi. Tous les artistes africains qui voulaient se faire un nom passaient nécessairement par Abidjan. Même le grand Kassav ne se fit connaître en Afrique qu’après s’être produit à Abidjan.

Le départ du « Vieux »

Le président Houphouet Boigny, dit le Vieux »

Abidjan ne le savait pas encore, mais elle vivait ses derniers jours de joie et de tranquillité avant très longtemps. En 1990, la crise qui couvait éclata. Les jeunes voulaient tout : le départ du « Vieux », le Président Félix Houphouët-Boigny, au pouvoir depuis trente ans, la démocratie, de bonnes conditions d’études, du travail, tout. Chaque jour c’étaient des manifestations, des grèves, des bus incendiés, des bombes lacrymogènes, des arrestations, parfois des morts. Le cœur n’était plus à la fête. Non, il n’y avait plus de joie à Abidjan. Mais les étudiants trouvèrent l’inspiration pour inventer un nouveau genre musical, le Zouglou, qui chantait leurs misères et celles de leur société.

Le « Vieux » meurt en 1993. Henri Konan Bédié, son dauphin, lui succède. La situation politico-sociale ne s’améliore pas. Le pays se divise de plus en plus. Chacun se replie sur lui, sur sa région, sur son ethnie, et les soirs, l’on sort de moins en moins de son quartier. Les galeries se ferment les unes après les autres. Les clubs de jazz et les dancings aussi. Ça ne sent pas bon.

L’hôtes Ivoire depuis la baie d’Abidjan

En 1999, à la veille de passer au nouveau millénaire, survient l’impensable dans ce pays connu pour sa stabilité dans cette Afrique si instable : un coup d’Etat. Suivi par une transition militaire violente. Et des élections tout aussi violentes dix mois plus tard. Et deux ans plus tard, arrive une rébellion armée qui coupe le pays en deux.

Le pays s’enfonce dans le chaos. Un chaos qui durera huit longues années. Il y a un nord occupé par la rébellion, et un sud dit « loyaliste ». Les populations venues à Abidjan des zones occupées par la rébellion s’installent où elles peuvent, n’importe où, créent des bidonvilles qui poussent comme des champignons. L’hôtel Ivoire, l’hôtel de luxe par excellence où toute personne qui se respecte doit avoir passé au moins une nuit, est occupée par les « jeunes patriotes », soutiens indéfectibles du régime d’Abidjan. Il sera plus tard le théâtre de meurtriers affrontements entre ces « jeunes patriotes » et l’armée française.

Au rythme du « Coupé Décalé »

« Rue Princesse », une histoire de la nuit

Et curieusement, c’est à cette époque que les Ivoiriens inventent une musique qui envahira toute l’Afrique. Le « Coupé Décalé ». On l’écoute et la danse dans les super-maquis et les bars climatisés. Yopougon est le temple du Coupé Décalé. On s’encanaille aussi dans les bars de la Zone 4, un sous-quartier de Marcory. Les filles s’y exhibent complètement nues. Progressivement, c’est toute la ville qui se pervertit.

A Yopougon il y a la fameuse « rue princesse », bordée de dizaines de maquis les uns plus bruyants que les autres. Là-bas aussi la chair de jeune fille se monnaye pour pas grand’chose, une bouteille de bière, ou juste de quoi manger, et se consomme sur un parking, ou parfois dans la rue, sans souci de discrétion. Tout juste à côté, dans une rue adjacente, c’est la chair de très jeunes enfants, parfois de douze ans qui se monnaie. Abidjan devient glauque. Et triste.

En 2011, le pouvoir est renversé après des élections aux résultats très contestés et une guerre éclair. En avril, lorsque les combats cessèrent, il y avait des cadavres et des monceaux d’ordures dans toutes les rues. Il fallut nettoyer, curer, nettoyer, curer. Puis réparer, reconstruire, construire. Et Abidjan se mit à changer. Quelques semaines après la fin des hostilités, personne n’aurait pu dire que la ville fut l’objet de violents et meurtriers combats.

Abidjan renait de ses cendres

Quelque quinze ans après, Abidjan est aujourd’hui méconnaissable. Ont surgi de partout de nouvelles routes, de nouveaux échangeurs, trois nouveaux ponts, là où en 50 ans on ne put en construire que deux, de nouveaux quartiers, de nouveaux gratte-ciels…Abidjan vit à nouveau. Abidjan respire mieux. La forêt du Banco, la plus grande forêt primaire d’Afrique située en pleine ville est clôturée pour la protéger contre les prédateurs. L’ancienne décharge d’Akouédo est transformée en jardin.

Abidjan attire à nouveau. On y organise de grands évènements. Les avions qui y vont sont toujours pleins. Les hôtels aussi. Abidjan fait à nouveau la fête. De nouveaux endroits pour se divertir se sont ouverts partout, les artistes ont retrouvé leur créativité et les galeries se multiplient.  Les jeunes filles qui s’exhibaient toutes nues dans des bars en Zone 4 et ailleurs ont été priées d’aller s’habiller.

Une capitale du football

Le stade Félix Houphouët-Boigny dans le quartier du Plateau, à Abidjan (photo d’illustration). © AFP/Sia Kambou

On a aussi construit de nouveaux stades et en 2024, la Côte d’Ivoire s’est offert le luxe d’organiser une Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de football, qualifiée de meilleure jamais organisée dans l’histoire de cette coupe, et elle l’a gagnée. C’est le retour de la Côte d’Ivoire qui gagne. Et ça se fête.

Après la fête, il faut penser au cadre de vie et à la sécurité des Abidjanais. Alors on a cassé les bidonvilles qui avaient poussé un peu partout dans l’anarchie, dans des zones à risque. Des dents ont grincé, mais c’était le prix à payer.

Le pays doit avancer. Et il doit avancer avec Abidjan, sa vitrine.

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (2/4): Abidjan, la magnifique vitrine est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/societe/notre-serie-abidjan-metamorphoses-dune-ville/feed/ 0
Le tourisme en Côte d’Ivoire (1/4), un nouvel eldorado https://mondafrique.com/societe/cote-divoire-nouvel-eldorado-des-touristes-1-4/ https://mondafrique.com/societe/cote-divoire-nouvel-eldorado-des-touristes-1-4/#respond Wed, 26 Mar 2025 04:30:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=128301 La Côte d’Ivoire profite du temps de sa renaissance pour séduire plus de monde. Après la belle campagne victorieuse à la Coupe d’Afrique des Nations, Abidjan  a plus que jamais fière allure avec ses ponts à haubans, son architecture recherchée, ses routes neuves, ses lumières qui confirment sa réputation de ville lumière, ses restaurants, petits […]

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (1/4), un nouvel eldorado est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
La Côte d’Ivoire profite du temps de sa renaissance pour séduire plus de monde. Après la belle campagne victorieuse à la Coupe d’Afrique des Nations, Abidjan  a plus que jamais fière allure avec ses ponts à haubans, son architecture recherchée, ses routes neuves, ses lumières qui confirment sa réputation de ville lumière, ses restaurants, petits ou grands, qui proposent une riche gastronomie, sa musique, ses habitants hospitaliers qui savent offrir un sourire ou un bon mot à l’inconnu de passage…

Cette hospitalité traditionnelle, brouillée par les conflits de ces dernières décennies, est ce trésor que le ministère du tourisme ivoirien exploite pour transformer la Côte d’Ivoire en l’une des destinations touristiques les plus prisées d’Afrique grâce aux moyens sur lesquels le gouvernement ivoirien a décidé de mettre à la disposition de ce secteur.

Misant aussi sur ses sites touristiques fabuleux comme le montre ci dessus l’image des chutes du Man, dans l’Ouest du pays, son art culinaire légendaire ainsi que sa musique au rayonnement mondial, la Côte d’Ivoire se rêve parmi les cinq premières destinations touristiques africaines.

