L’Institut Pasteur d’Abidjan vient de confirmer que la « grippe » qui explose ces jours ci à Abidjan est due à la 4eme vague de Covid-19. Reste que l’omerta des autorités, la diffusion de chiffres de contamination erronés et le manque de matériel dans des hôpitaux sans grands moyens ont créé une grande panique dans la population ivoirienne.
Une enquête de Michel Galy
Le continent africain, vacciné seulement à 5%, a relativement bien résisté à l’épidémie de covid ces deux dernières années. Les raisons en sont multiples. Tout d’abord, presque les deux tiers des populations, âgés de moins de vingt ans, sont moins exposés. Ensuite l’Afrique est en partie à l’écart des grands flux de la mondialisation porteurs du virus. Enfin l’existence d’épidémies à répétition (Ebola, Sida ….et autres) a inoculé dans la population africaine un certain nombre de réflexes bienvenus face au Covid.
Il reste qu’en cette fin décembre, Abidjan bruit d ‘une rumeur affolée sur les réseaux sociaux. Quelle est donc cette étrange « grippe » qui flambe comme un feu de brousse? Quels sont les symptômes inquiétants qui frappent une partie importante de la population? Bien qu’écrivant depuis Kinshsa, le témoignage du docteur Chifolo, ce lundi, a fait grand bruit. En détaillant pour lui même des symptômes inopinés et sévères du covid-19 qu’il n’avait pas reconnus immédiatement, ce médecin, réduit réduit à l’automédication et à l’isolement, vient de rompre le mur du silence
Le Covid, une maladie de blancs
La plupart des internautes se refusent à prononce le nom de coronavirus, corona et parfois « coronavirisi »: « c’est l ‘harmattan ». « C’est la grippe saisonnière »(qui existe bel et bien , et contre laquelle la vaccination a commencé en décembre)…On parle de tout sauf l ‘épidémie qui fait des ravages en Europe et surtout dans les diasporas. N’est ce pas une « maladie de blanc »? Le « microbe ne tue pas l’homme »(africain), c’est bien connu…
Au pire un peu de « jaune amer »(boisson forte) ou une bonne tisane de nym(plante médicinale) : les solutions « à l’indigénat » comme on dit parfois ont la vie dure et un rassurant aspect autochtone.
D’autant que le gouvernement ne dit rien comme à son habitude, entre discours lénifiant et communication très contrôlée, pour rassurer les investisseurs et attirer les touristes si possible…
L’opposition , en pleine réorganisation , semble assez apathique, inaudible, en tout cas très discrète sur le sujet. Quelques ONG de la société civile , comme ACI de Pulchérie Gbalet tentent bien depuis lundi d’alerter l’opinion. Hélas, les médias et autres réseaux sociaux restent, en cette fin d’année, amateurs de spectacles et … de clusters , ne l’aident guère.
5% de vaccinés à Abidjan
Rappelons que le continent est vacciné à 5% contre plus de 70% en Europe. La campagne de vaccination est catastrophique en Afrique de l’Ouest : le Nigeria a dû détruire des millions de doses de vaccin périmées, la Cote d’Ivoire est très loin de remplir ses objectifs.
Au Nord et au Sud la pandémie galope : au Maroc par exemple qui vient de fermer ses frontières, en Afrique du Sud qui subit des taux de létalité à l’occidentale: 100000 morts officiellement, peut être le double, contre quelques centaines pour les pays ouest africains…Secret de polichinelle, les chiffres officiels ne sont pas fiables.
Ll’ONG « Médecins sans frontières » a voulu en avoir le cœur net, et a décidé de faire ses test elle même dans une demi douzaine de pays africains ; dans l’étude publiée avant hier, les résultats pour le Mali sont inquiétants et révélateurs. Au lieu des 0,007% de séroprévalence officiels, il y a en réalité 25% de la population touchée. Pire pour le Niger, où le taux réel de séroprévalence est estimé pour fin décembre à 42%.
Qu’en est il par exemple d’Abidjan cette ville carrefour de 5 millions d’habitants, sans couvre feu, sans guère de gestes barrières, dont les hôpitaux pourraient être très vite débordés ?..Déjà en 2020 le docteur Jean- Marie Milleliri , épidémiologiste, a testé dans les zones aurifères ivoiriennes , comme à Man ou Divo : 20 à 30% de la population était atteinte. Selon lui, il faudrait multiplier par vingt les chiffres officiels- ce qui corrobore les estimations de Médecins sans frontières. Ce mercredi 29 décembre le Professeur Dosso de l’Institut Pasteur d’Abidjan vient de conformer que la soi disant « grippe » est bien la « 4ème vague de la covid19 ».
Lee système D omniprésent.
Conséquence de la fermeture des restaurants et du couvre-feu, les revenus des Abidjanais ont chuté et le système D a repris le dessus. comme le raconte les envoyés spséciaux du journal « La Croix », Sonia a flairé le filon dès l’apparition du premier cas en Côte d’Ivoire, mi-mars. Elle a installé un mini-stand de fortune devant son magasin de prêt-à-porter pour vendre elle aussi lingettes, gels et masques, à un prix un peu plus élevé qu’en grande surface.
À Adjamé, un quartier populaire, « on se débrouille », toujours selon le journal La Croix. Plusieurs ateliers de couture fabriquent quotidiennement des milliers de masques jetables ou lavables. Et même ceux qui disent « ne rien faire » essaient d’avoir un petit business sous le coude. Comme Anette, coiffeuse au chômage technique, qui vend désormais des jus : citron, bissap et « gemgem » (gingembre).
On ne sait rien !!!
98% des contaminés présentent dans le monde des formes bénignes. Qu’en sera t il avec le variant omicron, inévitable et déjà omniprésent au Sénégal et au Nigeria ? Ce sont des pays où 1% de décès équivaudrait à des dizaines de milliers de morts…
Certes, le professeur Raoult déclare qu’il travaille depuis 20 ans à Dakar avec les chercheurs sénégalais, sur une cohorte de coronavirus endémiques et la plupart du temps inoffensifs. Lui même se perd en conjectures, sans convaincre vraiment, sur la résistance des populations ouest africaines.
L’exception africaine se confirmera-t-elle? Où va t-on à la catastrophe ? Zn Afrique comme en Europe: on ne sait rein, ou pas grand chose, face à cette épidémie inédite