Des dizaines de personnes ont été blessées, samedi à Port-bouët, non loin de l’aéroport Houphouët-Boigny, lors d’affrontements survenus entre la police et des vendeurs de moutons qui refusent le démantèlement d’un parc à bétail installé au sein de la commune.
Correspondance à Abidjan, Bai Abouè
C’est un autre « déguerpissement », ces expulsions à grande échelle qui se multiplient à Abidjanet qui tournent au vinaigre. Samedi, de violents affrontements ont en effet opposé des centaines de vendeurs de moutons à des forces de police ivoiriennes qui ne s’attendaient pas à une si forte résistance en se rendant sur le site de l’abattoir de Port-bouët, situé à 1km de l’aéroport d’Abidjan, pour aider au délogement des récalcitrants informés de leur départ trois mois plus tôt, ont affirmé des agents du District d’Abidjan.
Quinze personnes ont été grièvement blessées dans ces affrontements et transportées d’urgence à l’hôpital. Au titre des biens matériels, des véhicules tout terrain ont été saccagés et incendiés dont certains appartenant à la police, les deux porte-chars stationnés à quelques mètres ont été également incendiés en même temps les deux pelles mécaniques affrétées pour l’opération de démantèlement. Pendant des heures, toutes les voies de desserte de Port-bouët ont été bloquées tandis que d’énormes champignons de fumée noire s’échappaient de plusieurs endroits de la commune. Un bus de la Société des Transports abidjanais (SOTRA) a même été pris pour cible par les manifestants qui l’ont caillassé.
Ces violences faisaient suite à la décision du nouveau ministre-gouverneur de reloger ledit parc à bétail à Adjamé, sur un espace qui n’est pas adapté puisqu’il était initialement destiné à accueillir la nouvelle gare routière moderne d’Abidjan.
Le district autonome d’Abidjan a sévèrement condamné ces violences et promis de prendre les mesures nécessaires pour que justice soit rendue, a indiqué le service de communication dans une note envoyée à la presse. En revanche, le président de l’Union régionale des sociétés coopératives des marchands de bétail d’Abidjan (URSCMABA), Coulibaly Mory a précisé que les opérateurs économiques de la filière bétail-viande ‘’n’ont rien à voir ni de près’’ avec ces violences qui ont provoqué plusieurs autres dégradations en cours d’identification. « Nous n’étions pas informés de la présence d’un détachement de policiers à l’abattoir. Néanmoins, lorsque nous avons été informés qu’il y avait des risques d’affrontements avec des jeunes, le général Gaoussou Soumahoro et nous-mêmes sommes allés sur les lieux pour tenter de calmer les esprits », a indiqué Coulibaly Mory.
Les marchands de bétail en grève
Au lendemain de ces affrontements, le District d’Abidjan a réussi à déguerpir les sites visés, provoquant la destruction de plusieurs maisons construites à quelques mètres du parc à bétail. Cette opération intervient dans un contexte de tension matérialisé, jeudi, soit deux jours plus tôt, par l’exécution de la grève illimitée des marchands de bétail qui a complètement paralysé tous les services annexes de l’abattoir, notamment les services d’abattage, de commercialisation et de transformation.
À deux semaines de la Tabaski, cette grève pourrait paralyser la fête dite du sacrifice attendue par 42% de la population ivoirienne, puisque les vendeurs de bétail sont toujours opposés à leur relogement sur le site d’Adjamé d’une superficie de 15 hectares, mais « est trop exigu et ne disposant pas d’infrastructures nécessaires », aux yeux de Coulibaly Mory, le président des coopératives de vendeurs de bétail. Selon lui, ce site met aussi en danger la sécurité du bétail. Mais le ministre-gouverneur, comme à son habitude, ne compte pas laisser émouvoir.