Mondafrique vous propose ici le premier article d’une série de quatre papiers consacrés au boom touristique ivoirien

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

 

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Alors que le secteur touristique avait été dynamité par les crises sociopolitiques successives que le pays trop longtemps a connues, cette industrie réalise désormais des performances spectaculaires avec une croissance annuelle de 6,4% depuis 2019. Selon le rapport 2024 du Forum économique mondial sur le développement du tourisme et des voyages, la Côte d’Ivoire est classée 18è pays africain le plus performant dans le secteur touristique et seconde économie mondiale dans ce domaine. Derrière ce succès, apparaissent des investissements massifs qui ont permis d’augmenter en quantité et en qualité les infrastructures touristiques du pays, des hôtels à la location des véhicules, en passant par la restauration

Depuis plusieurs années, la capitale ivoirienne scintille. Son bitume qui se renouvelle au fur et à mesure qu’il se dégrade ajoute au zéphyr porté par la lagune Ebrié un sentiment de fraîcheur et de propreté. Chaque carrefour est un chantier et les gratte-ciels rivalisent de couleurs et de beauté. Ici, un nouveau pont, là un échangeur en chantier qui provoque des embouteillages interminables, là encore des hôtels cinq étoiles dont la vitrine invite à y séjourner, ou encore des espaces et des plages propres qui vous appellent à prendre le large…

Abidjan, ville phare

Le pays qui a renoué avec la croissance économique grâce à des investissements en nette progression, rêve désormais ouvertement depuis 2012 de devenir l’une des cinq premières destinations touristiques d’Afrique. Il y a en effet de quoi : Abidjan est la ville de la joie. Même les quartiers déshérités ne perdent jamais leur sourire parce que dans ce pays d’un peu plus de 30 millions d’habitants, c’est l’espoir qui fait vivre.

Connu pour son cacao dont elle domine les statistiques sur le marché mondial, la Côte d’Ivoire a terminé l’année 2024 en tête, avec 2,2 millions de tonnes des fameuses fèves. Derrière elle, son concurrent le plus proche, le Ghana, n’a fait mieux que 600 mille tonnes. Mais depuis plusieurs années, les ressources cacaoyères connaissent des fluctuations. À cause de la pluviométrie qui fait des siennes, des chocolatiers fortunés mais qui négocient sec et les multiples réglementations de l’Union européenne. Alors, le gouvernement ivoirien a décidé de diversifier ses ressources en misant également sur le secteur touristique qui était à la peine à cause des crises politiques interminables des années passées.

À Abidjan, il y a les minicars appelés « gbaka » pour permettre aux bourses faibles de relier les différents quartiers.

76,5 milliards d’investissements

rand-Bassam fut la première capitale coloniale, portuaire, économique et juridique de la Côte d’Ivoire ; elle témoigne des relations sociales complexes entre les Européens et les Africains, puis du mouvement populaire en faveur de l’indépendance.

Et depuis, le secteur a été relancé. A partir de 2011 et dans la foulée de la politique économique implémentée par le nouveau pouvoir, de nombreuses réformes ont été initiées, dont la plus récente reste la stratégie « Sublime Côte d’Ivoire » qui vise à hisser la Côte d’Ivoire parmi le top 5 des destinations touristiques d’Afrique à travers l’organisation combinée d’événements sportifs et artistiques majeurs, ainsi que la mise en place d’infrastructures capables d’émerveiller le visiteur.

Pour ce faire, entre 2011 et 2013, le gouvernement ivoirien a supervisé et encouragé la construction de 114 établissements hôteliers de moyen standing et de 3 étoiles pour un total de 1980 chambres représentant des investissements globaux de 76,5 milliards de FCFA. Grâce à cela, depuis 2019, le pays a doublé ses capacités hôtelières, le nombre d’hôtel étant passé à 3 320 contre 1 435 en 2011. Ce qui a permis créer 129 000 emplois selon les statistiques du ministère de l’économie et des finances. La Côte d’Ivoire a aussi organisé la dernière Coupe d’Afrique des nations qui a fait déferler sur la ville d’Abidjan et celles de l’intérieur du pays plus d’un million de visiteurs.

La Côte d’Ivoire veut également rentabiliser cet élan en faisant du pays un hub sportif de la sous-région africaine. Pendant ce temps, la gastronomie ivoirienne a acquis dans la foulée une notoriété inégalée. L’attiéké, l’aliment de base des Ivoiriens est désormais inscrit au patrimoine de l’Unesco et s’est exporté des maquis, ces restaurants ivoiriens nichés en plein air dans les rues d’Abidjan et de l’intérieur du pays aux places parisiennes. Même le foutou, l’Alloco, le poisson braisé et le poisson thon grillé à l’huile bouillante se mangent aussi bien à Bamako, Dakar, Ouaga qu’à Paris.

Le tourisme, 7,3% du PIB

Une partie du grand marché d’Adjamé dans la commune commerciale du même nom.

D’un seul coup, le secteur touristique a renoué avec la croissance qui représente désormais 7,3% du Produit Intérieur Brut (PIB) alors qu’il représentait 1,5% du PIB en 2011. Encouragé par ces chiffres prometteurs, la Côte d’Ivoire a renforcé le cadre institutionnel en adoptant un Code du Tourisme qui permet, grâce à Côte d’Ivoire Tourisme, d’assurer la promotion de la destination Côte d’Ivoire.

Parallèlement, le pays continue de multiplier et de moderniser ses infrastructures. Grâce au programme présidentiel, plusieurs sites hôteliers phares ont en effet été réhabilités. Le Sofitel Hôtel Ivoire d’Abidjan, symbole de la modernité ivoirienne avec ses 426 chambres est ouvertement en mode séduction, tout comme l’Hôtel des Parlementaires de Yamoussoukro. Celui-ci surplombe le pays Baoulé avec ses 300 chambres et soutient la concurrence avec l’Hôtel Président qui fut longtemps le porte flambeau de l’hôtellerie grand luxe dans la capitale politique de la Côte d’Ivoire. Il y a aussi le Palm Club avec ses 88 chambres spacieuses et neuves, etc.

De nouvelles constructions hôtelières ont également vu le jour. Parmi elles, l’hôtel Azalaï (190 chambres), le Radisson Blue Airport (252 chambres), Hôtel Onomo (118 chambres), le Noom Hôtel (179 chambres) et bien d’autres qui complètent l’immense palette d’hébergement que la Côte d’Ivoire s’est offerte en l’espace de quelques années seulement.

Le pays a aussi misé sur des infrastructures ultra-modernes, d’abord des infrastructures de transport aérien qui ont débuté par la rénovation de l’aéroport international d’Abidjan, un édifice « en pleine mutation », selon les mots du ministre du Tourisme Fofana Siandou, qui doit permettre l’accueil de cinq millions de passagers en phase 1. Puis en phase 2, doubler sa capacité à 10 millions de voyageurs.

Des infrastructures en plein boom

Ensuite par le biais d’une compagnie aérienne solide. En 2024, Air Côte d’Ivoire a pu étoffer sa flotte en acquérant des avions de génération récente. Enfin, il y a eu « tout un maillage des infrastructures routières modernes ou réhabilitées avec la construction de routes neuves », a rappelé, il y a quelques mois, Siandou Fofana, le ministre du tourisme. Et le même d’ajouter: il n’est pas possible d’«oublier la Côte d’Ivoire, il faut faire avec ».

D’autant que la destination Côte d’Ivoire a de nombreux avantages. D’abord sa géographie, sa stabilité politique, son hospitalité légendaire, ses quartiers toujours aussi animés, ses belles plages, sa musiqué colorée, sa gastronomie et son climat apaisé qui en font une destination à découvrir. A tel point la Côte d’Ivoire ambitionne de devenir rapidement un hub du tourisme régional.

Car en plus des offres touristiques balnéaires classiques, le pays met également en avant de nouveaux circuits culturels qui représentent une part importante du tourisme d’affaires. Le pays dispose au surplus d’un autre atout, celui d’abriter un nombre incalculable de sièges et bureaux régionaux de grandes entités et d’institutions internationales telles que la Banque africaine de développement (BAD), le FMI, la Banque mondiale, le Conseil de l’Entente ou encore la bourse régionale des valeurs.

Le rêve africain de la Côte d’Ivoire vaut son pesant d’or. Alors que le cacao dont le pays est le premier producteur mondial subit les contrecoups de la rareté de la pluviométrie et des multiples réglementations de l’Union européenne, le gouvernement ivoirien diversifie ses ressources en misant sur le secteur touristique

Dans le deuxième volet de notre enquète sur le tourisme ivoirien, une chronique signée par Vanance Konan: « Abidjan, la métamorphose d’une ville » 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cet article Le tourisme en Côte d’Ivoire (1/4), un nouvel eldorado est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/societe/cote-divoire-nouvel-eldorado-des-touristes-1-4/feed/ 0
Notre portrait d’un jeune sénégalais engagé, Abass Mbathie https://mondafrique.com/societe/notre-portrait-dun-senegalais-engage-abass-mbathie/ https://mondafrique.com/societe/notre-portrait-dun-senegalais-engage-abass-mbathie/#respond Mon, 24 Mar 2025 06:40:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=130289 Le Sénégal peut être fier met d’Abass Mbaye, un pur produit de l’Université Alioune Diop de Bambey, qui a brillamment représenté l’Afrique au Prix International de la Liberté, organisé par l’Institut International des Droits de l’Homme et la Région Normandie. Le Prix Liberté invite les jeunes de 15 à 25 ans en France et dans […]

Cet article Notre portrait d’un jeune sénégalais engagé, Abass Mbathie est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Le Sénégal peut être fier met d’Abass Mbaye, un pur produit de l’Université Alioune Diop de Bambey, qui a brillamment représenté l’Afrique au Prix International de la Liberté, organisé par l’Institut International des Droits de l’Homme et la Région Normandie.

