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Algérie, une Fatwa pour valider le vaccin russe contre le Covid

Personne n’y croyait, finalement ils sont arrivés : les voilà enfin, les vaccins ! Sauf que les islamistes prétendent que le vaccin russe contiendrait du porc !

L’aéroport militaire de Boufarik a réceptionné vendredi 29 janvier 2021 les premières doses du vaccin russe  SpoutniK 5, fabriquées en Inde. Juste à temps pour ne pas totalement décrédibiliser le pouvoir algérien qui avait promit un début de campagne de vaccination avant la fin janvier. Et de fait les premières injections ont été administrées dans la matinée du samedi 30 janvier dans la polyclinique de la cité « El Mouz » (Les Bannaniers),  à Blida, qui a été durement éprouvée par l’épidémie de coronavirus.  La vaccination du directeur de la santé de la wilaya de Blida, sous l’oeil attendri des  ministres présents et de quelques pontes militaires, a été bien évidement retransmise par  la télévision d’Etat. Il ne manquait que l’hymne national !  
Dimanche, l’opération devrait se poursuivre à Alger assurent les autorités plus que jamais revigorées. Désormais les responsables paradent sur les plateaux de télé. Sourire aux lèvres derrière leurs masques, ils assurent que l’Algérie recevra aussi, avant la fin de la semaine, un autre lot du vaccin AstraZeneca. Quelque 8 000 centres de santé seraient répartis à travers le pays sont mobilisés selon les autorités algériennes.
Comme l’Algérie est le seul pays de la région qui semble contenir la propagation du virus mortel, avec des chiffres à la baisse,  semaine après semaine, aussi bien de cas positifs que de malades hospitalisés, on peut dire que le hasard épidémiologique fait bien les choses. La campagne de vaccination ne pouvait connaître meilleures conditions. Sauf que les choses ne se passent jamais comme prévu en Algérie…

LES COBAYES ET LES INTÉGRISTES. 

Les français ne sont pas les seuls râleurs et réfractaires de la planète, les Algériens le sont tout autant. Sinon plus.  Il y a ceux qui rejettent le vaccin en pointant l’absence de recul pour évaluer les effets secondaires indésirables. Et les islamistes qui se sont empressés de propager la ( fausse ?) information sur la composition du vaccin, lequel contiendrait des « intrants » illicites, comprendre de la gélatine de porc,

il ne reste pas grand monde pour aller profiter des premières doses acquises par l’Algérie. Les uns disent qu’ils ne sont pas des cobayes, les autres affirment que le vaccin est « haram « (péché). Entre ces deux feux nourris le gouvernement a du mal à se faire entendre  Les plus acharnés contre le vaccin russe sont bien évidement les islamistes. S’exprimant sur des plateaux de chaînes de télévisions arabes satellitaires, leurs leaders font tout pour dissuader les Algériens de se faire vacciner. 

Cette réticence inquiète le Comité scientifique de suivi de l’évolution de la pandémie. Cité par Le Soir d’Algérie, le Pr Ryad Mahyaoui, membre du comité, s’étonne d’ailleurs de constater que les Algériens ont plus peur du vaccin que du virus Sars-CoV-2 lui-même. Pour être honnête, si personne ne s’attendait à cet improbable front de refus du vaccin russe ( qui va des intégristes les plus bigots aux esprits les plus rationnels), il peut néanmoins parfaitement s’expliquer en deux mots : défiance généralisée. 

LA CHARIA ET LA SCIENCE

Les islamistes privés de mosquées pour cause de pandémie reviennent en force avec l’affaire du vaccin russe. En l’espace de quelques heures, les commentaires se sont emballés, poussant le très officiel secrétaire général de la Coordination nationale des imams, Djelloul Hadjimi, à exiger du ministère de la Santé de dévoiler la composition du vaccin SpoutniK 5…
 
Quand la régression religieuse rejoint la régression des sciento-sceptiques, que peut faire le gouvernement? Une fois de plus, en l’absence prolongée du président Tebboune hospitalisé en Allemagne, ce sont les militaires qui ont décidé de reprendre les choses en main pour mettre un peu d’ordre dans ce souk pittoresque. D’après nos informations les haut-gradés ont exigé que le ministère des Affaires religieuses émette une « fatwa » pour apaiser les esprits, tout en insistant sur la nécessité de la vaccination contre la Covid-19. Dans un communiqué lapidaire le ministère des affaires religieuses affirme que « les vaccins disponibles ne contiennent pas de composants prohibés par la Charia».

La fatwa du ministère appelle ainsi les Algériens à se soumettre aux recommandations des services sanitaires, à se faire vacciner, «conformément aux dispositions de la Charia qui prône le traitement en reconnaissant l’existence d’un remède à toute maladie». 

UN PRÉCÉDENT DANGEREUX 

Cette intervention de la Commission de la fatwa dans le domaine médical a fait sortir de ses gonds le Docteur Lyes Merabet. « Qu’est-ce que mélange des genres ? » s’est interrogé le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique sur Facebook : « Si l’intention était de sensibiliser sur l’importance de l’opération et de rassurer les citoyens, il aurait suffi que le ministre et les cadres du ministère se fassent vacciner devant les caméras de télévision au lieu d’émettre une fatwa que d’autres pourraient demander demain pour des médicaments, sérums et autres préparations pharmaceutiques ».S’il fallait résumer la situation on dira que l’Algérie a commencé sa campagne de vaccination dans une tempête de polémiques qui rappellent que rien n’a été réglé politiquement dans ce pays. Avec peut-être une pointe positive pour terminer : cette abracadabrante polémique du vaccin hallal (ou pas) russe a inspiré le journal satirique en ligne El-Manchar qui a battu un record de clics avec son article parodique « Suite à une erreur de commande, l’Algérie se fait livrer de la Vodka au lieu du vaccin Sputnik V ».  

A lire ici : https://el-manchar.com/2021/01/suite-a-une-erreur-de-commande-lalgerie-se-fait-livrer-de-la-vodka-au-lieu-du-vaccin-sputnik-v/

Si en France tout se termine par des chansons, en Algérie tout se termine par une blague.i
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