Le principe de Peter connaît une nouvelle application en Centrafrique avec le chef de l’Etat et ex professeur de mathématiques Faustin-Archange Touadera, qui a gravi tous les échelons pour arriver à la présidence de la République.
Selon ce principe, tout membre d’une organisation hiérarchique pyramidale, reconnu pour sa compétence et son dynamisme, est généralement récompensé par une promotion qui le fait monter dans la hiérarchie jusqu’à atteindre un poste où il devient incompétent et souvent dangereux pour l’organisation. Une fois devenu incompétent pour exercer les responsabilités de ses nouvelles fonctions, le titulaire du poste se réfugie dans les discours de circonstances, la multiplication des voyages et des réunions plus ou moins utiles. A défaut de remplir des objectifs et de mesurer les résultats, il doit paraître pour exister.
Des mathématiques à la politique
C’est bien le cas de Faustin-Archange Touadera. Brillant professeur d’université, membre de plusieurs associations internationales de mathématiciens son passage à la direction de l’Ecole Normale Supérieure de Bangui où il fut très apprécié tant par les élèves que les professeurs restera dans les annales. Ne pouvant ignorer ses qualités académiques, les autorités de l’université le nommèrent vice-doyen puis doyen de la Faculté des sciences. La réputation scientifique et les qualités de gestionnaire du professeur Touadera en faisaient la personne toute désignée pour devenir le recteur de l’université de Bangui, en perpétuelle effervescence. Ce qui fut fait, en 2004, grâce à la nomination prononcée par le ministre d’État de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur de l’époque, Karim Meckassoua, aujourd’hui président de l’Assemblée nationale. Une nomination confirmée par la suite, par un autre ministre de l’éducation nationale, Charles-Armel Doubane, aujourd’hui ministre des Affaires étrangères. En Centrafrique, la fidélité est dûment récompensée…
Le recteur Touadera se réfugia alors dans une gestion complaisante avec l’association nationale des étudiants, laissant le soin à son secrétaire général et ancien collaborateur à l’ENS, Simplice Sarandji, de se confronter aux revendications des étudiants et des professeurs de l’université. Celui qui deviendra président de la Centrafrique était alors encore très éloigné de la politique. C’est le président François Bozizé qui le sortira de l’université pour lui confier, à la surprise générale, le poste de Premier ministre. Le général-président recherchait, avant tout, un collaborateur loyal et sans ambition politique plutôt qu’un véritable chef de gouvernement. Le mathématicien de Boy-Rabe, quartier de la capitale Bangui, fut donc plongé dans le « marigot banguissois » en acceptant l’autonomie du clan présidentiel.
La RCA dans l’impasse
Comme à l’université, le Premier ministre a délégué une partie de ses responsabilités à Simplice Sarandji, devenu son directeur de cabinet et à Firmin Ngrebada, son chef de cabinet factotum. N’ayant pu stopper là rébellion de la Seleka ni faire face au mécontentement populaire, renforcé par les élections présidentielle et législatives truquées de 2011, le Premier ministre Touadera dû s’effacer, dans l’indifférence générale, le 12 janvier 2013, au lendemain des Accords de Libreville.
Aujourd’hui, Faustin-Archange Touadera est devenu Président de la République, suite à sa victoire-surprise à l’élection présidentielle de février 2016. Mais c’est davantage l’universitaire modeste que l’ancien Premier ministre qui a été élu. Simplice Sarandji et Firmin Ngrebada ont également, une nouvelle fois, bénéficié d’une promotion dans la hiérarchie en devenant respectivement Premier ministre et directeur de cabinet.
Depuis plusieurs semaines, la Centrafrique est le théâtre de tueries quasi quotidiennes tandis que l’impunité règne dans le pays. A défaut de pouvoir résoudre la quadrature du cercle, le professeur Touadera avec ses collaborateurs Simplice Sarandji et Firmin Ngrebada a démontré que le principe de Peter n’était pas qu’une théorie…