Le Prix Liberté invite les jeunes de 15 à 25 ans en France et dans le monde entier, à désigner chaque année une personne ou une organisation engagée dans un combat exemplaire en faveur de la liberté.

Parmi 600 candidatures venues du monde entier, Abass a été l’un des trois Africains sélectionnés pour siéger au jury, aux côtés de jeunes issus des quatre continents. Sa mission ? Déterminer les combats les plus impactants pour la liberté et les droits humains. Une responsabilité lourde, mais qu’il a portée avec engagement, passion et détermination.

À 25 ans, Abass Mbathie incarne une jeunesse africaine consciente et résolument tournée vers l’action. Humanitaire, entrepreneur social et militant écologiste, ce jeune Sénégalais refuse la fatalité et multiplie les initiatives pour une Afrique plus juste, solidaire et durable.

Un portrait signé par Rania Hadjer.
 
Prix Liberté 
 
 

Prix Libe

Voici le lien ci dessus pour ceux qui souhaitent concourir à la prochaine remise de prix en juin

Titulaire d’un master en gouvernance territoriale et développement durable, Abass Mbathie est avant tout un acteur de terrain. « J’ai grandi en observant des injustices autour de moi. Le fossé entre les riches et les pauvres en Afrique me révolte particulièrement. » confie-t-il.

Son engagement dans l’humanitaire débute en 2018, lorsqu’il parcourt les 14 régions du Sénégal pour identifier les besoins les plus urgents. Il découvre alors des réalités insoutenables : des enfants déscolarisés faute de moyens, des villages privés d’eau potable, des personnes en situation de handicap sans assistance.

« L’accès à l’éducation ne devrait pas être un privilège, tout comme l’accès à l’eau et à la santé. Pourtant, dans nos pays, ce sont encore des batailles à mener ».

Face à ces inégalités, il crée la Fondation Abass National grâce à laquelle, des centaines d’enfants reçoivent chaque année des fournitures scolaires et des bourses, des puits sont creusés, et des fauteuils roulants sont distribués aux plus démunis.

Mais Abass Mbathie ne se limite pas à l’humanitaire. Soucieux d’apporter des solutions durables, il crée Récolte Numérique Solidaire, une entreprise sociale qui lutte contre le gaspillage alimentaire en utilisant la technologie. « Nous avons un paradoxe insoutenable : des tonnes de nourriture gaspillées alors que des millions de personnes souffrent de malnutrition », souligne-t-il.

En tant qu’ambassadeur du Sénégal pour Afrifoodlinks, un programme dédié aux systèmes alimentaires durables, il milite pour une agriculture adaptée aux réalités africaines. « Le changement climatique accentue chaque année l’insécurité alimentaire. Mon rôle est de promouvoir et de plaider en faveur de systèmes alimentaires durables qui répondent aux spécificités du continent africain ».

Militant écologiste convaincu, il voit également dans la crise climatique une nouvelle forme d’injustice. « Ceux qui souffrent le plus du réchauffement climatique sont ceux qui y contribuent le moins », rappelle-t-il.

Un combat pour la liberté et les droits humains

Cette détermination à lutter contre les injustices dépasse les frontières du Sénégal. Membre du jury du Prix Liberté 2025, Abass Mbathie participe à une initiative mondiale qui récompense chaque année une personne ou une organisation engagée pour la paix et les droits humains.

Créé et porté par la Région Normandie, en partenariat avec l’Institut International des Droits de l’Homme et de la Paix, les Autorités Académiques et le réseau Canopé, le Prix Liberté est un dispositif pédagogique de sensibilisation à la liberté, à la paix et aux droits humains, ancré dans les valeurs portées par le Débarquement du 6 juin 1944.

Il invite les jeunes de 15 à 25 ans, en France et dans le monde, à désigner une figure emblématique du combat pour la liberté. La singularité de ce prix est qu’il implique la jeunesse à chaque étape, des propositions de candidats à la sélection du lauréat.

« À chaque violation des libertés fondamentales et des droits humains quelque part dans le monde, c’est notre humanité à tous qui est menacée. Être sélectionné pour faire partie de ce jury a une forte symbolique pour moi. C’est une opportunité précieuse de promouvoir la justice et d’inspirer d’autres jeunes à s’engager. », témoigne Abass.

L’Afrique, continent d’opportunités

Mais au-delà de ses actions, Abass Mbathie veut surtout inspirer une prise de conscience collective.

« Pour moi, chaque jeune adulte a un devoir envers sa communauté et doit se poser la question : “Que puis-je faire à mon échelle pour apporter un changement positif ?” Même un geste simple peut avoir un impact. C’est seulement dans cet effort collectif que nous pourrons réellement changer les choses.»

Pour Abass, l’Afrique ne doit pas être réduite aux défis qu’elle affronte. Son regard porte bien au-delà des crises et des difficultés : il voit en ce continent une terre d’opportunités, riche d’une jeunesse dynamique et inventive.

« L’Afrique est un continent jeune et riche. Trop souvent, on la perçoit à tort comme une terre de problèmes, alors qu’elle regorge de solutions et de potentiel. Les crises politiques, sécuritaires et sociales, aussi dévastatrices soient-elles, ont forgé une incroyable capacité de résilience, notamment chez les jeunes. Ils débordent de ressources, ils savent transformer les épreuves en opportunités. Nous avons de nombreux défis à relever, mais surtout, nous avons les moyens d’y faire face. Pour cela, il faut une volonté commune, une vision partagée. Il est impératif que les pays africains travaillent ensemble, main dans la main, pour bâtir des solutions régionales et continentales. Nous devons mutualiser nos forces. »

Mais pour qu’un véritable essor ait lieu, il est essentiel, selon lui, de miser sur la jeunesse et, plus particulièrement, sur l’autonomisation des femmes.

« Si nous voulons voir l’Afrique prospérer, il faut investir massivement dans l’autonomisation économique des jeunes, mais surtout, dans l’éducation et l’émancipation économique des femmes. Sans cela, nous n’y arriverons pas. »

Une autre condition essentielle pour l’avenir du continent repose sur un modèle de gouvernance plus proche des citoyens, axé sur la participation et la transparence.

« L’avenir de l’Afrique ne pourra s’écrire qu’avec une gouvernance transparente, inclusive et responsable. Trop souvent, les décisions sont déconnectées des réalités du terrain. Il faut replacer les citoyens au cœur des politiques publiques, répondre à leurs besoins concrets, en toute transparence. »

Malgré les difficultés, Abass Mbathie reste optimiste. Pour lui, un mouvement est en marche, porté par une nouvelle génération prête à s’engager pour transformer l’Afrique et, plus largement, le monde.

« Ce qui me donne espoir, c’est l’émergence d’une génération de jeunes leaders dans tous les domaines. On assiste à une prise de conscience grandissante des enjeux sociaux, environnementaux et économiques. De plus en plus de jeunes s’engagent pour le développement durable, pour des causes qui dépassent leur propre quotidien. C’est une dynamique forte, qui redonne espoir, non seulement pour l’Afrique, mais pour le monde entier. »

Loin des discours fatalistes, Abass Mbathie incarne cette jeunesse africaine qui croit en l’avenir et déterminée à ne plus être spectatrice de son destin, mais à le construire. Un avenir où l’injustice ne serait plus une fatalité, mais un combat à mener. Et surtout, à gagner.

 

Cet article Notre portrait d’un jeune sénégalais engagé, Abass Mbathie est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
https://mondafrique.com/societe/notre-portrait-dun-senegalais-engage-abass-mbathie/feed/ 0
Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique https://mondafrique.com/confidentiels/france/rejoignez-la-nouvelle-chaine-whattsapp-de-mondafrique/ Sun, 23 Mar 2025 03:18:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=107637 REJOIGNEZ LA CHAINE WHATTSAPP DE MONDAFRIQUE Mondafrique qui rentre dans sa onzième année d’existence le doit à ses fidèles lecteurs qui résident pour moitié en Europe (majoritairement en France, beaucoup au Canada) et pour moitié dans les pays du Maghreb (surtout en Algérie) , du Sahel (le Niger et le Mali en tète)  et du Moyen […]

Cet article Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
REJOIGNEZ LA CHAINE WHATTSAPP DE MONDAFRIQUE

Mondafrique qui rentre dans sa onzième année d’existence le doit à ses fidèles lecteurs qui résident pour moitié en Europe (majoritairement en France, beaucoup au Canada) et pour moitié dans les pays du Maghreb (surtout en Algérie) , du Sahel (le Niger et le Mali en tète)  et du Moyen Orient (notamment le Liban).

