Le Sénégal devrait généraliser l’enseignement des langues locales.

Amdou Ba (à droite) et Bassirou Diomaye Faye (à gauche) présentés comme les favoris de l'élection présidentielle sénégalaise du 24 mars 2024.

En plus du wolof parlé par plus de 80% de la population, les autorités sénégalaises ont décidé de généraliser l’enseignement des langues locales dans le pays. Mais de nombreux défis doivent être franchis.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Au Sénégal, le wolof a détrôné le français, la langue officielle du pays, ainsi que les autres langues locales. Ces dernières, une trentaine, vont peut-être rattraper le wolof puisque les autorités sénégalaises ont décidé de généraliser l’enseignement des langues nationales. Depuis 2018, une phase pilote de ce projet a vu le jour. Elle permet d’envisager les langues nationales comme un complément du français à l’horizon 2029.

L’enseignement des langues locales répond surtout à un objectif de performance. Selon le Pr. Adjaratou Sall, chercheuse en langue à l’Université de Dakar, « quand un enfant apprend sa langue maternelle, c’est un gage de réussite indéniable. Les enfants sont beaucoup plus intéressés et le taux de réussite est visible », explique-t-elle.

Amina Seck, qui vit à l’étranger, a, pour sa part, compris que l’apprentissage du wolof est le seul moyen de s’intégrer dans la société sénégalaise. Alors, depuis là où elle vit, elle suit ses cours de wolof en ligne dans un café avec son professeur Tierno.  « Je crois que c’est une langue qu’il faut maîtriser pour bien se déplacer dans l’espace social, aussi bien en ville que pour échanger avec les autres et comprendre la culture », se réjouit-elle.

Le défi de la formation

Pour renforcer l’utilisation des langues locales, plusieurs maisons d’édition ont vu le jour. L’une d’elles qui s’appelle Ejo, édite depuis cinq ans des manuels dans une dizaine de langues dont le wolof. Sa directrice Ndeye Codou Fall Diop estime qu’« une maison d’édition doit être en corrélation avec la langue parlée par les populations. Or le français n’est pas la langue parlée par les populations. Elle fait partie de notre histoire mais il faut commencer par nous approprier ou nous réapproprier ce qui nous appartient ».

Grâce à cette phase pilote, le gouvernement espère obtenir une cartographie linguistique complète du pays afin de définir la langue adéquate pour chaque zone du pays. Mais de nombreux défis se dressent sur le chemin de l’Etat, aux yeux du ministre de l’éducation nationale, Mustapha Guirassy. « Le premier défi est la formation des enseignants. L’autre défi : est-ce qu’il sera possible de fabriquer autant de matériels didactiques, autant de manuels pour chaque langue nationale parce que nous avons 20 langues codifiées ? Ça fait beaucoup ».

Malgré tout, l’enseignement des langues nationales bénéficie d’un contexte plutôt favorable. Depuis juillet, en effet, le wolof et une trentaine de langues sont disponibles sur google traduction.