Au Mali, toujours aucun bilan officiel après la double attaque jihadiste qui a frappé le 17 septembre 2024 la capitale. Une école de gendarmerie et une base militaire située à l’aéroport de Bamako ont été attaquées par le Gnim (Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans), lié à al-Qaïda. D’après RFI, des sources sécuritaires et civiles maliennes évoquent quant à elles un bilan très lourd de plus de 70 morts.
Les terribles attaques enregistrées à Bamako, le 17 septembre 2024, donnent la mesure de la confrontation actuelle entre la junte malienne et les groupes djihadistes, notamment le GNIM dirigé par le désormais célèbre Iyad Ag Ghali, qui fut l’ennemi public numéro un de l’armée française avant son départ précipité du Mali.
Avant la toute dernière offensive urbaine du GNIM (ou encore JNIM) sur Bamako, le 17 septembre, les avertissements n’ont pas manqué, et depuis fort longtemps. En 2022, le camp de Kati, la place forte de l’armée malienne, où réside Assimi Goïta, a été ébranlé par des véhicules suicides et des tirs de mortier. Mais cette base militaire se trouve à une vingtaine de kilomètres de la capitale malienne. Le 17 septembre, l’ attaque djihadiste a eu lieu dans le vieux quartier de Faladié de Bamako au coeur du pouvoir.
Les attaquants ont choisi deux cibles à dix kilomètres l’une de l’autre, des points nodaux sécuritaires et militaires. La pénétration du JNIM sur la base militaire 101 à Bamako démontre clairement les insuffisances des mercenaires russes de Wagner, déjà éprouvés par une attaque coordonnée à la frontière algérienne. Mais les drames en pertes de vies humaines de l’opération du JNIM soulèvent quelques questions plus spécifiques. L’école de gendarmerie servait donc également de lieu de détention ? S’agissait-il d’un centre destiné à la gendarmerie ou à la police militaire ? Quelles sont les types de sécurité et les chaines de commandement pour protéger l’aéroport, la base 101 et le site civil de Senou?
Des bases en Guinée
Depuis 2023, le JNIM passe par la frontière de la Guinée pour agresser le Mali. Le JNIM dispose chez le voisin guinéen d’une base et de soutiens. Les lignes de communication de l’armée malienne (ou FAMA) qui ont été attaquées à cinq reprises depuis mars 2024. Le 7 et le 20 mars, les FAMA ont abandonné leurs positions sur la route qui mène à la Guinée, laissant armes et véhicules à leurs assaillants.
Le JNIM est en train d’encercler peu à peu la capitale malienne, sans que ne dessine la contre-attaque contre cet étranglement. certes, des négociations sporadiques se poursuivent entre certains éléments de la junte malienne et le JNIM sont menées parallèlement, mais pour autant les attaques islamistes sont de plus en plus ciblées.
Niger, une convergence des luttes
Le JNIM qui réduit peu à peu la présence des FAMA sur le terrain et discrédite la légitimité du pouvoir en détruisant postes de police et les positions militaires. La mobilité des troupes maliennes vers la frontière guinéenne est à présent réduite. Le risque d’un blocus n’est plus à écarter.
Quelques jours après les sanglants événements, trois attaques séparées au Niger causent la mort d’au moins douze militaires. Dans la région de Tillabéri, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale Niamey, cinq soldats ont été tués et vingt-cinq autres blessés. Lundi, dans la région de Diffa, en proie aux attaques de Boko Haram et de la branche « Afrique de l’Ouest » du groupe État islamique, une patrouille « a été victime d’un incident lié à un engin explosif improvisé qui a occasionné la mort de cinq soldats».
Mardi, dans la région d’Agadez, dans l’extrême nord du pays, une autre attaque a visé un « camp militaire et le poste de gendarmerie de Chirfa ». Deux militaires sont morts et six autres blessés.
L’État Islamique au Grand Sahara et le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (JNIM) répondent coup pour coup à l’Alliance des États du Sahel qui regroupe le Mali, le Niger et le Burkina et qui s’est réuni tout récemment à Bamako autour du thème «Coopération et enjeux sécuritaires». Malgré des succès diplomatiques indéniables face à la CEDEAO, la jeune Alliance tarde à se doter d’une stratégie sécuritaire qui détermine ses ennemis principaux, ses potentiels alliés et les moyens de refondre leur appareil sécuritaire et militaire sur une autre base que le legs du système IBK dont le bilan désastreux mérite encore d’être établi.
Le scénario catastrophe
La manœuvre des ennemis du pouvoir de Bamako a été assez largement décrite. Olivier Walther de l’université de Floride, dès juillet 2022, n’excluait pas que Bamako puisse arrêter et freiner la circulation sur les six routes qui l’alimentent. Olivier Walther faisait ainsi la comparaison avec Maiduguri qui en 2020 se trouvait entourée par Boko Haram et souvent infiltrée avec des coups d’éclat contre la police et l’armée dans la ville même.
Les limites que le chercheur pose à un scénario de conquête de Bamako tiennent à deux facteurs. Bamako serait sans doute ingouvernable pour le JNIM et qu’y faire, si Kidal, Tombouctou, Gao et Kidal ne sont pas sous son contrôle. Mais il est toujours hasardeux de spéculer sur la rationalité de mouvements armés engagés dans un rapport asymétrique avec l’État et des forces armées conventionnelles. Malgré sa supposée expertise, l’opération Barkhane, voisinait à Gao, avec les groupes armés qu’elle combattait. Sans doute a-t-elle compris trop tard que la lutte contre ce type d’adversaire passe par le ralliement de la population à la quantité et à la qualité de services que le budget de l’État peut offrir.
Un clin d’oeil des djihadistes à IBK
L’attaque du Jama’at Nusrat al Islam wa al Muslimeen (JNIM) a frappé le site où auraient été gardés certains des prévenus les plus notables du procès du fameux avion présidentielle qu’IBK, l’ancien chef d’état, s’était offert à prix d’or avec l’appui des autorités françaises. Après s’être emparé du poste de police gardant l’aéroport civil Modibo Keita Senou, le groupe armé du JNIM a de plus endommagé l’avion présidentiel incriminé.
La frappe d’Al Qaida d’une ampleur inégalée au coeur de Bamako