Avec quelques 300000 visiteurs par mois pour le site fondé en 2014, 35000 abonnés sur Instagram et 5000 fidèles de nos pages WhatsApp (Afrique, Liban, Niger, Gabon, Algérie, Maroc…etc), « Mondafrique » a imposé une vision pluraliste et originale en matière d’information sur le monde arabe et africain. Depuis le début des guerres en Ukraine et au Moyen Orient, nous ne nous interdisons pas d’accueillir des analyses sur les grands équilibres mondiaux qui ne peuvent pas manquer de se répercuter sur le mode africain et maghrébin. 

Notre positionnement critique vis à vis des pouvoirs en place, la diversité des contributeurs du site -journalistes, diplomates, universitaires ou simples citoyens-, la volonté enfin d’apporter des informations et des analyses qui tranchent avec la reste de la presse ont été nos seules lignes de conduite.  

Notre indépendance est totale.

Nous revendiquons une totale transparence. Deux hommes d’affaires et actionnaires du site, l’un mauritanien et l’autre libanais,  nous permettent de disposer de ressources pour faire vivre le site. Qu’ils en soient remerciés.

La seule publicité dont nous disposons est celle de Google

Le fondateur de Mondafrique, Nicolas Beau, contrôle l’actionnariat à hauteur de 60%, ce qui place notre media à l’abri de toutes les pressions.

Cet article Rejoignez la nouvelle chaine Whatsapp de Mondafrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
« Líbano: a flor do mundo »: la version brésilienne de « Je rève d’un Liban » https://mondafrique.com/loisirs-culture/la-version-bresilienne-de-je-reve-dun-liban/ Tue, 18 Mar 2025 17:52:59 +0000 https://mondafrique.com/?p=129928 En hommage à la désormais légendaire résilience libanaise, des artistes brésiliens transforment Je rêve d’un Liban de Wissam Tabet en Líbano: a flor do mundo, version brésilienne vibrante. Un projet musical solidaire qui célèbre l’identité et fait renaître l’espoir au-delà des frontières. Belinda Ibrahim, d’Ici Beyrouth Dans l’histoire des relations culturelles internationales, certaines connexions transcendent les distances géographiques. […]

Cet article « Líbano: a flor do mundo »: la version brésilienne de « Je rève d’un Liban » est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
En hommage à la désormais légendaire résilience libanaise, des artistes brésiliens transforment Je rêve d’un Liban de Wissam Tabet en Líbano: a flor do mundo, version brésilienne vibrante. Un projet musical solidaire qui célèbre l’identité et fait renaître l’espoir au-delà des frontières.

Belinda Ibrahim, d’Ici Beyrouth

Dans l’histoire des relations culturelles internationales, certaines connexions transcendent les distances géographiques. Celle qui unit le Liban et le Brésil est de celles-là, profonde et façonnée par des décennies de migrations et d’échanges. Avec plus de huit millions de citoyens d’origine libanaise, le Brésil abrite l’une des plus importantes diasporas libanaises au monde. Cette présence massive a tissé des liens indéfectibles entre les deux nations, créant un pont invisible mais puissant par-dessus l’Atlantique.

C’est sur ce terrain fertile qu’est née une initiative musicale singulière. La chanson Je rêve d’un Liban, composée par Wissam Tabet après la catastrophique explosion au port de Beyrouth en 2020, a trouvé un écho inattendu au Brésil. Ce chant, initialement créé avec des élèves du Collège des Saints-Cœurs Sioufi, captait l’âme d’une jeunesse libanaise assoiffée d’indépendance et de renouveau. Aujourd’hui, il renaît sous le titre Líbano: a flor do mundo (Liban : la fleur du monde), porté par les voix et les instruments de musiciens brésiliens renommés.

Miguel Mahfoud est l’architecte de cette métamorphose musicale. Sensible au destin du pays du Cèdre, il a orchestré une collaboration artistique ambitieuse. La traduction et l’adaptation du texte ont été confiées à Marco Aur, qui a su préserver l’essence du message original tout en l’habillant de sensibilités brésiliennes. “Nous avons voulu conserver l’âme de la composition originale tout en lui offrant une dimension nouvelle et inspirante”, confie Wissam Tabet, qui a suivi avec attention ce processus créatif transfrontalier.

Une symphonie de talents au service de la solidarité

Wissam Tabet est un pianiste, arrangeur et compositeur libanais qui est l’auteur de « je rève d’un Liban ».. Il a étudié à l’Université Saint-Esprit de Kaslik (USEK) et travaille en tant que freelance dans les domaines de l’orchestration et de la composition musicale

La force de ce projet réside dans l’engagement bénévole d’artistes brésiliens d’exception. Alexandre Andrés, André Mehmari, Benjamim Temponi, Carolina Claret, Leonardo Clementine, Chico Lobo, Guto Temponi, Juliana Brandão, Marco Aur, Tatá Sympa et le Trio Amaranto ont uni leurs talents pour donner corps à cette vision. Chacun a apporté sa couleur musicale, fusionnant subtilement les traditions libanaises avec les rythmes chaleureux du Brésil.

Tatá Sympa, maître d’œuvre de la direction musicale et du mixage, a veillé à ce que l’interprétation conserve la puissance émotionnelle de l’original. “La musique possède cette faculté unique de communiquer au-delà des barrières linguistiques. Notre version traduit à la fois la souffrance et l’indomptable espoir du peuple libanais”, explique-t-il avec passion.

Le visuel n’est pas en reste dans cette fresque artistique. Le photographe libanais Kamil Al-Rayes a généreusement partagé ses images saisissantes du Liban pour accompagner la musique. Ses photographies, témoins tantôt de la beauté intemporelle du pays, tantôt de ses cicatrices récentes, enrichissent considérablement la narration et ancrent l’œuvre dans une réalité tangible.

Cette création collective transcende le simple hommage. Elle incarne un acte de foi en l’avenir du Liban, pays meurtri par des crises successives – économiques, politiques et sociales. La musique devient ici un vecteur d’espérance, rappelant que la reconstruction passe aussi par le renforcement d’une identité nationale souvent mise à mal.

La diffusion de Líbano: a flor do mundo illustre parfaitement l’esprit du projet. Disponible gratuitement sur YouTube et Vimeo, relayée via les hashtags #libanoaflordomundo et #lebanonfloweroftheworld, la chanson circule librement sur les réseaux sociaux. Cette approche ouverte permet de toucher aussi bien la diaspora libanaise que le grand public brésilien et international, créant une chaîne de solidarité numérique.

Grande roue du Luna Park et la route de la corniche de Beyrouth la nuit, Rue du General De Gaulle, Manara, Ras Beyrouth, Beyrouth, Liban

Les paroles, bien que traduites en portugais, conservent la force évocatrice du texte original. Elles résonnent comme un appel à se souvenir, à se relever et à reconstruire. Un message particulièrement poignant dans un contexte où le Liban lutte quotidiennement pour préserver son unité et son identité face aux défis internes et externes.

Pour la communauté libanaise du Brésil, ce projet symbolise un pont entre leur terre d’accueil et leurs racines, une façon de contribuer à distance à la guérison de leur pays d’origine. “Nous avons tous un rôle à jouer pour préserver notre héritage et soutenir le Liban. La musique nous permet de rappeler à nos frères et sœurs libanais qu’ils ne sont pas seuls”, souligne Marco Aur avec émotion.

Le succès de cette initiative ouvre déjà la voie à d’autres collaborations similaires. Les artistes impliqués, touchés par cette expérience enrichissante, se tiennent prêts à poursuivre l’aventure et à étendre leur message de paix et d’unité.

Líbano: a flor do mundo illustre magnifiquement la manière dont l’art peut transcender les frontières pour créer des liens de solidarité authentiques. Dans les notes de cette mélodie voyageuse se dessine l’espoir d’un Liban qui, malgré les tempêtes, continue de fleurir et d’inspirer le monde. Une chanson née dans la douleur à Beyrouth, transformée au Brésil, et qui désormais appartient à tous ceux qui croient en la force inébranlable de l’esprit libanais.

Pour découvrir cette œuvre musicale franco-brésilienne et soutenir le message d’espoir qu’elle porte, la vidéo de Líbano: a flor do mundo est disponible sur YouTube.

