Les journalistes algériens dans le collimateur du pouvoir.

Solidaire de confrères courageux, « Mondafrique » a choisi d’offrir une tribune à Hicham Bouallouche, directeur Général d’Al Atlas TV, qui subit aujourd’hui encore la vindicte du pouvoir via de possibles poursuites judiciaires. L’interdiction d’émettre infligée à Atlas TV préfigure le sort réservé désormais à tout média non officiel, comme le montre l’interdiction toute récente, sous prétexte d’impayés, du journal arabophone « El Fadr »

Atlas_TVLa chaine privée algérienne, Atlas TV, s’était distinguée par une totale indépendance durant la campagne électorale qui a vu la réélection du président Bouteflika pour un quatrième mandat. D’où une fermeture totalement arbitraire, voici trois mois. Cette situation dure encore aujourd’hui en dehors de toute justification. Cette fermeture a été exécutée par les instances judiciaires sans que celles-ci, jusqu’aujourd’hui, n’a signifié le moindre motif pour justifier cette procédure.

Ces mêmes instances ont procédé à la fermeture des studios que la société ALPHA BROADCAST louait à Al Atlas pour la production de ses émissions. Cette société qui loue par ailleurs ses services à d’autres producteurs est toujours interdite d’activité alors qu’elle n’a aucune relation juridique avec Al Atlas TV si ce n’est des relations de prestations de services. Elle subit actuellement un préjudice moral et financier exceptionnel.

Le règne de l’arbitraire

Ce n’est pas la loi qui est appliquée dans sa rigueur, mais la force de l’arbitraire d’un pouvoir qui refuse d’accepter la liberté d’expression et d’information aux citoyens algériens. L’écrasante majorité des médias autorisés « à exercer leur métier » sont acquis à sa cause, tous supports confondus, et de surcroît dans des conditions précaires pour mieux les contrôler. Seuls quelques médias résistent encore à la volonté du pouvoir d’embrigader tout le système d’information et de communication.

Ceux qui ont réussi à se doter des moyens de leur autonomie financière survivent, quant aux autres, ils subissent les pressions les plus sournoises par le biais de l’asphyxie financière à travers le monopole de la publicité conjuguée aux dettes accumulées auprès des services d’impression de l’Etat pour les empêcher de paraître, pour ce qui concerne la presse écrite.

Nous en appelons à l’ensemble de la profession, éditeurs et journalistes, pour manifester leur solidarité avec leurs confrères victimes de décisions illégales, discriminatoires et attentatoires aux libertés. Car se taire, c’est livrer leur propre destin à l’arbitraire du pouvoir et contribuer à empêcher le peuple algérien d’exprimer librement sa voix.

Par ailleurs, comment croire la volonté d’un Etat à vouloir faire le bien de son peuple alors qu’il laisse dans l’impunité la plus totale des corrompus qui ont commis des crimes économiques sans précédent contre la Nation, et qui se chiffrent à des centaines de millions d’euros, pour ne pas dire des milliards, subtilisés au Trésor algérien, et dans le même temps passer son temps à réprimer les Algériens qui font le choix du civisme en gagnant leur vie exclusivement dans le respect de la loi.

Les promesses n’engagent que ceux qui y croient

Les pratiques du pouvoir, et du ministère de la Communication et de l’Information en particulier, sont en contradiction flagrante avec ses professions de foi, lesquelles affirment « garantir le droit à la liberté d’expression et le droit à l’information » et « parachever la construction de l’Etat de droit ». Le processus actuellement en cours de révision de la Constitution, laquelle prévoit justement la garantie de ces droits, a essuyé un très large refus de la part de tous les acteurs qui œuvrent pour un véritable Etat de droit. C’est dire le peu de confiance que la société accorde aux promesses du pouvoir.

Si le pouvoir désire montrer sa bonne foi, il doit non seulement arrêter toute pression sur la presse et les journalistes, mais il doit réparer cette injustice insupportable en rétablissant immédiatement dans ses droits la chaîne Al Atlas TV, dont le vœu est de pouvoir exercer son activité dans le strict respect de la loi, comme elle l’a toujours fait depuis sa création. Il est encore plus urgent de mettre fin à la situation de non-droit total que subissent les studios d’ALPHA BROADCAST, dont aucune, absolument aucune raison ne peut justifier la fermeture.

A défaut  de prendre ces mesures, les autorités nous aurons donné la preuve de leur totale absence de volonté de faire évoluer le pays vers un véritable Etat de droit, car sans liberté d’expression et droit à l’information, il ne peut y avoir de démocratie authentique.

Toutes les discussions sur la Constitution, le programme du Gouvernement prétendant apporter plus de progrès au peuple, et en particulier les instances de régulation de la presse qu’il dit mettre en œuvre pour assurer la liberté d’expression et de l’information, ne sont dès lors qu’une façade dont l’objet est de masquer un pouvoir autoritaire qui ne veut tirer sa légitimité que par la force de l’arbitraire, et non de la volonté souveraine du peuple.

« Mondafrique » suivra de très près dans les prochaines semaines les nouvelles atteintes aux libertés publiques de la part du clan présidentiel qui entoure le chef de l’Etat, impotent et épuisé, qui s’est réfugié dans sa demeure de Zeralda. A partir de mardi prochain, le site publiera, chaque semaine, le journal intime de Said Bouteflika, le frère du président et le véritable patron de l’Algérie actuelle. Cette chronique s’intitulera: « Said, le régent de Zéralda ». Premier épisode du vrai faux journal de Said: « Mes belles années parisiennes ».