Leur jugement qui a lieu à huis clos à Abidjan concerne onze gendarmes dont l’ancien patron de la cellule anti drogue du port autonome. Ils sont accusés d’avoir détourné et revendu 200 kg de drogue sortis d’un bloc de 1,56 tonne saisis en 2021.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
C’est un scandale de plus dans le ciel ivoirien et il éclabousse une fois de plus la gendarmerie nationale. Onze gendarmes ivoiriens dont le patron de la cellule anti drogue du port autonome d’Abidjan sont en effet jugés actuellement à huis clos par le tribunal correctionnel d’Abidjan pour avoir détourné 200 kg de cocaïne qu’ils ont frauduleusement soustrait de 1,56 tonne de drogue brut d’une valeur de 25 milliards saisie en 2021 et présentée à la presse avec une certaine fierté par les autorités ivoiriennes.
Cette énorme quantité de cocaïne acheminée en Côte d’Ivoire à partir du Paraguay avait été découverte au cours d’une perquisition réalisée dans le quartier chic de Cocody par la cellule antidrogue du port d’Abidjan au domicile d’« Ali le douanier », un ancien sous-officier des douanes ivoiriennes facilement interpellé grâce à un indic. Depuis trois ans, « Ali le douanier » est incarcéré à la maison d’arrêt d’Abidjan après avoir été jugé et reconnu coupable du rôle clé qu’il a joué dans ce vaste trafic.
Un procès à huis clos
Cinq autres dont le périmètre d’intervention va au-delà des frontières de la zone portuaire et s’étend dans tout le sud d’Abidjan sont également dans le box avec deux « indics » accusés de revendre de la drogue. L’instruction préliminaire a permis de mettre en lumière les liens entre les gendarmes de la cellule et les revendeurs, petits ou grands, en dehors de tout cadre. Selon une source judiciaire, ils avaient une organisation bien structurée qui leur permettait de faire du stock et de vendre.
Si ce procès ouvert récemment embarrasse les autorités ivoiriennes, c’est parce qu’Abidjan a la réputation d’être un point de passage d’un des plus importants trafics de drogue opérés entre l’Amérique latine et l’Europe. Parmi les gendarmes, il y a l’ancien patron de la cellule anti drogue du port d’Abidjan et son frère, un officier supérieur de la gendarmerie à la retraite sont jugés devant le tribunal correctionnel du pôle économique et financier d’Abidjan. Leur procès se tient à huis clos.
55 millions, environ 84000 euros en espèces
Ce réseau de forces de l’ordre et d’indics trafiquant de drogue est tombé lorsqu’un des indics de la cellule avait été interpellé en possession de 37 grammes de cocaïne par les agents du Centre de coordination des décisions opérationnelles (CCDO), chargée de la lutte contre le grand banditisme. L’autre « informateur » qui, lui, est un revendeur de grosse envergure aurait joué un rôle central en balançant toute la cellule anti-drogue. Huit blocs de cocaïne sur dix auraient ainsi transité par son domicile sis à Yopougon-Maroc.
Cet « indic » était déjà à la base de l’arrestation d’« Ali le douanier ». Il sera donc appelé à la barre en qualité de témoin. Dans sa luxueuse villa d’Assouindé, les enquêteurs ont retrouvé un peu plus de 55 millions de F CFA en espèces, alors qu’il n’exerce aucune profession rémunératrice.
Ce n’est pas la première fois que les forces de l’ordre ivoiriennes sont épinglées dans une affaire de cette nature. En avril 2022, plus de deux tonnes de cocaïne avaient été saisies dans les villes portuaires d’Abidjan et de San Pedro. Une trentaine de personnes avaient été interpellées, dont le chef de la police de San Pedro.