YouTube: https://youtu.be/-yZASna0XjY?si=SBAWrA9LWqLJPyf4

 

Cet article « Líbano: a flor do mundo »: la version brésilienne de « Je rève d’un Liban » est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
La pratique du ramadan reste chez les jeunes une affirmation communautaire https://mondafrique.com/societe/la-pratique-du-ramadan-reste-une-affirmation-communautaire/ Wed, 05 Mar 2025 19:26:20 +0000 https://mondafrique.com/?p=129009 Le ramadan a débuté ce 1er mars et durera trente jours consécutifs, rappelle l’excellent site « The Conversation ». Chez les jeunes de moins de 25 ans, le ramadan est souvent vécu comme un défi personnel, mais aussi comme un moyen d’affirmer son appartenance à une collectivité. Cette pratique religieuse est devenue un moment spirituel. Les défis physiques […]

Cet article La pratique du ramadan reste chez les jeunes une affirmation communautaire est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Le ramadan a débuté ce 1er mars et durera trente jours consécutifs, rappelle l’excellent site « The Conversation ». Chez les jeunes de moins de 25 ans, le ramadan est souvent vécu comme un défi personnel, mais aussi comme un moyen d’affirmer son appartenance à une collectivité. Cette pratique religieuse est devenue un moment spirituel. Les défis physiques que représente le jeûne constituent, pour les jeunes musulmans rencontrés, une occasion d’un vivre ensemble recouvré.

Djamel Bentrar, Laboratoire CETAPS à l’Université de Rouen, Le Mans Université

Omar Zanna, Sociologue, Le Mans Université

(…) Malgré l’ampleur de la littérature portant sur l’aire culturelle arabo-musulmane, le rite et les rituels du ramadan demeurent peu étudiés. Les spécialistes de l’islam et des arabistes abondent en descriptions des aspects spirituels du jeûne, de ses vertus, de ses enseignements et de ses règles. Néanmoins, ces écrits s’attardent peu sur la relation entre les prescriptions religieuses du ramadan et sa pratique effective, et ils ne le considèrent pas en tant que phénomène social participant à la cohésion communautaire.

Dans le cadre d’une enquête (auprès d’étudiants, ouvriers, demandeurs d’emploi, cadres, chercheurs) menée dans une ville de l’ouest de la France durant les mois du ramadan de 2022, de 2023 et de 2024, nous avons voulu tester l’hypothèse suivante : le ramadan est une expérience d’ascétisme individuel, fait de privations consenties, mais aussi un rite annuel rendant possible l’identification, l’altérité et la compréhension d’autrui.

En France, les musulmans issus de l’immigration pratiquent le ramadan, parfois avec des aménagements. Les aspects religieux et sociaux sont présents, mais sont souvent adaptés au contexte de vie. Pour les personnes rencontrées dans le cadre de notre enquête, le ramadan constitue un moment crucial, car il renforce des facettes de l’identité atténuées le reste de l’année. Lors de cette période, la spiritualité, les traditions, le lien avec le pays d’origine (sous forme d’échanges en visio ou par téléphone avec la famille ou les amis, notamment après la rupture du jeûne) ou les tenues vestimentaires sont davantage pris en compte.

Une pratique différente entre les jeunes et les aînés

Sur le plan générationnel, ce mois se distingue par un rapport différencié à la tradition : les aînés insistent sur le respect strict (heures de jeûne, prières), tandis que les jeunes valorisent l’intention « niyya » et la solidarité envers les plus démunis tels que les SDF ou les sans-papiers.

Au-delà des observations menées lors de notre enquête, des études montrent que le temps du ramadan renforce les liens sociaux. En France, ce sont surtout les associations musulmanes qui assurent cette dimension : organisations de veillées de manifestations culturelles, distributions de repas aux personnes seules ou dans le besoin. Tout cela joue un rôle important dans l’affirmation de l’identité et participe souvent au maintien de l’attachement aux traditions du pays d’origine. Cette intensification des liens apporte un confort psychique et permet, pour les plus nostalgiques, d’adoucir le sentiment d’exil.

Les jeunes musulmans français, quand bien même ils ne sont pas particulièrement religieux le reste de l’année, observent massivement le jeûne. Ce moment se distingue par son adaptation au contexte laïc notamment à travers les iftars publics (ruptures du jeûne) organisés par les associations et les mosquées des quartiers. Ces initiatives sont souvent organisées en invitant des représentants d’autres religions.

Solidarité et empathie

Au cours de nos entretiens, la dimension morale est systématiquement soulignée. Comme le note Boumedien, tout se passe comme si jeûner permettait de ressentir ce que les autres ressentent, notamment en faisant preuve d’empathie à l’égard des pauvres qui souffrent de faim :

« Le ramadan, c’est un moment de compassion, un mois durant lequel je dois penser à tous ceux qui n’ont pas à manger, à tous ceux qui sont dans le besoin. C’est une épreuve qui me permet de savoir ce que signifie d’avoir faim. »

Les relations interpersonnelles et le respect revêtent aussi une grande importance pour les jeûneurs, puisque tout ce qui pourrait nuire à autrui doit être ainsi évité : faire du tort, mentir, médire sur quelqu’un, nourrir des pensées haineuses, etc.

À cet égard, Abdelkader souligne le sentiment de communauté et de solidarité que lui procure cet ascétisme collectif au nom du divin :

« J’ai un respect fou pour ceux qui tiennent le jeûne. C’est un truc qu’on vit tous ensemble. On se soutient, on se motive… Y’a pas de jugement. »

Ce rite dépasse la simple abstention alimentaire. Il permet aussi le détournement des préoccupations matérielles et des distractions quotidiennes. Cela crée un espace pour une connexion avec soi-même et une résonance avec les autres. En tant qu’expérience symbolique (au sens étymologique de « signe de reconnaissance »), ce mois agit à la manière d’une « colle sociale » favorisant la solidarité autour de valeurs communes de sacrifice et de compassion, renforçant la réflexion spirituelle.

C’est en ce sens qu’il faut comprendre les propos de Fatima :

« La période du ramadan revêt une importance capitale dans ma vie… tant sur le plan spirituel que personnel. C’est un mois consacré à la réflexion, à la discipline et à la connexion avec Dieu. Le jeûne durant ce mois sacré me permet de renforcer ma foi, de purifier mon esprit et de me rapprocher davantage de la communauté musulmane. »

Ces témoignages peuvent être interprétés à l’aune du concept de la « sacralité », élément clé dans la sociologie de la religion. Selon le philosophe Rudolf Otto, la sacralité est une expérience qui se situe au-delà de la rationalité puisqu’elle relève de l’incommensurable. C’est à partir de cette acception qu’il faut comprendre la période du ramadan, c’est-à-dire comme un temps voué à des pratiques spirituelles spécifiques.

Cette même enquêtée insiste plus loin dans l’entretien sur l’aspect communautaire et solidaire de ce mois sacré, d’où l’expression « On est tous dans le même bateau ». En un mot, les personnes interrogées disent que le jeûne lié au ramadan ne correspond pas à une simple privation temporaire, mais tout autant, et peut-être plus encore, à une expérience partagée.

Rite de passage à l’âge adulte

Cette pratique, bien plus qu’une simple abstention, engendre une expérience socialisante, axée sur le partage de la difficulté et de l’abstinence. Les personnes rencontrées ont partagé des récits illustrant comment le jeûne est une occasion unique où l’expérience collective de l’ascétisme transcende la sphère intime pour embrasser une dimension intersubjective. Le ramadan se révèle aussi comme un « rite de passage » significatif pour de nombreux individus – surtout les adolescents – marquant, par cette séquence, leur entrée dans l’âge adulte.

Ainsi, au-delà de la faim, de la soif, de la discipline et de la maîtrise de ses pulsions, le ramadan symbolise un rendez-vous annuel qui, pour beaucoup, est un mois de communion, de compassion envers les plus en difficulté et favorise la réflexion sur soi parmi les autres. Ce moment sacré contribue, certes, au respect des différences, mais peut-être davantage à la reconnaissance des ressemblances.

Cet article La pratique du ramadan reste chez les jeunes une affirmation communautaire est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Côte d’Ivoire, les écrivains réclament plus de soutien de l’Etat https://mondafrique.com/societe/cote-divoire-les-ecrivains-reclament-plus-de-soutien-de-letat/ Wed, 26 Feb 2025 04:00:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=128352 Auteur d’une trentaine de livres composée de poésie, de romans, de théâtre, de chroniques et d’essais, Josué Guébo sait de quoi il parle lorsqu’il évoque la vie sociale de l’écrivain en Côte d’Ivoire. Il est d’ailleurs le président honoraire de l’Association des écrivains de Côte d’Ivoire (AECI) et du Cercle d’études Séry Bailly (CESB), du […]

Cet article Côte d’Ivoire, les écrivains réclament plus de soutien de l’Etat est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Auteur d’une trentaine de livres composée de poésie, de romans, de théâtre, de chroniques et d’essais, Josué Guébo sait de quoi il parle lorsqu’il évoque la vie sociale de l’écrivain en Côte d’Ivoire. Il est d’ailleurs le président honoraire de l’Association des écrivains de Côte d’Ivoire (AECI) et du Cercle d’études Séry Bailly (CESB), du nom d’un universitaire ivoirien décédé en décembre 2018.

