Un juge de Monaco sur la piste du Crédit Mutuel

La Justice de la Principauté a mandaté un juge d’instruction sur les traces laissées sur le Rocher par la filiale de la banque à qui parler.

DESSIN_BKAvec le printemps, les premiers bourgeons apparaissent. Sur le rocher monégasque, où les magistrats sont détachés par le ministère français de la Justice, ils promettents de jolies fleurs. Voire même un très joli bouquet bancaire pour le juge d’instruction Pierre Kuentz. En février dernier, le magistrat passé par La Réunion a été désigné pour pour enquêter sur les agissement de la BNP Monaco. La filiale du géant français est soupçonné d’avoir actionné une «lessiveuse africaine» dans la Principauté. Comprendre avoir permis une fraude massive aux changes entre l’Europe et l’Afrique, doublée d’une possible évasion fiscale.

Quelques mois plus tôt, en fin d’année 2013 et  dans la plus grande discrétion, le juge  Kuentz a également hérité du brûlant dossier de la Pasche Monaco. Filiale à 100% du groupe Crédit Mutuel – CIC, le Pasche Group a vu son comptoir monégasque opportunément changer de main dans les derniers mois de 2013, pour être vendu au groupe luxembourgeois Havilland. Qui hérite ainsi d’un établissement visé par une enquête judiciaire pour blanchiment.

Petit rappel des faits, déjà narrés par Bakchich. Inquiets des us et coutumes au sein de Pasche Monaco, trois salariés alertent leur hiérarchie de procédures bancaires baroques en décembre 2013. Des dépôts d’espèces massifs de la part de clients pourtant simple vendeurs sur des marchés italiens, des possibles crédit lombard entre Monaco, la Suisse et les Bahamas où Pasche possède également une antenne, l’enregistrement sur les comptes internes de la banque d’opération pour un individu qui ne sera client que des mois plus tard. Autant de manoeuvres flirtant avec la légalité, même en des contrées à l’air fiscal aussi eque Monaco. Devant l’inanité de leurs supérieurs locaux, les lanceurs d’alerte prennent soin d’avertir par l’entremise de leur conseil le président du Crédit Mutuel Michel Lucas des errements de ses ouailles sur le Rocher. La rencontre a lieu en mars. La réponse ne tarde pas. En mai une réunion est organisée pour mettre fin aux pratiques. Sans suite… En juin les trois impétrants sont tout bonnement licenciés (1).

Frictions judiciaires sur le Rocher

Un mois après, le procureur général de Monaco, Jean-Pierre Dréno reçoit un signalement en bonne et dûe forme de possible blanchiment. Et voilà l’enquête prestement lancée pour s’accélérer en fin d’année avec la désignation d’un juge d’instruction, signe annonciateur de l’épaisseur du dossier.

Lire: Crédit Mutuel, la banque à qui parler Cash

Depuis, la procédure paraît un brin gelé. Sont-ce les giboulées tombés en février qui ont freiné l’ardeur des policiers? Ou bien l’ambiance glaciale qui régit les relations au Palais de Justice entre le juge Kuentz et le procureur général de Monaco Jean-Pierre Dréno. Selon des indiscrétions récueillies par Bakchich les deux magistrats se sont opposés sur de nombreux dossiers. Et notamment l’épineuse affaire des sondages de Monaco. Comme l’a révélé Le Point, le procureur Dréno a été assigné pour violation du secret de l’enquête par l’ancien président du conseil (l’équivalent du Premier ministre) Jean-François Robillon. Ce dernier reproche au magistrat d’avoir évoqué sa garde-à-vue dans la presse…dans un dossier instruit par le juge Kuentz. En fait le chef du gouvernement de Monaco et son chef de cabinet ont été soupçonnés de «violation des données personnelles» de sondés d’un questionnaire portant sur leur bilan.

Cerise sur le Rocher, le magistrat instructeur a finalement requis le classement sans suite de l’affaire…décision dont le parquet a fait appel. Beaucoup de tiraillement pour un Etat confetti…

PAR XAVIER MONNIER

(1) les trois salariés ont saisi le tribunal du Travail de Monaco qui doit juger du litige le 28 avril prochain. Les trois lanceurs d’alerte réclament 1,8 millions d’euros à la banque