A l’approche des élections présidentielles de l’été, les associations et regroupements à caractère politique naissent comme des champignons. A chaque journal télévisé, sont diffusées les images de leur lancement. Le temps de diffusion dépend de leur degré d’allégeance au pouvoir.
Ce qui frappe, à première vue, c’est que beaucoup de femmes en sont les promotrices. Qu’est-ce qui peut expliquer ce brusque intérêt des femmes pour la chose politique ? Est-ce la lassitude des hommes, de plus en plus blasés par la chose politique ? Quelles sont les raisons de leur engouement ?
Il est vrai que depuis longtemps, à l’approche des élections, les femmes et les jeunes sont les segments sociaux les plus mobilisés. On peut le constater encore dans les meetings et autres manifestations publiques des acteurs de la scène politique.
Les premières organisations créées ces derniers temps, portaient de manière visible la marque du pouvoir. Elles étaient souvent la réplique de celles créées par les contestataires et les opposants. Ainsi « An te a bana » qui rejetait le référendum constitutionnel, a vu naître son contraire « An son na ». De même « Boua ka bla » qui réclamait le départ du président a vu surgir sa réplique « Boua ta bla ». C’était du tac au tac. Pas besoin d’aller chercher loin. La plupart du temps sans argumentaire. Il fallait répondre, souvent avec vigueur mais avec beaucoup de maladresse. Il en fût de même sur les réseaux sociaux. Il fallait occuper l’espace médiatique vite saturé par les attaques à caractère personnel et les insultes. Le niveau du débat n’est pas sans rappeler, avec encore plus de virulence, celui qui a opposé aux USA, Trump à Hillary Clinton, lors des dernières élections américaines.
Les organisations actuelles qui ont fleuri dernièrement sur la scène politique, semblent apparemment prendre plus de hauteur. Elles se focalisent de plus en plus sur les moindres réalisations du président et de son programme dit d’urgence sociale : points d’accès à l’eau potable, raccordements au réseau électrique, centres de santé, routes, etc. Tout est fait pour valoriser les moindres réalisations du pouvoir, même si certaines remontent à de vieux projets datant de nombreuses années mais qui tombent à pic. A titre d’exemples, on peut citer le redémarrage des travaux du barrage de Taoussa (coût prévisionnel plus de 167 milliards de francs CFA avec un coût additionnel de 5 milliards pour la sécurisation des travaux). Travaux de maintenance sur le barrage de Markala (1 milliard de francs CFA). Inauguration en grande pompe dans les jours à venir d’un échangeur à Ségou (8 milliards de francs CFA).
Tout est présenté comme si les financements étaient le résultat de la générosité du président et parfois même décrit aux populations, selon les commentaires en langues nationales, comme si l’argent sortait de sa poche. Tout le Mali semble être en chantier. Le président bâtisseur est chanté dans des concerts de louanges qui n’en finissent pas. La télévision d’Etat y consacre de nombreuses émissions. Même les médias privés sont sollicités. La musique est connue. Mais on ne parle point des surfacturations qui se cachent derrière cette frénésie de chantiers multiples à géométrie variable. Comme à l’accoutumée, de nouveaux opérateurs économiques et de nouvelles fortunes surgiront comme une génération spontanée. Mais bien après, on finira par découvrir derrière, les acteurs politiques qui en tiraient les ficelles.
La toute dernière génération d’organisations qui ont surgi ces jours-ci, parle d’une thématique dans l’air du temps. Elles sont centrées autour de la nécessité de réaliser l’unité nationale, surtout en cette période de péril pour la nation. Mais unité nationale autour de quoi et derrière qui ? Tout reste dans le flou et à souhait. Mais en filigramme, certainement autour du chef. La conclusion parait logique même si cela n’est pas dit clairement. Les lancements de ces associations se font, tout de même, dans des conditions qui amènent à s’interroger sur l’origine de leur financement, en raison des moyens mis en œuvre.
Est-ce une nouvelle technique de mobilisation de l’électorat ou une parade du pouvoir face au peu de crédit du parti présidentiel auprès des populations ? Est-ce une trouvaille pour palier sa faible capacité de mobilisation ? Est-ce une astuce pour capter des financements en cette période de fièvre électorale de la part d’individus plus ou moins avisés ? Ou tout cela en même temps ?
En tous cas, la foire électorale semble ouverte. Elle bat son plein. C’est le moment de se remplir les poches et ramasser le maximum auprès de la classe politique. L’opposition n’est pas en reste. Elle utilise les mêmes méthodes mais avec moins d’envergure. Elle n’a pas les moyens de l’appareil d’Etat. Dans les campagnes, les villageois ont si bien compris qu’ils déroulent systématiquement les nattes de bienvenue à tous les candidats, en fonction du montant des sommes distribuées. Il ne faut rien refuser et prendre de tous les côtés. C’est la période des enchères. Son cycle est de 5 ans. Autant en profiter jusqu’à la prochaine foire aux élections…
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