Dans cet entretien accordé à Mondafrique, Josué Guébo, par ailleurs Maître de Conférences au Département de philosophie de l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan et lauréat de nombreux prix littéraire, dont celui de Tchicaya U Tam’si pour la poésie africaine (2014), le Grand prix national de littérature Bernard Dadié (2016) et le Prix Jeanne de Cavally pour la littérature enfantine (2023), revient sur les conditions de vie et de travail de l’écrivain ivoirien. Il en appelle à plus de soutien de la part de l’Etat.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Les assises de l’Association des écrivains de Côte d’Ivoire (AECI) consacrées aux conditions de vie de vos collègues écrivains ont eu lieu le samedi 22 février ici à Abidjan. Et selon votre contribution, il y a urgence. Pouvez-vous nous décrire les conditions de vie actuelles des écrivains ivoiriens ?

Disons-le tout net, la réalité de l’écrivain ivoirien n’est pas du tout reluisante. Tous ceux de la communauté des hommes de plumes qui ne tirent pas le diable par la queue, sont nécessairement ceux qui ont d’autres fonctions dans la vie que le métier de la plume. 

N’est-ce pas parce que le marché du livre est compliqué et que les Ivoiriens ne lisent pas assez ?

Qui dit que les Ivoiriens ne lisent pas ? À mon avis, ils lisent. Peut-être pas suffisamment, mais on voit bien qu’ils sont intéressés par tout ce qui s’écrit sur les réseaux sociaux. Pour moi, la faiblesse du rapport de l’Ivoirien au livre provient principalement du regard dépréciatif que les pouvoirs publics ont sur les choses culturelles en général, et sur le livre en particulier. Il y a ici une confusion grave entre le culturel et le spectaculaire. Ce qui est valorisé ici, ce n’est pas la patiente quête de connaissance qu’implique le rapport au livre, mais la promotion du cosmétique. Nous sommes dans une culture d’un matérialisme bricolé. La question de la complexité de la chaîne du livre en découle. Le problème, c’est aussi la vision que nos gouvernants ont du livre. Ils ont l’air de comprendre que la route précède le développement, mais ils n’ont pas l’air de réaliser que le livre, lui précède la route, car sans livre, pas d’ingénieur pour concevoir la route. 

Alors, parlez-nous de la complexité de la chaîne du livre et à quel point cela explique-t-il le désespoir des écrivains ivoiriens ?

Ce que l’on peut considérer comme une complexité, bien qu’elle n’en soit pas une, en réalité, c’est ce jeu de la très inégale répartition des bénéfices entre les acteurs de la chaîne du livre. Cette répartition fait des auteurs, les parents pauvres de tout le dispositif du livre.  Le livre, ici, ne nourrit pas son homme, mais son ombre. Ceux que j’appelle « l’ombre », ce sont les maillons connexes à l’écrivain dans la chaîne du livre : le libraire, l’éditeur, l’imprimeur. La plupart des éditeurs reversent entre 3% et 5% de la valeur d’un livre à l’auteur. Les plus humains vont parfois à 10%. Sur un livre qui coûte 3000 FCFA, donc l’auteur a en moyenne, 150 f CFA, là où l’éditeur, l’imprimeur et le libraire se partagent les 2850. Ce qui fait qu’aucun de ces trois n’a individuellement moins de 800 FCFA sur ce montant. Voici la réalité de l’écrivain. Cette réalité est portée par l’idée fallacieuse que l’effort intellectuel est un capital économique quasi-nul. 

Qu’a fait votre association pour que les choses changent et quel rôle, à votre avis, l’Etat doit-il jouer pour améliorer les conditions de vie des écrivains ?

L’AECI qui aura 40 ans, l’année prochaine, précisément le 31 août 2026, mobilise les auteurs, les défend dans la mesure de ses possibilités et sensibilise sur la nécessité de valoriser les livres et les auteurs. L’un des combats réussis par l’AECI, c’est d’avoir permis une plus grande introduction des auteurs locaux au sein du programme scolaire national. Sur ce point nous voulons sincèrement saluer l’excellence de la coopération avec le ministère de l’éducation nationale qui a permis que les auteurs nationaux soient de plus en plus étudiés dans les écoles.

Mais le chantier, d’une valorisation des conditions de vie des créateurs de l’écrit reste encore en friche. Depuis 40 ans, les militants du livre en Côte d’Ivoire, œuvrent – sans réclamer de médailles – (rires) pour que les écrivains soient mieux traités. Il y va de la santé intellectuelle, voire mentale de ce pays. Nous proposons donc qu’une fois l’an, l’Etat de Côte d’Ivoire lève 250 FCFA sur les salaires de 260 000 fonctionnaires que compte ce pays. Tous les fonctionnaires sont redevables au livre, car passés par l’école. Une telle mesure permettra d’appuyer à hauteur de 65 millions l’Association des Ecrivains de Côte d’Ivoire. Nous suggérons, par ailleurs, que 1% des recettes générées par le Salon du Livre d’Abidjan soit reversé aux écrivains, à travers leur association et que de même soit reversé à l’AECI 1% du bénéfice annuel des librairies. Le BURIDA pourrait être chargé de la collecte et de la répartition de cette somme. Cela permettrait de redynamiser considérablement la chaîne du livre en Côte d’Ivoire.

Maintenant, en tant qu’écrivain, que pouvez-vous faire pour vous valoriser ? Les écrivains ivoiriens sont rarement reçus aux prix internationaux. N’y a-t-il pas réellement un problème de talents ?

Nous n’avons aucun problème de talent. Je ne sais pas quel prix Senghor, Césaire ou Damas ont remporté pour être les auteurs de portée et de résonance universelle que nous connaissons tous. Il faut déjà savoir que l’écrivain n’est pas un chasseur de primes. Sortons du complexe de la marchandise. Les prix conviennent mieux aux produits d’étalage. Par ailleurs, rien ne garantit que les prix soient vraiment le seul gage d’excellence. Il y a les colloques, mais aussi la somme de travaux universitaires sur une œuvre qui peuvent valablement témoigner de sa maturité et de son excellence.  Cela dit, il est absolument inexact d’affirmer que les auteurs Ivoiriens sont rarement reçus aux prix internationaux. Le premier Grand Prix littéraire d’Afrique Noire, Aké Loba, est Ivoirien. D’autres lui ont emboîté le pas : Bernard Dadié, Jean-Marie Adiaffi, Véronique Tadjo, Venance Konan.

Oui, mais ça date tout ça…

Aujourd’hui Armand Gauz, caracole : il a remporté, à lui tout seul, le Grand Prix littéraire d’Afrique noire, le Prix Ethiophile et d’autres prix internationaux d’amplitude significative. À titre personnel, j’ai remporté le très sélectif Tchicaya U Tam’si, un prix attribué sous l’égide de l’UNESCO et que j’ai obtenu au même titre que René Depestre, né en 1926, Edouard Maunick, né en 1931 et Jean-Baptiste Tati-Loutard, né en 1938.  Lamine Sall, né en 1951 et primé par l’académie française, l’a obtenu juste après moi et l’immense poète Paul Dakeyo, né en 1948, vient à peine de l’avoir.

Alors, dans cette chaîne, il n’y a que l’Etat qui ne répond pas aux attentes ?

A part l’Etat, il y a, à mon avis, les critiques littéraires et les éditeurs : les uns par leur absence et les autres par leur extrême permissivité plombent la qualité générale du livre produit en Côte d’Ivoire.

Ne resterait plus que votre exposition. Est-ce qu’il faut suffisamment d’infrastructures du livre, par exemple les bibliothèques dans chaque commune et des émissions consacrées aux livres dans les médias ?

Absolument. Les bibliothèques manquent cruellement. Même dans les établissements académiques. La politique du livre est beaucoup trop événementielle pour l’instant. Le Salon du Livre est une chose excellente, mais c’est une comète annuelle. Ce qu’il importe de faire vivre ce sont des bibliothèques en nombre au moins égal aux dispensaires et centre de santé de proximité. C’est une question de santé intellectuelle. La place du livre dans les médias est tout à fait problématique. Il n’y a jamais eu dans ce pays, un espace médiatique réservé au livre qu’on ait pu comparer aux plages faites à la musique et à la danse. La culture en Côte d’Ivoire a valorisé Podium et Variétoscope, la musique et la danse. Aujourd’hui, nous sommes reconnus, dans ces domaines, à l’international en étant le pays d’Alpha Blondy, de Meiway et de DJ Arafat. Pour la danse, on n’en compte plus les variantes : zouglou, coupé décalé, Gnakpa, Cacher-regarder et j’en passe. Le théâtre porté aussi à l’écran un temps a porté ses fruits : les humoristes en terre d’Éburnie ne se comptent plus. Si l’Etat avait valorisé le livre comme, il a promu la musique et la danse, il est clair que la littérature ivoirienne s’en porterait mieux. Malheureusement, la Côte d’Ivoire a conditionné ces fils à préférer le Kpankaka (mot popularisé par une influenceuse ivoirienne pour exprimer des choses vulgaires, NDLR) à Climbié. Et c’est un problème. Mais il peut encore aujourd’hui être résolu. Il suffit d’amplifier la place des activités littéraires dans le champ de nos médias audiovisuels en particulier.

