Le décès d’une patiente, le 23 novembre 2016, à l’hôpital de Mercy, à Metz, a été à l’origine d’un conflit avec la direction de l’établissement, puis d’une crise au sein de l’aumônerie musulmane hospitalière qui est remontée jusqu’au bureau du CFCM, pour finir au Bureau Central des Cultes du ministère de l’Intérieur.
L’inhumation a été retardée quand l’aumônière musulmane a annoncé à l’administration, qui préparait l’incinération, que la défunte s’était convertie à l’islam. L’aumônière avait assisté à la séance de conversion en présence de l’imam local. Mais l’hôpital n’a renoncé à l’incinération que lorsque les enfants de la défunte sont venus confirmer la conversion de leur mère. Durant ce premier bras de fer, l’hôpital omit de mettre le corps dans une chambre froide. Déplorant un début de décomposition du corps, la famille a porté plainte contre l’hôpital.
Plainte devant les Prudhommes
De son côté, la direction de l’établissement a décidé le non renouvellement du contrat de l’aumônière. Persuadée de servir de bouc émissaire, celle-ci a voulu savoir ce qui lui était reproché exactement. L’hôpital s’est défaussé sur un responsable national de l’aumônerie hospitalière-qui est aussi chargé de l’aumônerie militaire dans plusieurs régions.
L’aumônière musulmane a porté l’affaire devant les Prud’hommes et son conseil a menacé de porter plainte contre le CFCM et même le Bureau central des Cultes. Ce service a, aux yeux de l’avocat, une responsabilité quasi-directe, pour avoir entériné des nominations trop marquées par la structure clanique de ce conseil, et dont les conséquences étaient facilement prévisibles.
Après avoir recommandé la discrétion, l’aumônier national menace de porter plainte en diffamation contre l’aumônière. Il lui reproche d’avoir diffusé un SMS destiné à obtenir son silence en échange d’une Omra(petit pèlerinage à la Mecque), aux frais de l’aumônerie. Cela a suffi aux internautes musulmans pour multiplier les commentaires sarcastiques.
Bien qu’informé depuis le début, le CFCM n’a pas daigné s’occuper de l’affaire que plusieurs mois après le licenciement de l’aumônière qui a été priée de « patienter » et, surtout, de se taire. Des pressions furent exercées sur cette dernière par plusieurs aumôniers régionaux, dont quelques uns participent à un enseignement sur les religions initié récemment avec le département de formation permanente de Sciences-Po de Paris qui entend rompre avec le tout-sécuritaire sur l’Islam imposé par Gilles Kepel jusqu’à ce qu’il soit sommé de prêcher ailleurs.
Des connections troubles
Des sous-courants du RMF ( Rassemblement des Musulmans de France ), émanation institutionnelle d’une des branches de « l’Islam marocain », chercheraient à exploiter cette pénible affaire pour prendre une revanche sur les autres clans du CFCM qui avaient procédé aux nominations d’aumôniers de façon peu équitable. En 2011, l’aumônier national en conflit avec l’aumônière de Metz était proche de l’UOIF qui, avant son retrait du CFCM, avait obtenu sa nomination avec l’appui de son alliée provisoire, la Grande Mosquée de Paris. Celle-ci acceptait les marchandages, pourvu que cela ne remette pas en cause son contrôle de l’aumônerie militaire, ni le maintien de son avocat à la tête de l’émission « islamique » dominicale, où l’avait intronisé , sans consultation préalable, le directeur de France 2, Christophe Baldelli, actionné par Nicolas Sarkozy soi-même . Cet avocat se prévalait jusqu’à 2012 de « l’amitié » de Sarkozy, lequel le soutenait au vu de ses relations privilégiées avec l’ex-DRS algérien…
La récente convocation de l’aumônier militaro-hospitalier par le CFCM consacre l’échec des pressions exercées sur l’aumônière de Metz par des aumôniers régionaux.
Promotion peu républicaine
En attendant de connaître le verdict du CFCM (et du Bureau central des Cultes), les internautes musulmans n’arrêtent pas d’ironiser sur le sens de la récente élévation de l’aumônier national au grade de Chancelier de la Légion d’Honneur, sur proposition du ministère de l’Intérieur (et non de la Santé), qui est interprétée comme une prime à l’autoritarisme et aux pratiques claniques.
L’affaire de l’hôpital de Metz est loin d’être un cas unique. D’autres conflits agitent l’aumônerie musulmane, dont les responsables réussissent souvent à empêcher qu’ils soient médiatisés. Le plus récent vient de se conclure par la démission de l’aumônier de Reims.
Au moment des premières nominations dans les aumôneries musulmanes, les membres cooptés du bureau du CFCM ne se sentaient pas tenus de faire preuve d’impartialité, au motif qu’il n’y aurait pas d’opinion musulmane. Certains « organisateurs » de l’Islam par le haut raisonnaient de la même manière.
Force est de constater la vanité de ce singulier argument qui se trouve régulièrement démenti sur les réseaux sociaux et à la sortie de la prière du vendredi.
Les questions de l’islam sont en train de cesser d’être réduites à l’état de « secrets » que les « représentants » cooptés des musulmans et l’islamologie administrative avaient réussi à maintenir à l’abri des curiosités des chroniqueurs religieux.
L’arrivée prochaine d’un turc à la tête du CFCM pourrait être l’occasion de dépasser les luttes d’influence entre le RMF et l’UOIF et d’atténuer les querelles au sein des factions issues des débris de la FNMF.