L’empire Rebrab vacille en Algérie 

Les ennuis d'Issad Rebrab, le plus en vue des industriels algériens, et de son groupe Cevital, reprennent de plus belle

Au début de l’année 2017, un accord au sommet semblait s’être dessiné entre le président Bouteflika et l’homme d’affaires Issad Rebrab, deuxième contributeur du budget algérien derrière la Sonatrach. Les deux hommes s’étaient rencontré au palais de Zéralda, un compromis avait été trouvé.

Or l’armistice est bel et bien terminée. Le patron du groupe « Cevital » qui ces dernières semaines s’était investi en faveur du projet grandiose d’une ligne de chemin de fer reliant Alger et Le Cap, rencontre à nouveau d’innombrables difficultés sur le terrain. Totalement affaibli, le chef de l’Etat algérien ne contrôle plus les lobbies qui veulent faire la peau à l’homme le plus riche d’Algérie. Industrie automobile, secteur agroalimentaire ou encore hôtellerie, tout est fait à Alger pour que Rebrab perde des parts de marchés. Impatients voire voraces, ses concurrents encouragés veulent en découdre et se partager le miettes de l’empire.

Echec et mat en Corée

Commençons, d’abord, par l’industrie automobile. Renault, Kia, Peugeot, Volkswagen ont tous trouvé des partenaires algériens pour ouvrir des usines de montages afin de profiter des potentialités immenses du marché algérien, le premier marché en Afrique. Or dans ce secteur, Issad Rebrab a essuyé, la semaine passée, un inquiétant revers. Son fils aîné, Omar Rebrab, est parti jusqu’en Corée du Sud pour tenter de regagner les faveurs du géant Hyundai avec lequel il a rompu en 2016.

Le fils Rebrab a tout fait pour convaincre les sud-coréens de conclure un nouveau partenariat qui permettrait de réaliser une partie de la fabrication des voitures en Algérie. Omar Rebrab avait en prime une offre juteuse pour séduire le partenaire asiatique. A savoir le financement d’une usine de montage au Maroc où un la sous traitance automobile connait un essor considérable!

L’offre est refusée catégoriquement par Hyudaï, a-t-on appris de source sûre. Le constructeur sud-coréen aurait clairement expliqué à Rebrab qu’il ne voyait aucun intérêt à disposer d’une usine au Maroc alors qu’il avait décidé d’investir dans une usine en Algérie avec le groupe Tahkout. Adversaire de toujours d’Issad Rebrab, Makeddine Tahkout est un redoutable homme d’affaires qui ne se déplace jamais …sans son arme. Il dispose d’appuis au sein même de la Présidence, où il est protégé par l’ancien Premier ministre entre 2008 et 2012 devenu le directeur de cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia (voir photo ci dessous).

Du coup, Cevital accuse ainsi un important retard par rapport à ses concurrents, le groupe Tahkout naturellement, mais aussi Condor, le partenaire du projet Peugeot en Algérie. Il lui faut trouver un constructeur mondial qui accepte de se lancer avec lui dans une aventure industrielle en Algérie. « Les blocages dont Rebrab souffre en Algérie n’arrangent pas sa position face aux Asiatiques », explique une source proche de l’ambassade de la Corée du Sud à Alger.

Sur le terrain judiciaire

Privé d’un accord en bonne et due forme avec le groupe Hyundai, Issad Rebrab et son fils peinent à pacifier ses relations avec les autorités largemetn instrumentalisées par ses adversaires. A Béjaïa, le berceau de son groupe, l’industriel vient de se lancer dans un conflit ouvert avec le port qui a refusé d’accoster un bateau qui transportait du matériel pour son complexe agro-industriel. Selon nous sources, les autorités demandent à Rebrab d’indiquer la localisation exacte des équipements. Ce à quoi il s’est opposé.

Face au blocage qui persistait de la part des autorités portuaires, l’affaire a été portée en justice pat Cevital. En référé, la décision du tribunal a été favorable à l’industriel. Le lendemain, le Tribunal de Bejaia revenait sur son arrêt de la veille.

Dans le secteur de l’électroménager enfin, la marque française Brandt, rachetée par Issad rebrab, a du mal à conquérir le public algérien. Face à Condor, Stream ou Géant, la marque de Rebrab n’a pas encore conquis son marché.

Quand prendra fin la traversée du désert d’Issad Rebrab, qui contrairement à beaucoup d’autres pseudos industriels, est parvenu  à transformer une partie de la rente pétrolière en investissements productifs?

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)