Ne songez-vous pas parfois, à votre niveau, à faire du lobbying auprès des décideurs institutionnels, médiatiques ou même scolaires ?

J’ai évoqué à l’instant la collaboration qui a permis une plus grande insertion des ouvrages des auteurs ivoiriens dans le programme scolaire. C’est dire que nous ne restons pas les bras croisés. Nous organisons des caravanes et incitons tous nos confrères à s’activer au sein des établissements scolaires et en dehors de ceux-ci. C’est chose faite. Nous sommes en mouvement. Mais tout ceci reste perfectible.

 

Cet article Côte d’Ivoire, les écrivains réclament plus de soutien de l’Etat est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
« Pépites jaunes », des essais incisifs et érudits sur l’Afrique https://mondafrique.com/confidentiels/pepites-jaunes-des-essais-incisifs-et-erudits-sur-lafrique/ Mon, 24 Feb 2025 17:55:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=128242 En créant « Pépites jaunes », la maison d’édition Riveneuve lance une nouvelle collection de poche dirigée par l’écrivain et sociologue Elgas. Des essais incisifs et érudits, une esthétique soignée, une ambition universelle, une véritable invitation à la réflexion critique et à la controverse constructive, engagée, affûtée, sans concession. La maison d’édition Riveneuve annonce le […]

Cet article « Pépites jaunes », des essais incisifs et érudits sur l’Afrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
En créant « Pépites jaunes », la maison d’édition Riveneuve lance une nouvelle collection de poche dirigée par l’écrivain et sociologue Elgas. Des essais incisifs et érudits, une esthétique soignée, une ambition universelle, une véritable invitation à la réflexion critique et à la controverse constructive, engagée, affûtée, sans concession.

La maison d’édition Riveneuve annonce le lancement de Pépites jaunes, une collection de poche dirigée par l’écrivain et sociologue Elgas. Ce projet éditorial, qui sera présenté au Salon du livre africain le 15 mars et au Festival du livre de Paris du 11 au 13 avril, ambitionne d’ouvrir de nouveaux espaces de réflexion critique. À travers des essais courts, incisifs et érudits, Pépites jaunes se veut un laboratoire intellectuel où la controverse des idées rencontre l’exigence du débat courtois.

Deux premiers titres annonciateurs

Pour inaugurer cette collection, Riveneuve publie deux essais qui reflètent parfaitement l’esprit de Pépites jaunes :

Enterrer Sankara. Essai sur les économies africaines, de Joël Té-Léssia Assoko, avec une préface de Pierre Haski (En librairie le 27 mars 2025).
Ce texte analyse les trajectoires économiques du continent africain à la lumière de l’héritage de Thomas Sankara. Il interroge la viabilité des modèles de développement et explore les contradictions des politiques économiques postcoloniales.

L’Afrique contre la démocratie. Mythes, déni et péril, d’Ousmane Ndiaye, avec une préface de Sophie Bessis (En librairie le 5 juin 2025).
Dans cet essai percutant, l’auteur déconstruit les discours dominants sur la démocratie en Afrique et met en lumière les dynamiques de résistance, d’appropriation et de détournement des modèles politiques importés.

Ces premiers ouvrages donnent le ton : engagement intellectuel, analyse rigoureuse et volonté de bousculer les idées reçues.

Une collection qui bouscule les certitudes

Derrière Pépites jaunes, une ambition claire : celle de renouveler le regard sur les grandes questions contemporaines en confrontant les savoirs établis à des perspectives nouvelles. La collection explore des thématiques variées, allant de la philosophie à l’économie, en passant par la sociologie et les sciences humaines.

Selon Elgas, cette initiative vise à « brosser une sorte d’inventaire pour aller vers plus de complexité », sans se limiter à un cadre strictement académique. Loin de tout dogmatisme, les essais publiés dans Pépites jaunes proposent des analyses tranchantes, accessibles mais rigoureuses, qui osent la friction intellectuelle.

Le projet défend une approche transversale, favorisant le dialogue entre disciplines et continents. Si l’Afrique constitue son point d’ancrage, la collection n’hésite pas à explorer d’autres territoires de pensée, revendiquant une démarche ouverte sur l’universel.

Confrontation des idées et quête d’espérance

Dans un paysage intellectuel souvent polarisé, Pépites jaunes fait le pari d’une pensée critique qui refuse les clivages stériles. La collection s’autorise la frontalité du débat, tout en prônant la courtoisie et la civilité des échanges.

« L’âpreté n’exclut pas la nuance », souligne Elgas. La démarche ne cherche ni la polémique gratuite ni l’agressivité rhétorique, mais elle assume pleinement la controverse comme moteur de réflexion. Loin d’une vision fataliste, Pépites jaunes revendique aussi une forme d’optimisme en proposant des grilles de lecture neuves, en formulant des pistes de transformation sociale et en ouvrant des horizons plutôt qu’en figeant les diagnostics.

Une invitation à repenser l’universel

Si l’Afrique est au cœur de la collection, Pépites jaunes se veut avant tout une plateforme de réflexion débarrassée de toute verticalité hégémonique. Le projet refuse les cloisonnements et s’ouvre aux problématiques globales, explorant les tensions entre particularismes et universalismes.

Ce positionnement tranche avec une tendance éditoriale qui, souvent, enferme les penseurs africains dans des cadres prédéfinis. Ici, pas de regard condescendant ni de mise à l’écart sous prétexte d’une prétendue singularité culturelle. L’objectif est de donner toute sa place à une pensée africaine capable de dialoguer avec le reste du monde sans être réduite à une périphérie intellectuelle.

Vers une nouvelle cartographie du savoir

Avec Pépites jaunes, Riveneuve ne se contente pas d’ajouter une nouvelle collection à son catalogue, elle initie un mouvement éditorial ambitieux, destiné à ouvrir des brèches dans les discours établis.

En misant sur des textes courts mais percutants, accessibles mais exigeants, la collection entend capter un lectorat avide de pensée vivante, refusant les dogmes et les évidences. Son esthétique, alliant l’épure du kraft jaune et la finesse des gravures de France Dumas, renforce cette volonté de créer des objets éditoriaux qui marquent autant par leur fond que par leur forme.

Avec les premières publications prévues dès mars 2025, Pépites jaunes s’apprête à secouer le monde des idées !

 

Cet article « Pépites jaunes », des essais incisifs et érudits sur l’Afrique est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>
Les forçats de l’Intelligence Artificielle dans les pays du Sud https://mondafrique.com/societe/les-forcats-de-lintelligence-artificielle-dans-les-pays-du-sud/ Fri, 14 Feb 2025 06:14:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=90665 Il n’y a pas que des robots derrière l’intelligence artificielle (IA) : en bout de chaîne, on trouve souvent des travailleurs des pays du sud. Récemment une enquête du Time révélait que des travailleurs kényans payés moins de trois euros de l’heure étaient chargés de s’assurer que les données utilisées pour entraîner ChatGPT ne comportaient pas de contenu à caractère […]

Cet article Les forçats de l’Intelligence Artificielle dans les pays du Sud est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>

Il n’y a pas que des robots derrière l’intelligence artificielle (IA) : en bout de chaîne, on trouve souvent des travailleurs des pays du sud. Récemment une enquête du Time révélait que des travailleurs kényans payés moins de trois euros de l’heure étaient chargés de s’assurer que les données utilisées pour entraîner ChatGPT ne comportaient pas de contenu à caractère discriminatoire.

Les modèles d’IA ont en effet besoin d’être entraînés, en mobilisant une masse de données extrêmement importante, pour leur apprendre à reconnaître leur environnement et à interagir avec celui-ci. Ces données doivent être collectées, triées, vérifiées et mises en forme. Ces tâches chronophages et peu valorisées sont généralement externalisées par les entreprises technologiques à une foule de travailleurs précaires, généralement situés dans les pays des suds.

Ce travail de la donnée prend plusieurs formes, en fonction des cas d’usage de l’algorithme final, mais il peut s’agir par exemple d’entourer les personnes présentes sur les images capturées par une caméra de vidéosurveillance, pour apprendre à l’algorithme à reconnaître un humain. Ou encore corriger manuellement les erreurs produites par un modèle de traitement automatique de factures.

Nous proposons, à travers une enquête menée entre Paris et Antananarivo, capitale de Madagascar, de nous pencher sur l’identité de ces travailleurs de la donnée, leurs rôles et leurs conditions de travail, et de proposer des pistes pour enrichir les discussions autour de la régulation des systèmes d’IA.

L’intelligence artificielle, une production mondialisée

Nos recherches appuient l’hypothèse que le développement de l’intelligence artificielle ne signifie pas la fin de travail due à l’automation, comme certains auteurs l’avancent, mais plutôt son déplacement dans les pays en voie de développement.

Notre étude montre aussi la réalité de « l’IA à la française » : d’un côté, les entreprises technologiques françaises s’appuient sur les services des GAFAM pour accéder à des services d’hébergement de données et de puissance de calcul ; d’un autre côté les activités liées aux données sont réalisées par des travailleurs situés dans les ex-colonies françaises, notamment Madagascar, confirmant alors des logiques déjà anciennes en matière de chaînes d’externalisation. La littérature compare d’ailleurs ce type d’industrie avec le secteur textile et minier.

Un constat initial a guidé notre travail d’enquête : les conditions de production de l’IA restent mal connues. En nous appuyant sur des recherches antérieures sur le « travail numérique » (digital labour), nous avons cherché à comprendre où et comment sont façonnés les algorithmes et les jeux de données nécessaires à leurs entraînements ?

Intégrés au sein du groupe de recherche Digital Platform Labor, notre travail consiste à analyser les relations d’externalisation entre entreprises d’intelligence artificielle françaises et leurs sous-traitants basés dans les pays d’Afrique francophone et à dévoiler les conditions de travail de ces « travailleurs de la donnée » malgaches, devenus essentiels au fonctionnement des systèmes intelligents.

Notre enquête a débuté à Paris en mars 2021. Dans un premier temps, nous avons cherché à comprendre le regard que les entreprises françaises productrices d’IA entretenaient sur ces activités liées au travail de la donnée, et quels étaient les processus mis en œuvre pour assurer la production de jeux de données de qualité suffisante pour entraîner les modèles.

Le lac Anosy Central à Antananarivo, capital de Madagascar. Sascha Grabow/Wikipedia, CC BY

Nous nous sommes ainsi entretenus avec 30 fondateurs et employés opérant dans 22 entreprises parisiennes du secteur. Un résultat a rapidement émergé de ce premier travail de terrain : le travail des données est dans sa majorité externalisé auprès de prestataires situés à Madagascar.

Les raisons de cette concentration des flux d’externalisation vers Madagascar sont multiples et complexes. On peut toutefois mettre en avant le faible coût du travail qualifié, la présence historique du secteur des services aux entreprises sur l’île, et le nombre élevé d’organisations proposant ces services.

Lors d’une seconde partie de l’enquête d’abord menée à distance, puis sur place à Antananarivo, nous nous sommes entretenus avec 147 travailleurs, managers, et dirigeants de 10 entreprises malgaches. Nous avons dans le même temps diffusé un questionnaire auprès de 296 travailleurs des données situés à Madagascar.

Les emplois du numérique : solution précaire pour jeunes urbains éduqués

Dans un premier temps, le terrain révèle que ces travailleurs des données sont intégrés à un secteur plus large de production de service aux entreprises, allant des centres d’appels à la modération de contenu web en passant par les services de rédaction pour l’optimisation de la visibilité des sites sur les moteurs de recherche.

Les données du questionnaire révèlent que ce secteur emploie majoritairement des hommes (68 %), jeunes (87 % ont moins de 34 ans), urbains et éduqués (75 % ont effectué un passage dans l’enseignement supérieur).

Quand ils évoluent au sein de l’économie formelle, ils occupent généralement un poste en CDI. La moindre protection offerte par le droit du travail malgache comparée au droit du travail français, la méconnaissance des textes par les travailleurs, et la faiblesse des corps intermédiaires (syndicats, collectifs) et de la représentation en entreprise accentuent néanmoins la précarité de leur position. Ils gagnent en majorité entre 96 et 126 euros par mois, avec des écarts de salaires significatifs, jusqu’à 8 à 10 fois plus élevés pour les postes de supervision d’équipe, également occupés par des travailleurs malgaches situés sur place.

Ces travailleurs sont situés à l’extrémité d’une longue chaîne d’externalisation, ce qui explique en partie la faiblesse des salaires de ces travailleurs qualifiés, même au regard du contexte malgache.

La production de l’IA implique en effet trois types d’acteurs : les services d’hébergement de données et de puissance de calcul proposés par les GAFAM, les entreprises françaises qui vendent des modèles d’IA et les entreprises qui proposent des services d’annotations de données depuis Madagascar, chaque intermédiaire captant une partie de la valeur produite.

Ces dernières sont de plus généralement très dépendantes de leurs clients français, qui gèrent cette force de travail externalisée de manière quasi directe, avec des postes de management intermédiaire dédiés au sein des start-up parisiennes.

L’occupation de ces postes de direction par des étrangers, soit employés par les entreprises clientes en France, soit par des expatriés sur place, représente un frein important aux possibilités d’évolution de carrière offertes à ces travailleurs, qui restent bloqués dans les échelons inférieurs de la chaîne de valeur.

Des entreprises qui profitent des liens postcoloniaux

Cette industrie profite d’un régime spécifique, les « zones franches », institué en 1989 pour le secteur textile. Dès le début des années 1990, des entreprises françaises s’installent à Madagascar, notamment pour des tâches de numérisation liées au secteur de l’édition. Ces zones, présentes dans de nombreux pays en voie de développement, facilitent l’installation d’investisseurs en prévoyant des exemptions d’impôts et de très faibles taux d’imposition.

Aujourd’hui, sur les 48 entreprises proposant des services numériques dans des zones franches, seulement 9 sont tenues par des Malgaches, contre 26 par des Français. En plus de ces entreprises formelles, le secteur s’est développé autour d’un mécanisme de « sous-traitance en cascade », avec, à la fin de la chaîne des entreprises et entrepreneurs individuels informels, moins bien traités que dans les entreprises formelles, et mobilisés en cas de manque de main-d’œuvre par les entreprises du secteur.

En plus du coût du travail, l’industrie de l’externalisation profite de travailleurs bien formés : la plupart sont allés à l’université et parlent couramment le français, appris à l’école, par Internet et à travers le réseau des Alliances françaises. Cette institution d’apprentissage du français a été initialement créé en 1883 afin de renforcer la colonisation à travers l’extension de l’utilisation de la langue du colonisateur par les populations colonisées.

Ce schéma rappelle ce que le chercheur Jan Padios désigne comme le « colonial recall ». Les anciens pays colonisés disposent de compétences linguistiques et d’une proximité culturelle avec les pays donneurs d’ordres dont bénéficient les entreprises de services.

Rendre visibles les travailleurs de l’intelligence artificielle

Derrière l’explosion récente des projets d’IA commercialisés dans les pays du nord, on retrouve un nombre croissant de travailleurs de la donnée. Alors que la récente controverse autour des « caméras intelligentes », prévues par le projet de loi relatif aux Jeux olympiques de Paris, s’est principalement focalisée sur les risques matière de surveillance généralisée, il nous semble nécessaire de mieux prendre en compte le travail humain indispensable à l’entraînement des modèles, tant il soulève de nouvelles questions relatives aux conditions de travail et au respect de la vie privée.

Rendre visible l’implication de ces travailleurs c’est questionner des chaînes de production mondialisées, bien connues dans l’industrie manufacturière, mais qui existent aussi dans le secteur du numérique. Ces travailleurs étant nécessaires au fonctionnement de nos infrastructures numériques, ils sont les rouages invisibles de nos vies numériques.

C’est aussi rendre visible les conséquences de leur travail sur les modèles. Une partie des biais algorithmiques résident en effet dans le travail des données, pourtant encore largement invisibilisé par les entreprises. Une IA réellement éthique doit donc passer par une éthique du travail de l’IA.

 

Cet article vous a-t-il éclairé ?

A The Conversation, nous sommes convaincus que nous pouvons faire reculer les idées reçues et les raccourcis intellectuels en publiant des analyses basées sur la recherche. Si vous le pouvez, faites un don mensuel pour nous soutenir dans notre démarche.

Fabrice Rousselot Directeur de la rédaction
 
 

Cet article Les forçats de l’Intelligence Artificielle dans les pays du Sud est apparu en premier sur Mondafrique.

]]>